Si la trame narrative de ce film est excellente, provenant Incendie œuvre dramaturgique de Wadji Mouawad, l'adaptions qu'en fait Villeneuve manque néanmoins d'originalité et réduit, aux mêmes schémas connus de tous (explosions, attentats, atteintes aux droits des femmes) les situations de conflits au Moyen-Orient. (À noter que le texte de Mouawad ne précisait pas de lieux pour l'action, seul les patronymes nous permettaient qu'il s'agissait de pays arabes et l'origine de l'auteur nous permettait d'associer les évènements à la guerre du Liban 1975-1990). Mais le véritable problème avec Villeneuve c'est l'éthique de la représentation. Alors que « Polytechnique » avait été une véritable catastrophe à ce plan, Villeneuve est ici sauvé par le côté fictionnel des évènements. Néanmoins, celui-ci traite de sujets universelles (la violence faite aux femmes) et actuels (les conflits au Moyen-Orient). L'esthétisation constante de ses plans qui les font ressembler à de vulgaires publicités rend non seulement "jolie" la tragédie œdipienne, mais rend aussi "jolie" la violence faite aux femmes. On ne peut oublier ce plan en plongé des pieds de Nawal, où la composition minimaliste des pieds à gauche de l'écran vient prendre plus d'importance que les souffrances de la femme-chanteuse. Si cette esthétique cause ici problème vu les thèmes abordés, Villeneuve est au moins sauvé par l'excellence de la pièce de Mouawad, même s'il trouve tout de même moyen de l'abimer au passage, par des plans parfois trop bref, qui coupe court l'émotion des personnages (surtout quand Jeanne comprends qui est son véritable père) et les modifications des lettres finales qui sont largement moins touchantes que dans le texte, peut-être seulement sous-prétexte qu'elles étaient un peu trop longues, que ça pourrait endormir les gens... Mais oui Villeneuve, par son esthétisation de style publicitaire, endort véritablement le spectateur qui est devant du déjà vu, déjà vu qui fait écran à la véritable souffrance des personnages de Mouawad et aussi aux véritables souffrances d'une partie du globle...
