Blackhat s'inscrit dans la plus pure tradition des films de Michael Mann. On y retrouve les thèmes, les plans, les personnages, les atmosphères de Thief, Heat, Miami Vice, et des autres.


Toujours ce héros hyper professionnel, en quête de liberté, pressé par le temps, à la virilité électrique, et des femmes fortes, quoique souvent secondaires, ici le personnage de Wei Tang, qui rappellera celui de Gong Li dans Miami Vice. L'actrice, superstar en Chine, est saisissante dans son jeu, comme Viola Davis dans le rôle d'une agent du FBI.
Chris Hemsworth, lui, semble une copie de Colin Farrell dans Miami Vice. En plus costaud. On peut être sceptique quant au choix de cet acteur pour jouer un geek de l'informatique, mais on est surpris de voir (si l'on se penche sur les making of) à quel point le choix est réfléchi et justifié par la définition en amont du personnage. Des éléments que nous ne connaîtrons pas forcément en voyant le film, mais que l'acteur et le réalisateur auront travaillé en profondeur. Et qui font que cet acteur, dans ce rôle, passe parfaitement bien.
Mais surtout, ce qui intéresse Michael Mann, c'est l'aura que dégagent les personnages. Et leur rapport à la liberté. Colin Farrell seul devant la mer, De Niro seul face au pacifique, James Caan seul face au lac Michigan, et ici, Chris Hemsworth seul sur le tarmac de l'aéroport.


Du premier au troisième rôle, tous les personnages semblent exister, avoir leur propre vie, leur propre vision des choses. Ils ne sont pas juste des fonctions. Val Kilmer dans Heat en est un bel exemple. Ici, Mann donne plus d'épaisseur, en quelques scènes et deux-trois répliques, à Holt McCallany qu'aucun autre réalisateur, alors que le type a toujours été cantonné à des rôles de brute de seconde zone. C'est juste un détail, mais c'est ce que l'on adore chez Mann, son souci du détail, de l'hyperréel romancé.


Pareil pour les bad guys. Comme dans Miami Vice, ils ont leur propre but, leur propre vie, leur propre organisation, leurs liens particuliers les uns avec les autres. Il y a de quoi être fasciné quand on voit le regard de John Ortiz sur les caméras de surveillance ou sur Gong Li dans Miami Vice, et ici, les doutes, la volonté ou la dureté de Ritchie Coster (Kassar).


Qu'en est-il du scénario ?
Un scénario typique de Michael Mann... se souvient-on de ce que volent les hommes de De Niro dans Heat ? Se souvient-on de ce que veut faire Luis Tosar, le "méchant" de Miami Vice ? Non... ou vaguement... Un peu pareil dans Hacker. Pourquoi fait-il cela ? On met du temps à comprendre, et on pourrait très bien l'oublier en sortant de la salle. Mais chez Michael Mann, les scénarios sont prétextes au développement des personnages et à leur confrontation au destin.


Un destin qui explose souvent lors de fusillades mémorables. Il poursuit ici dans la lignée de ses morceaux de bravoure, avec des effets sonores et des images de mort qui nous hantent bien après le générique de fin.


On pourrait sans doute revenir sur chaque plan ou chaque expression de visage, sur le choix de la musique dans telle ou telle scène (de nombreux morceaux de Ryan Amon repris d'Elysium)... car chaque plan d'un film de Michael Mann n'est trouvable nulle part ailleurs. Beaucoup tentent de le copier (Christopher Nolan, les frères Russo), mais on reconnaît un film de Mann au premier coup d’œil. Il peut perdre le spectateur, le laisser insensible, mais ce qu'il fait est du travail d'orfèvre.

ycatlow
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le 21 janv. 2016

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ycatlow

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