Dernier film de Christopher Nolan, « jeune » réalisateur qui se prend pas mal au sérieux et que les cinéphiles adorent détester en raison d’une soi-disant over-hype médiatique… Selon moi absolument justifiée (la plupart du temps, personne n’est parfait), Interstellar nous dresse le bilan très (très très) sombre de l’humanité.

Cooper, un ex pilote et ingénieur s’occupe d’une exploitation céréalière alors que la terre connait une crise alimentaire sans précédent.
Un jour, avec l’aide de sa jeune fille Murphy, il découvre l’existence d’un bâtiment secret de la NASA sensée avoir été dissoute de nombreuses années auparavant, alors que l’exploration spatiale avait été reléguée aux légendes urbaines de la guerre froide. Il apprend alors qu’une douzaine de missions d’explorations ont été envoyées au travers d’un trou de ver afin de chercher une planète ou l’humanité pourrait continuer son existence loin des problèmes de la Terre.

Si Nolan est un habitué des films au raisonnement tordus mettant sciences et fictions sur un pied plus ou moins égal (Le prestige, Inception…), jamais il ne sera aller aussi loin, en abordant cette fois, et de manière totalement ludique, pédagogique, et suffisamment vulgarisée pour rester dans le grand public, les mondes de l’aérospatiale, de l’astronomie et de la physique quantique, et hormis le nombre un peu trop important d’équations qui apparaissent à l’écran (côté un peu trop m’as-tu vu), le tout passe très bien pour qui accepte un minimum de s’intéresser au pitch. On se retrouve ainsi face à une profonde réflexion sur la relativité du temps par rapport aux sentiments, sur l’impact des décisions, ni bonne ni mauvaises, sur l’écologie et notre manière de consommer littéralement la Terre (sans jamais se vouloir moralisateur), mais aussi sur l’interprétation possible de la force gravitationnelle.

Fort de ses 2h49, le film prend le temps de poser son contexte et ses personnages, tout en restant très local. Ici point de reportage TV sur la famine mondial, ou de questionnement dans les hautes sphères, toutes les infos nous sont transmises au travers des dialogues fatiguées entre Cooper et son beau-père. Vient ensuite la découverte de la NASA, du trou de ver et du voyage, ou l’ampleur du film se décuple de manière exponentielle, comme si cette focale volontairement réduite de notre planète malade ne servait qu’à maximiser la vision grandiose et infinie de l’espace.
Si le dévut du film souffre de dialogues peu inspirés et assez sur-réaliste, la narration décolle en même temps que le rythme général lors de la découverte de la base de la NASA, et la suite se passe parfaitement.

Matthew McConaughey termine ici l’éclosion de sa carrière cinématographique débutée il y a un an via Le Loup de Wall Street, True Detective, et le Dallas Buyer Club.
Anne Hattaway qui risque maintenant de faire partie des cartes favorites de Nolan (ce dernier étant habitué à ne pas se disperser niveau acteurs), sors enfin de son rôle femme-enfant pour nous offrir une prestation digne de ce nom.
Michael Caine est exceptionnel et comme dans l’ensemble de ces derniers rôles, terriblement attachant.
Quand a Jessica Chastaing, elle sur-joue un peu trop à mon gout, tantôt trop « rebelle » tantôt trop « enthousiaste » tantôt trop pleine d’espoir…

Nolan nous gratifie d’une direction artistique aux petits oignons, ou la nature sauvage des mondes, l’aridité de la Terre, l’immensité silencieuse de l’espace et le métal froid et inexpressif des navettes contrastent fortement.
Il est cependant triste de noter que la qualité visuelle n’est pas au rendez-vous, avec des gros plans sur les visages ou le floue et les défauts de mises au point frisent le ridicule, et ne sont absolument pas justifiable par un quelconque but scénaristique ou artistique. En revanche d’autres séquences se montrent innovantes, avec notamment l’utilisation de caméras embarquées donnant droit à quelques scènes de surf géant faisant monter l’adrénaline dans la salle.

J’ai trouvé un petit air de Sunshine par forcément désagréable à cet œuvre de Nolan, et je visionnerai prochainement 2001 afin de me faire mon avis sur ce monolithe de la science-fiction spatiale.

Etant allé voir ce film sans avoir lu aucune critique et en ayant vu une seule bande annonce, je suis conquis et recommande fortement ce film de science-fiction qui sent bon l’anticipation pessimiste sur l’avenir de l’humanité, mais qui a le mérite de faire réfléchir sans passer par les habituelles grosses ficelles de la culpabilisation écologiste.
Grand_Bâton

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