Golgo 13 Queen Bee
6.3
Golgo 13 Queen Bee

Long-métrage d'animation de Osamu Dezaki (Matsudo Kan) (1998)

Golgo 13, du gros calibre pour une histoire venimeuse

Dans les séries au long cours, One Piece a fêté la sortie de son centième tome il y a quelques temps, et c’est impressionnant, mais la saga de Luffy est encore loin de rivaliser avec le haut du podium, occupé par Golgo 13, au style bien différent des loufoqueries pirates du Chapeau de paille.

La série suit les agissements d’un tueur d’élite, engagé pour des contrats qui nécessitent le meilleur dans ce domaine. Golgo 13 est un tueur taciturne, une machine à tuer inflexible mais qui possède malgré tout certaines règles qui régissent sa conduite. Il est conseillé de les respecter.

Publié depuis octobre 1968, la série crée par Takao Saitõ a maintenant dépassé les 200 tomes reliés, une performance sans grands rivaux au Japon, ni ailleurs. Se lancer dans l’adaptation en France d’une telle somme est quasiment impossible. Mais Glénat en 2006 a tout de même proposé deux recueils des meilleures histoires, deux tomes de plus de 1000 pages chacun, de beaux bébés.

Et même si la série est méconnue chez nous, elle a tout de même une importance dans l’histoire du manga en France. En effet, le titre fut l’une des premières séries de manga publiées au pays d’Astérix, dans l’éphémère revue du Cri qui tue (1978-1981, 6 numéros).

Golgo 13 fait donc partie de ces œuvres mythiques du paysage éditorial japonais mais mal connu de notre côté du globe. Mais comme pour Lupin III l’oeuvre sur papier a connu suffisamment de déclinaisons sur d’autres supports pour découvrir le personnage grâce à des adaptations plus faciles à aborder.

Après deux adaptations dans les années 1970 avec des acteurs, dont le mythique Sonny Chiba, la série connaît sa première déclinaison animée en 1983, éditée en VHS par chez nous, avant un nouveau film en 1998, Queen Bee. Tous les deux sont réalisés par Osamu Desaki, qui a travaillé sur les licences Rémi sans famille, Cobra ou Lupin III, et qui est un des fondateurs du célèbre studio Madhouse.

Les œuvres autour de Golgo 13 sont généralement sombres, et celle-ci ne fait pas exception. Le pouvoir de l’amitié ne gagnera à la fin. Golgo 13 est un tueur froid et solitaire mais qui ne peut exister sans un contexte et des personnages plongés dans la mélasse.

Il accepte ainsi le contrat sur la tête de Queen Bee, beauté fatale rousse, meneuse d’une troupe de révolutionnaires et impliquée dans des affaires de drogue. Elle semble en vouloir à Robert Hardy, un homme politique en campagne pour le poste de la présidence des États-Unis. Pour le protéger de cette menace, son conseiller a décidé de contacter Golgo 13.

Le spectateur en saura bien plus que lui, découvrant progressivement les nuances autour des deux camps, révélant qu’il n’y a ni démons ni anges dans ce bourbier politique. En dehors du bras droit du candidat, véreux évident, l’animé va brosser les traits de Robert Hardy et de Queen Bee bien plus complexes que prévu, révélant les plaies et les blessures de l’un et l’autre.

Le personnage de Queen Bee, au centre, est d’ailleurs une belle incarnation d’un personnage féminin, pas seulement pour sa beauté physique et sa sensualité, mais bien pour sa personnalité. Son corps est une arme pour arriver à ses fins mais aussi pour honorer ses compagnons de rébellion, vivant le sexe mais aussi la maternité comme une autre facette de ses capacités. L’animé est d’ailleurs assez explicite sur les relations sexuelles des personnages avec Queen Bee, même si au Japon on ne montre rien directement. Queen Bee est ainsi une incarnation brûlante, dans son corps ou ses intentions, déterminée et intelligente mais aussi aimante, dont il est difficile de ne pas ressentir pour elle une certaine fascination.

Mais Golgo 13 a accepté le contrat. Et il va toujours au bout de ses engagements.

Si les deux tueurs vont parfois se rapprocher, l’objectif reste le même, assassiner Queen Bee. Elle ne sera parfois sauvée que grâce à des coups de sort bien commode pour que le métrage ne s’interrompe pas prématurément. Le film ne manque pas d’action, et si Golgo 13 va encaisser quelques coups, il les rendra. Gare à qui se mettrait sur son chemin.

Le film durant moins d’1h, pour le marché de la vidéo, il avance régulièrement un peu trop vite pour bien laisser s’installer son univers. Son passage en Amérique latine déçoit un peu, car s’il enrichit l’histoire de Queen Bee, il semble gagner du temps. Dans la peinture de ses personnages, le film a parfois la main lourde sur l’exagération, enchérissant sur une certaine forme de tragique qui fonctionne malgré tout, mais dont on perçoit quelques limites. Le spectateur doit être ému, car si Golgo 13 peut l’être en tout cas il ne le montrera pas.

Le film est produit pour le marché de la vidéo, mais il démontre tout de même une certaine ambition dans le traitement, même si là encore Golgo 13 : Queen Bee ne fait parfois pas dans la mesure. Il possède déjà pour lui un character design réussi, massif quand il n’est pas sensuel, à l’image de ces deux antagonistes, que l’OAV (original animation video) arrive toujours à mettre en valeur. Il y a un véritable sens de la mise en scène qui compose cette ambiance un peu lourde, d’une histoire dont on pressent qu’elle ne connaître pas de happy end.

Le métrage prend toutefois le pari d’appliquer sur son image un certain nombre d’effets, afin de donner plus de matière à cette atmosphère et à cette pellicule. L’image est ainsi plombé dans une certaine nappe de noir, assez réussie, qui apporte un filtre sombre et brouillardeux, dont ressortent les personnages ou les éléments du décor choisis, sans inutilement alourdir les plans. D’autres techniques sont utilisées pour cacher une animation après tout correcte et donner un peu plus d’intensité à cette pellicule, dont des illustrations pour accentuer certaines scènes fortes, comme des cliffhangers passagers, des ralentis, des tremblements ou des angles multiples dans une même scène.

Osamu Desaki semble ainsi s’amuser avec les possibilités offertes, pour offrir à Golgo 13 un écrin à sa juste valeur, accentuant ses scènes les plus importantes, usant d’effets pour produire cette atmosphère si spéciale. Le film tourne parfois à vide, semblant avoir du mal à durer sur sa durée, s’abaissant à quelques caricatures, mais il offre un duel assez saisissant entre deux figures bien différentes, Golgo 13 et Queen Bee, dont la curiosité est toujours maintenue pour découvrir son issue.

SimplySmackkk
6
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le 5 avr. 2024

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