Hope
7.9
Hope

Film de Lee Joon-Ik (2013)

la passion selon mel gibson m'avait au moins fait rire

J'ai eu vent de ce film dans une critique qui le mentionnait en passant pour en dire un grand bien. Internet permet d'accéder à un large pan de la cinématographie coréenne qui n'est pas distribué dans les salles françaises.
Rien n'est épargné au spectateur qui accepte de s'identifier aux personnages centraux de ce film, des pauvres qui devront surmonter leur connerie naturelle pour traverser avec leur fille le chemin de croix que le scénario lui impose.
Les personnages idiots sont un « tropisme » du cinéma coréen, qui permet de faire aller l'intrigue dans des voies absurdes que n'oserait pas emprunter un film occidental.
99% du cinéma mondial essaie d'impliquer le spectateur, qui accepte d'être manipulé afin de ressentir des émotions réelles devant une fiction. La même part de cinéma est commercial, ce qui fait qu'il se range dans la catégorie dite du cinéma « d'exploitation » - des passions humaines pour faire du fric. On paie pour avoir peur, rire, pleurer.
Alors quand il s'agit d'être exposés aux malheurs d'une enfant, rien de plus facile que de se laisser émouvoir. D'autant que (presque) rien n'est laissé à l'imagination. On a droit à une vraie enfant, qui porte de convaincants maquillages sur lesquels la caméra s'attarde longuement. D'ailleurs, ce film a beau être un drame, la violence à laquelle il nous expose est typique du cinéma commercial coréen - dans un pays qui marie à l'extrême les travers de la société marchande et de la soumission à la tradition, où les individus se pensent évidemment comme des marchandises, la question ne se posant pas. L'exploitation fait partie de leur vie, les enfants sont élevés comme des soldats récompensés de leurs bons services dans le système scolaire par une opération de chirurgie esthétique, offerte par des parents qui veulent leur donner toutes les clés de la réussite. À l'âge de la retraite, les vieux partent vivre dans des bidonvilles. Y'a pas de retraite ; si t'es plus productif, t'es un déchet.


J'ai lâché ce film à la fin de la scène où les parents fuient les paparazzi dans l'hôpital, et où le père trimballe sa fille de manière à provoquer une hémorragie, puis entreprend de la nettoyer frénétiquement. Dans la vraie vie, les gens se comportent souvent comme des imbéciles, certes. Mais ici, on a l'illustration de l'exploitation de cette bêtise à des fins dramatiques, le récit empruntant une voie improbable afin de nous tirer encore plus de larmes, devant le spectacle de la torture d'une enfant. Car il joue sur tous les moyens nécessaires pour bel et bien nous confronter à ceci, et la débilité du père n'est qu'une excuse, un truc scénaristique pour nous exposer à un maximum de violence en toute bonne conscience, en adhérant aux émotions qu'elle nous fait éprouver. Un peu comme Chuck Norris a bien raison de tuer tous ces foutus terroristes pour venger sa patrie. Oui mais justement Chuck nous sert une propagande patriotique. Quid de ce film? Disons que s'il passait sur une grande chaîne de télé la veille d'un référendum sur la peine de mort, il faudrait s'inquiéter.


J'ai donc survolé les scènes suivantes, qui nous exposent le comportement irrationnel de la mère (d'abord on la bafferait, ensuite son personnage évolue pour devenir une bonne mère, voyez le topo) et les efforts du père pour aider sa fille à remonter la pente malgré un budget limité (alala, on leur épargne rien), et le déshonneur familial si on apprend l'identité de la victime, et les méchants paparazzi, etc. Oui c'est vraiment très très con, mais il faut bien faire durer ça pendant deux heures.


J'ai regardé la brève scène de tribunal. La fillette doit témoigner en public devant son agresseur, après avoir raconté son calvaire et l'avoir identifié déjà auparavant. Oui, il faut une gradation dramatique, sinon on s'emmerde. Et le criminel présumé répète le discours d'une flagrante hypocrisie qu'il a déjà tenu au père dans l'intimité d'un parloir de prison quelques scènes plus tôt. Oui, quand on a un bon moyen de torture morale du spectateur par personnages interposés, pourquoi se priver de l'utiliser deux fois ?
Mais vous savez quoi ? Le juge lui trouve des circonstances atténuantes parce qu'il avait bu un coup de trop ce jour-là, et il n'écopera pas d'une peine démesurée. Olala, mais quand ces pauvres gens finiront-ils de souffrir ?
Mais lorsque la peine de mort sera restaurée, ma bonne dame !

ChatonMarmot
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le 18 avr. 2017

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ChatonMarmot

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