/SPOILERS/


Le voilà enfin. Le monstre le plus célèbre de l'Histoire du cinéma fait son grand retour après dix ans d'absence, plus rugissant, crachant et piétinant que jamais. Pour son second film, Gareth Edwards, jeune abonné au genre depuis le remarquable Monsters sorti quatre ans plus tôt, se retrouve aux commandes d'un blockbuster censément dantesque, qui se targue de surcroît d'une promotion alléchante au travers de belles d'affiches vintages et de trailers apocalyptiques. Au passage, vu l'insistance avec laquelle ces trailers ont été diffusés et rediffusés (en plus du rugissement emblématique présent à la fin de chacun d'eux), on avait l'impression de connaître déjà le film par cœur avant l'heure.


Parlons-en maintenant, du film...


Dans un premier temps, cela commence très bien: le générique réintroduit le mythe par le biais d'images d'archives datant de la guerre froide et montrant comment les soi-disant essais nucléaires dans le Pacifique... n'en étaient en fait pas. L'incrustation de l'épine dorsale de notre monstre préféré sur de vieilles images d'époque fonctionne très bien, et le message est très clair: Godzilla est toujours au départ considéré comme étant une menace.


La suite est tout aussi plaisante: Edwards fait un clin d'oeil à Spielberg le temps d'une sympathique séquence (de l'hélicoptère survolant une jungle montagneuse aux cavernes emplies de fossiles, en passant par le gigantesque terrain de fouilles grouillant d'ouvriers, tout y est) tandis que Bryan "Walter White" Cranston et sa famille sont victimes d'une tragédie causée par une catastrophe qui fait évidemment écho à celle de Fukushima.


L'histoire se perd un peu par la suite entre problèmes familiaux, secrets d'états scientifiques, leçons de morale historiques et apparitions de monstres géants au-design-farfelu-qui-cassent-tout-sur-leur-passage. Edwards perd un peu le public en accélérant l'avancement de l'intrigue, favorisant les ellipses scénaristiques, raccourcissant les scènes catastrophes et épurant celles où devraient s'installer la peur et l'angoisse (qui avaient pourtant fait le succès de Monsters). L'émotion, de même que le mystère qui entoure la créature disparaissent en même temps que le personnage de Cranston (c'est à dire beaucoup trop tôt), et le peu d'attachement que l'on éprouve pour son fils (Aaron Taylor-Johnson) et sa petite famille se ressent, tant ce dernier semble peu impressionné de voir Hawaï, Las Vegas et enfin San Francisco se transformer en terrains de jeux pour Kaijus.


Par ailleurs, le nouveau Godzilla est également assez discutable ; déjà, son entrée en scène (quoique impressionnante) ne parvient pas à faire oublier la mémorable scène de pêche dans la version de 1998. Ensuite, côté relooking, cette version moins reptilienne et clairement plus proche de celle de 1954 part certes d'un bon sentiment, mais encore une fois décrédibilise le mythe du prédateur qui fut dans un premier temps incontrôlable avant de se ranger du côté des humains. La scène où le monstre échange un bref regard avec le héros le montre d'ailleurs bien: ce Godzilla se montre beaucoup trop bienveillant avec ceux qui ont autrefois tenté de l'exterminer, et qu'il peut à tout moment écrabouiller comme des mouches. Autre chose, son "petit" problème de surpoids qui aura quand même été jusqu'à enflammer la toile (ironiquement, là où son cousin de 98 traversait le Brooklyn Bridge sans problèmes - ou presque - celui-là n'arrive même plus passer sous le Golden Gate...).


[Petite parenthèse : certains ne manqueront pas non plus de constater, tel une verrue au milieu du nez, le sempiternel mépris Américain à l'égard des Français (déjà désignés comme responsables de la catastrophe dans la version d'Emmerich) ; lors de la séquence où l'un des monstres shooté aux bombes A dévaste Las Vegas, celui-ci en profite pour faire s'effondrer une réplique de la Tour Eiffel. Destruction parfaitement gratuite et inutile, sans compter qu'on se demande bien où est donc passée la Statue de la Liberté à la joue écorchée que l'on apercevait dans les trailers. Fin de la parenthèse.]


La fin remonte heureusement un peu le niveau: la séquence du saut HALO effectuée au dessus d'un San Francisco transformé en véritable champ de bataille (cette vision d'un ciel apocalyptique !) où des monstres titanesques s'affrontent sans merci est de loin la plus réussie du film. C'est également l'occasion de voir enfin Godzilla cracher son emblématique feu nucléaire et mettre la pâtée à deux gigantesques chauves-souris radioactives. L'ultime séquence quant à elle, montrant le colossal lézard proclamé "Roi des Monstres" par la presse et regagnant l'océan sous les acclamations de la foule, se présente comme un bel hommage à la franchise originale et ne manquera pas de faire sourire le pubic.


Au final, s'il souffre d'un manque de développement palpable, d'un montage trop elliptique et d'une comparaison évidente à Pacific Rim, ce Godzilla mouture 2014 est un assez bon film avec du mérite, et pas seulement celui de divertir. Gareth Edwards peut se vanter d'avoir donné un second souffle à la franchise tout en y restant fidèle, et l'esthétique admirablement soigné de son film (une rareté dans la lignée de ce genre) apporte également un plaisir tout particulier au visionnage, ce qui mérite d'être encouragé.


C'est pour cette raison que je lui met 7...

reastweent
7
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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les meilleurs films avec Ken Watanabe et Les meilleurs films de 2014

Créée

le 19 mai 2014

Modifiée

le 19 mai 2014

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reastweent

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