C'est moins mauvais que ce que j'aurais imaginé d'Ozon. Au moins, le film n'est pas comme je le craignais une oeuvre à charge grossière, au sujet d'une affaire qui rappelons-le était encore en cours d'instruction, mise en scène par un réalisateur qui règle ses comptes avec l'Eglise.
Nulle question de remettre en cause l'intérêt de mettre en images ce scandale afin de faire réaliser l'horreur absolue de la pédophilie, la pire des violences infligée aux plus fragiles, de surcroît par l'abus d'autorité d'un prêtre. C'est bien sûr la médiatisation de ce scandale puis des suivants qui a obligé l'Eglise à se saisir enfin activement du problème de la pédophilie en son sein, et par ricochet de dénoncer ce que le pape François a nommé le cléricalisme - qui n'est pas que cela évidemment, mais la concomitance des dénonciations n'est pas un hasard. Tout cela est mille fois heureux, et on ne peut que rendre hommage à l'immense courage des victimes qui ont osé briser le silence.
Ceci dit, il ne faut confondre le sujet de l'oeuvre et la qualité de l'oeuvre elle-même : en l'occurrence, j'aurais sans doute donné une meilleure note au film s'il avait assumé son genre de docufiction télévisuel. Car par la pauvreté de la mise en scène, c'est au mieux ce qu'il est. Le film n'aurait pas volé sa place entre quelques épisodes de téléfilms du type "Meurtres à ..." .
Une fois de plus, François Ozon - que j'ai toujours considéré comme un mauvais réalisateur - , s'attaque à un sujet glauque et révoltant, et lance son surf sur la vague de l'indignation.
Je ne peux que m'amuser des titres de critiques "Ozon brise le silence", "Ozon s'attaque à un tabou". Comment peut-on trouver une quelconque audace à réaliser un film sur le scandale le plus unanime et médiatisé de l'année ? Ozon s'indigne, on s'indigne avec lui, c'est tout. Pour le reste, le film est mis en scène sans talent ni positionnement particulier. Il relate une succession d’événements, exhibe des souffrances, mais n'a rien à dire de plus. Une sorte de "Polisse" bis.
Mes bons points vont à la prestation de certains acteurs : Bernard Verley dans le rôle difficile du père Preynat est excellent, et surtout Swann Arlaud qui est décidément l'un des meilleurs acteurs de sa génération. Fait rare, j'ai même trouvé que son jeu d'acteur surlignait parfois la faiblesse des autres interprètes.
Je ne connais pas toute la filmographie d'Ozon, mais je serais vraiment ravi qu'on me présente enfin un de ses films qui relève d'autre chose qu'un téléfilm qui traite de perversité ou récupère l'indignation générale. Le sujet traité, en l'occurrence, mérite bien plus.