Rarement un film n'aura aussi bien porté son nom !
Géant est géant, tout simplement, sur son ambition, son budget, sa durée et renvoi à la démesure de l'âge d'or Hollywoodien, une démesure fascinante et permettant ce type de longues et dantesques fresques.


Géant, c'est la petite histoire dans la grande, celle d'une famille de propriétaire entre le XIXème et le XXème siècle qui va basculer quand l'or noir, le pétrole, prendra place dans le Texas, et donc l'histoire des USA où George Stevens aborde, de près ou de loin, la guerre et le grand remplacement des peuples indigènes et mexicains sur les terres texanes ici.
Bref, un gros programme en somme !


Au final on pourrait faire des reproches à Géant, sa psychologie parfois simpliste, le ton moraliste à contextualiser (mais même, l'art, tout époque confondu, doit faire preuve de finesse) même si la critique d'un Texas (et des USA) où règne l'entre-soi et le rejet de la différence reste pertinente.
Et pourtant, ça apparaît ici secondaire.
Ce qui frappe, c'est le souffle qui traverse le film, son atmosphère, l'idée d'un temps qui passe, qui change, au contraire des hommes, de l'adaptabilité face aux évènements et l'idée, quasi éternel depuis que l'Homme existe, d'une dimension et filiation du sang, du père qui construit pour son fils et ainsi de suite, au détriment de beaucoup de choses.


C'est là que Géant prend tout son sens, tout le long, on suit un Rock Hudson ambitieux, pour lui, un peu, mais beaucoup pour sa famille et l'idée d'une transmission future. Il baigne dans un conservatisme, il est propriétaire du ranch de son père, veut éduquer ses enfants comme son père le faisait, faire l'impasse sur le pétrole car il n'a connu que les terres arides et les bovins et ainsi de suite. Ses moments de désarrois iront surtout lorsque tout cela sera en danger.


En parallèle James Dean incarne la solitude, il n'a rien reçu de personne et n'aura personne à qui léguer. George Stevens oppose ses deux visions, et penche pour la famille, un socle sur lequel on peut toujours se rattacher et où chacun à sa place, même si, sur certains points, il se montre critique (Elizabeth Taylor ne souhait pas juste rester à "sa" place en est un bel exemple). Si ce n'est pas toujours subtil, bien que ce ne soit pas dérangeant, il montre aussi l'évolution au fil du temps et des rencontres, la bagarre finale est inimaginable lorsque l'on découvre le jeune Rock Hudson dans son élément.


Il maîtrise la fresque familiale, les comédiens, tous très bons, s'effacent derrière leur personnage, on ne voit plus eux mais des texans d'il y a cent ans, seul James Dean avec son style très actor's studio ne s'efface pas toujours derrière son personnage. Stevens montre plusieurs visions de l'échec, et comment les surmonter ou non, que ce soit professionnel ou familial.


C'est aussi un film de paysages, de décors et d'éléments historiques, à l'image des premières constructions pétrolières. Long, il n'est pas lent, il se passe beaucoup de choses, plus de 40 ans de vie sont montrés.


Un grand film, Géant l'est assurément, et dans toutes ses définitions, un type de film devenu rare et comme l'Hollywood de jadis savait en faire, où l'on voit la petite histoire dans la grande, ici celles des USA, des propriétaires, du pétrole et des laissés pour compte, et si ce n'est pas toujours traités avec la plus grande des finesses, ça en devient secondaire face à un tel souffle.

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le 10 juil. 2023

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Docteur_Jivago

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