"Il reste encore demain" étonne par ses paris formels, aussi riches que référencés. Empruntant un peu à la comédie italienne des années 60, autant par son élégante photographie en noir et blanc que par le ton de ses séquences presque vaudevillesques, Paola Cortellesi insuffle aussi beaucoup de modernité dans son film.
Non seulement ses cadres et ses mouvements de caméra viennent casser une tendance qui pourrait être trop théâtrale, mais des morceaux de musique actuelle viennent relever l’ensemble de façon intéressante.
Paola Cortellesi veut faire un film tout public et se retrouve à ménager constamment une violence qu'elle ne filme jamais. Si son principe, c'est de faire venir les jeunes spectateurs pour être sensibilisés à la cause, oui, mais à un moment, transformer la violence maritale en scène de tango, une, deux, trois fois, sans jamais aucune évolution et aucun contrepoint, c'est un peu gênant. Sans compter les personnages secondaires qui sont embarrassants de stéréotypes. C'est un sujet qu'il faut traiter, mais de manière plus actuelle, pas forcément de cette manière-là...
Le film est pourtant souvent drôle, la réalisatrice n’hésite pas à brasser les sujets lourds et gigantesques avec un ton qui fait mouche.
Jamais moralisateur, mais toujours politique, le bijou de Cortellesi enfonce les clous, mais avec le sourire. S’il dépeint le machisme ambiant d'après-guerre, c’est pour mieux parler d’espoir.
Parce qu’au-delà de ses effets de style parfois discutables, le film décrit plutôt avec précision et justesse des relations humaines particulièrement crédibles, auxquelles il est facile de s’identifier. On pense notamment aux séquences qui réunissent Delia et sa fille : entre mépris de la part de cette dernière et amour inconditionnel de la part de la première, les deux femmes vont se soutenir et s’influencer plus qu’elles ne le pensent face à la loi des hommes. Sans niaiserie et sans dialogues fabriqués, leurs personnages représentent avec sensibilité deux âges (l’un bouillonnant et l’autre désabusé) de la femme qui doit se battre pour un avenir meilleur.
Car là est bien la question : même si "Il reste encore demain" se donne de faux airs de comédie romantique par moments, c’est bien un encouragement à l’action politique qui est finalement porté par le film. En déjouant les attentes du spectateur (qui pense que, malgré des épanchements de sororité, le salut viendra d’un homme), le dénouement du film délivre un message beaucoup plus réaliste et émancipateur que ça. Paola Cortellesi a savamment pensé les tenants et les aboutissants de son histoire jusqu'à la fin !