T'es encore assez con pour mater un slasher en big 2023 ? Moi oui.

(pas trop de spoilers dans cette critique, si ce n'est le plot qui est dévoilé noir sur blanc dans le premier quart du film)


31 octobre au soir, pizzas, canettes de 1664, mon pote et moi on va mater un film d'horreur le soir d'Halloween comme de bon gros normies. J'connais pas le synopsis et ça m'fait bien plaisir, j'ai entendu assez de fois le titre revenir dans les conversations de mes copains ces dernières années pour savoir que c'est pas un mauvais film alors on y va, c'est parti !

Très vite on nous explique clairement qu'il y'a une chose qui prends forme humaine et qui veut buter des petits jeunes sans histoire juste parce qu'ils ont baisé. Amusant. Je me dis donc que c'est un slasher pur jus, ce genre cinématographique bien galvaudé qui date des années 70, né aux USA et dont le but est simple : montrer des ados décérébrés qui ont picolé et couché se faire déchiqueter par un grand méchant. La morale est simple : joue pas au con. Un formidable genre mi-subversif mi-conservateur qui va enseigner à toutes les jeunes têtes blondes de cette époque en quête de sensations fortes au cinéma que alcool / drogue / sex = décès. Longue vie au protestantisme !


Sauf qu'entre un slasher rigolo des années 70 parce que l'hémoglobine coule à flot et It Follows y'a pas grand chose en commun. Pas de série de meurtres sanglants et hurlants, pas de personnages idiots qui s'isolent sans raison alors que le danger guète. Juste des ados pas trop bêtes et une chose, inconnue, qui est décrite ainsi simplement : "elle peut prendre la forme de quelqu'un que tu connais, que tu aimes, ou d'une personne inconnue. Où que tu sois, à n'importe quel moment, elle marche vers toi. Elle est lente, mais elle n'est pas bête."

Après visionnage j'ai remarqué que j'avais déjà vu un film de David Robert Mitchell : "Under The Silver Lake". Rien à voir dans le genre ni dans l'histoire mais on retrouve dans It Follows le soin de l'esthétique impeccable du réal. La photographie superbe, quasi surréaliste, les plans léchés, la caméra se déplace toujours dans un mouvement fluide, les échelles de plans et les points de vues rendent grâce à tout ce qui est filmé : c'est beau. Le rythme est lent comme la chose elle même, l'urgence est là mais elle arrive en marchant.

On est loin de l'avalanche d'effets spéciaux, loin du jumpscare facile, loin de l'hémoglobine gratuite, on est là pour voir des belles images, de beaux acteurs qui jouent bien, et peut être un peu pour bader aussi.

La bande son toute en synthés nappés recouverte de mélodies qui progressent n'est pas sans rappeler le talent de ce cher John Carpenter. La mélancolie de l'inéluctable, ou peut être pas ?

(Spoiler à partir de maintenant) Quel plaisir de voir des personnages de films d'horreurs pas cons : le mal qu'ils affrontent ils n'ont aucune prise dessus et ils tentent de l'affronter de la manière la plus intelligente possible : en restant ensemble, soudés. Le temps long laisse aussi le temps de pouvoir créer de l'empathie pour les protagonistes car oui, ceux-ci le méritent. Au diable les ados décérébrés, moqueurs, bêtes et querelleurs qui peuplent les slashers classiques, It Follows montre des ados foncièrement bons qui pardonnent, s'écoutent et s'entraident face à un mal qui même lorsqu'il est absent ronge d'angoisse, fusille toute envie, même absent il tue froidement toute vie paisible et insouciante.


Ce film qui reprend ce concept galvaudé et puant qu'est le slasher est en fait un anti-slasher.


Oui, la construction et l'évolution scénaristique est similaire, oui il met en scène les mêmes types de personnages mais pas leur archétypes stéréotypés et la morale qui s'en dégage s'en trouve totalement à l'opposé de ce qu'elle était dans les films du genre il y a 40 ans.


David Robert Mitchell a donc pris un concept conservateur pour le retourner entièrement et en faire l'inverse de ce qu'il était. Un pari risqué et totalement réussi.



Nvsk
9
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le 1 nov. 2023

Critique lue 14 fois

Nvsk

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