Fatih Akin n’étant pas John Flynn (le méconnu Rolling Thunder) ni Diane Kruger le grand Charles Bronson (la mythique saga des Justicier dans la ville) il n’était pas difficile de se douter que In the fade ne serait pas un vigilante movies méchamment badass à base de héros prompt à titiller les cojones de macho virile fan de démasticage de bad guys à coup de lance-roquettes en pleine poire (que de doux souvenir). Prenons donc le film pour ce qu’il est : un bon gros drama des familles tendance auteuriste avec réflexion intellectualisé de son sujet. C’est sur, dis comme ça les gros bras vont fuir à toute enjambée ce qui serait un tort car parfois avoir un regard différent cela a du bon.


Construit en 3 partie chapitré, In the fade se veut avant tout une étude de caractère d’une femme meurtrie par la mort de son mari et de son jeune fils lors d’un attentat orchestré par des néo-nazis. Le premier chapitre se focalisant avec une justesse rare sur le deuil que subit cette femme avec tout ce que cela représente (l’annonce à la famille, le choix des cercueils, le soutien des proches, l’envie d’être seul…) il est difficile dès lors que l’on soit passé par là, de ne pas être ému d’autant plus que la prestation convaincante de Diane Kruger et la mise en scène discrète qui ne verse jamais dans la pathos à outrance participent à l’identification envers le spectateur qui ressent la détresse de celle qui restera longtemps comme l’un des plus beaux personnage féminin du vigilante.


Passage obligé qui d’habitude est très vite expédié pour se concentrer sur les enjeux principaux de ce type de récit : le procès, qui occupe le deuxième chapitre, est sans doute ce qu'il y a de plus faible dans le film vu que l’issue de celui-ci est plus que prévisible si la vengeance promise dans le scenario veut avoir lieu. Mais n’oublions pas dans quel genre de film on est. Traduction. Le procès n’est pas là pour créer du suspense ou pour contextualiser bêtement ce qui suivra mais pour comprendre le cheminement psychologique de l’héroïne ainsi que donner des informations sur les bourreaux qui serviront lors du 3ème acte. D’un point de vue intellectuel ses passages nous donnent les clefs pour des débats enflammés sur les limites de la justice, la radicalisation et les erreurs de chacun en apparence anodines mais qui ont toutes des répercussions. D’un point de vue émotionnel le regard de Diane Kruger lors de la description de l’autopsie de son enfant, la cruauté dont fait preuve l’avocat de la partie adverse et bien évidemment le verdict final où en ressort toute la frustration d’une épouse, d’une mère qui faisait confiance au système suffit à comprendre la légitimité du œil pour œil dent pour dent qu’elle s’octroie et qui fait basculer le film dans le vigilante pur et dur. Enfin c’est vite dit.


Car comme mentionné plus haut Diane Kruger, aussi métamorphosée soit-elle n’est pas Bronson et sa vengeance ne se fera pas de manière bourrine et surtout sans quelques doutes sur le bienfondé de son action. Ce qui amène à son tour le spectateur à se demander si le film va se terminer façon je me débine pour une fin bienpensante à base de « la vengeance c’est mal » ou si, même dans ses derniers instants, on aura le droit à un final satisfaisant pour les amateurs du genre. Sans spoiler disons que la fin parait logique au vu des tourments intérieurs de l’héroïne le tout avec une pointe d’ironie salvatrice. Moins fun et violent que d’habitude In the fade est un vigilante somme toute plus humain qui opte pour une approche plus réaliste. Cela ne plaira pas à tout le monde c’est sûr mais ça a au moins le mérite d’offrir une alternative loin d’être inintéressante. Diane ou Charles à chacun maintenant de choisir son camp.

VictorTomadini
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le 29 avr. 2018

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