Vanitas vanitatum omnia vanitas

En entrant en école d'ingé, il y a 3 ans, je voulais bosser dans l'aérospatiale pour fabriquer des navettes tout ça parce que "L'espace, c'est cool". En même temps, mon film préféré c'est 2001 et c'est pas pour rien.

Mais peu à peu, je me suis quand même dis que faire des films c'est vraiment encore plus cool. Non parce que participer à la création d'objets qui vont dans l'espace, ça demande plein de boulot, plein de gens qui bossent chacun sur un élément précis sans en voir vraiment la finalité et c'est pas ça qui m'intéresse. Au contraire. Et en plus, c'est quand même mieux de filmer des gens qui font ça, non !

Et là, "Gravity happens".

Le space-loon en moi surkiffe (en même temps, IMAX 3D à Londres, ça en jette) : les détails scientifiques sont plutôt bien respectés et ça fait plaisir.

Le cinéaste en moi adore les plans séquences qui n'en finissent plus, l'intégration ultra propre des éléments en live action parmi tous les CGI, toute la technique cachée qui doit être monstrueuse d'ingéniosité.

Et pourtant, même si je ne peux pas dire m'être emmerdé une seconde pendant le film, je n'ai pas eu un seul moment l'impression de regarder un film, encore moins de m'y intéresser. Un peu comme quand on attend la fin d'une super mais très longue cinématique de jeux vidéo pour enfin pouvoir passer à la phase qui nous intéresse : le gameplay. Le tout avec, en voix off guest star, Ed Harris qui reprend son rôle d'Apollo 13.

Tout cela, faute à un scénario (comprendre "événements + personnages + dialogues") dont le but est uniquement de présenter des visuels certes méga recherchés mais totalement vains par eux-mêmes. Le syndrome Avatar, en somme : des personnages caricaturaux aux répliques bidons et servis par des acteurs qui jouent mal (en même temps, avec un plateau constitué principalement de fonds bleus, ça doit pas être simple d'entrer dans la scène : "Alors, là, tu flottes dans l'espace et l'ISS explose derrière toi. Go !"). Au final, on ne s'attache pas du tout à eux et qu'ils s'en sortent ou non, clairement, on s'en fiche un peu tant que ce qu'ils font reste visuellement classe.

De plus, l'idée de raconter une histoire se déroulant en temps réel, c'est bien, mais alors il faut que le développement des personnages suive et en prenne compte. C'est pas en une heure que l'on peut vaincre ses troubles psychologiques dus à la perte de sa gamine ; encore moins quand on est perdu dans l'espace. Et d'ailleurs, d'où la NASA autoriserait un tel candidat à partir ?! D'où un astronaute aurait le droit de juste faire du jetpack dans l'espace en attendant que ses potes finissent leur boulot ?!

Des questions comme ça, on s'en pose plein pendant le film et c'est à ce demander comment on peut ne pas s'être dit que ça gâcherait tout le travail de reconstitution scientifique qu'il y a derrière tellement ils sont présents.

Ajouter à cela une énorme contradiction auditive : au début du film, les 3 phrases en mode "Vas-y, je te résume 2001" nous rappellent que dans l'espace, le son ne se propage pas. Ainsi, lors de la première scène, tous les sons entendus sont ceux ressentis par les personnages. Tous, si ce n'est cette musique horrible qui débute juste avant la catastrophe et qui ne fera que prendre de l'ampleur dans la suite du film, jusqu'à devenir complètement aberrante. Cela m'a totalement coupé du film, et supprimé toute la tension et le gène qu'il aurait pu (ou du) créer.

Gravity, c'est donc un film à voir au cinéma sur le plus grand écran possible (parce que, sérieux, je vois zéro intérêt à le voir sur sa télé), sans trop se poser de question. Limite, en se bouchant les oreilles aussi, ce qui pourrait rajouter quelque chose potentiellement dingue. En mode "l'espace", quoi. Il n'en demeure pas moins une expérience à vivre mais je ne pense pas qu'il passe le test du temps du fait de son manque flagrant d'intérêt scénaristique.
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le 19 nov. 2013

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