"Et là, il part pour ne jamais avoir à se retourner, pour ne jamais avoir à fuir..."

Alors déjà le gars Nolan, c'est pas un bon scénariste. Un très bon metteur en scène c'est sûr, un réalisateur qui sait s'entourer d'une bonne équipe aussi. Mais utiliser toujours les mêmes acteurs, les mêmes facilités scénaristiques et les mêmes ficelles dramatiques en espérant raconter une nouvelle fois, une histoire qui "bouleversera" le cinéma, on sent la force de la puissance du génie qui nous crie "TU VAS VOIR MON FILM, C'EST UN PUTAIN DE FILM !!!". Sauf que l'espace, le temps et la transcendance, c'est chaud à traiter quand on s'amuse à faire des raccourcis du genre "et là, Bruce Wayne il rentre dans la ville impossible à pénétrer sans que personne ne le remarque, parce que... bah c'est Batman...".


D'autant qu'il faut pas s'imaginer qu'on puisse faire n'importe quoi avec la science... Quoi qu'on me souffle à l'oreillette que Boyle avait fait n'importe quoi avec la science mais un très grand film avec "Sunshine". Et la philo là dedans ? "Contact", "2001 : A space odyssey", "Solaris"... dès qu'on touche à l'espace on se retrouve avec des réflexions sur le temps, la filiation, la transmission, l'avenir et le passé. Bref, l'espace est un lieu vide de tout mais où on doit surtout y mettre ses pensées les plus intenses. Mais comme Nolan se nourrit de son propre génie, il ne cherche pas à raconter quelque chose de sensé mais à dramatiser la vie des ses protagonistes. Cette démarche le pousse à raconter n'importe quoi du moment que ça met de l'intensité à l'écran, de la puissance bouleversante, plus que du pathos, du lien. Et tout à coup, dans une osmose émotionnelle, les spectateurs ressentent la force de leur intelligence les lier dans une marée transcendantale, il en fait les témoins d'une narration absolue.


Mouais... Sauf que quand Hathaway dit en pleurant que l'amour peut lier les êtres à une galaxie d'écart, c'est Stephen Hawking qui doit se retourner dans sa tombe. Ah, on me dit dans mon oreillette que c'est impossible à deux égards... Peut être que Nolan n'aurait pas dû faire dire ce genre d’inepties, peut être que l'aventure que ces personnages vivent est beaucoup trop lente, peut être que les allers et retours sont inutiles et ressemblent plus à des voyages en TGV, peut être que l'exposition est racoleuse, peut être que le temps qui passe est un peu trop gros, peut être que ce couillon de Nolan essaie une fois de plus de nous montrer des choses qu'il s'agirait seulement de suggérer, peut être que comme d'habitude certains artifices sont débiles dans une construction narrative, peut être que façonner les personnages à l'image de ce qu'on veut leur faire dire les décrédibilise en tant qu'êtres humains, à croire que les robots sont plus humains que les humains eux-mêmes...


L'écueil d'"Interstellar" reste le même que ce qu'on a à chaque fois dans les films du "génie qui a créé la trilogie Batman". Alors l'avantage, c'est que ceux qui aiment ce bon Christopher ne seront pas du tout déstabilisés et tout rentrera dans l'ordre à la fin des temps. D'un autre côté, on pourra y voir un film un peu chiant, qui crie au spectateur pas encore endormi son message du début à la fin avec la subtilité d'un discours de propagande Viet Cong. Sans doute se rappellera t on que la sensibilité d'un Andréi Tarkovsky parvenait sans artifice visuel à faire parler le silence des espaces infinis grâce à l'imagination et à l'intelligence du spectateur. Et même si ici le bruit de la tôle qui s'arrache sous la pression du trou noir ne nous empêche pas d'entendre l'appel d'une fille à son père, le silence de l'espace de Malick est sans doute beaucoup plus poétique et moins dramatique qu'une grosse vague qui déferle sur une navette à l'autre bout d'une galaxie tragique.

David_Toubiana
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le 2 nov. 2015

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