On l'a connaît par cœur cette tronche. Une mâchoire cadenassée, épargnant les mots. Des balafres encore vives pour seules décorations. Un regard fébrile mais profond, prenant le relais pour raconter la guerre quand la parole reste coincée, prisonnière d'un monstre de métal.
La silhouette nous est également familière. Des épaules larges mais proches de la rupture, une démarche chancelante imposée par des pas toujours plus courts. Le sol se rapproche, inexorablement.
Mais il ne trompe personne ce GI. Hollywood nous l'envoie en éclaireur depuis des décennies. Il arpente l'Europe le fusil à la main, louvoyant entre les cratères de Normandie ou jouant un cache-cache mortel dans les épaisses forêts des Ardennes. Il est une illustre figure du cinéma, bombardée par forces films partout sur le globe avec une précision chirurgicale.
Fury en ce sens, ne trahit pas la légende du héros de guerre ricain. Si son moyen de locomotion est ici différent, sa condition demeure la même. Mais il vise encore bien notre GI, prolongeant sa portée par le canon du tank. Les scènes de combats sont impressionnantes. Un duel notamment : ou dans une prairie labourée par leurs chenilles frénétiques, deux chars d'assauts luttent à mort.
Un paquetage formaté et déjà-vu certes, mais Fury n'hésite pas à salir ses personnages. Trop souvent dans les films de guerre, on passe un coup de polish sur les scènes de bataille, comme sur les comportements des soldats. L'histoire du monde s'est faite aussi dans l'humiliation, la misère, la violence, et la libération des instincts les plus primaires de l'homme. Il est toujours opportun de le rappeler, même à Hollywood.
Une bonne surprise donc que ce Fury, sans pour autant révolutionner le genre. Le tank nous emmène pas forcément là ou l'attend. Le chemin est plus boueux, plus bosselé. Sous l'épais blindage, le visage du GI gigote toujours, son engagement sur pellicule n'est pas fini apparemment, il a encore des choses à dire.