Father's Day se pose comme le fils illégitime de Robert Rodriguez et David Cronenberg, version Z; il a toute la personnalité visuelle des films Grindhouse du mexicain (particulièrement Planète terreur) et montre un plaisir évident pour les transformations et les destructions du corps humain, cette propension au dégueulasse décomplexé trouvant son apothéose dans une conclusion lovecraftienne dont on reparlera.


Au départ, on croirait ne voir qu'un film z qui se cache derrière un hommage à ce cinéma déjanté et ultra violent, généreux tandis qu'il n'avait pas de moyens; l'on dirait qu'il est purement mercantile, et que son manque de talent se dissimule derrière son manque d'argent, le cinéma Grindhouse ressemblant, par bien des aspects, au pis-aller du found-footage.


Très mal filmé, avec des reliefs de mauvais dtv d'horreur, Father's Day nous plonge au début dans un certain malaise, celui de voir une énième daube sans nom estampillée film méta, et qui se qualifie comme bon film parce qu'il sait qu'il est un mauvais film. C'est après cette introduction catastrophique, et ce meurtre atrocement mal tourné, qu'il commence à déballer, petit à petit, son propos : plus intéressant que ce qu'il paraît être, Father's Day s'amuse finalement de son ultra-violence et, comme un certain Sam Raimi, aime à mêler l'horreur et l'humour, soit les sales productions Grindhouse avec le mauvais goût du culte Troma.


On se prend alors au jeu de cette vengeance tortueuse et ultra-violente, et le malaise auparavant venu de son manque de qualité se change en dégoût pour les crimes du psychopathe violeur, montrés frontalement et plutôt bien retranscris dans les maquillages et les prothèses, arborant un drôle de cynisme sanglant. Le ton décalé, les acteurs à la ramasse qui jouent (volontairement?) comme des pieds, ce méchant obèse représentant les clichés du surpoids au cinéma, dégoulinant de graisse autant que de sang, et cette fameuse religion créée pour le film, grotesque et macabre.


Évidemment, Father's Day est un métrage de mauvais goût; il vend du sang, des tripes, des pénis et des massacres en règle, le tout dans un délire christique surjoué et s'assumant au point de partir en enfer et de blasphémer sur le paradis (un passage jouissif d'humour noir mais regrettable par son manque d'habileté dans la satire), quand il ne décide pas de rouler sur des violeurs (cf la scène d'intro) ou de se conclure sur un magnifique plan d'un grotesque génial, parfaite conclusion d'un film qui, décidément, s'est assumé au point de s'empêcher d'avoir une possible suite, qu'on n'aurait pas forcément renié.


Un climax fascinant, qui mêle les délires visuellement plats des films Grindhouse avec une esthétique à la Lovecraft des plus réussies, qui par con côté série z directement sortie en dtv, plonge encore plus son spectateur dans le grotesque et le grand n'importe quoi, lui offrant toutefois des maquillages et des effets visuels très louables, réussis et viscéraux. Sans atteindre les sommets du genre, ils nous permettent d'enfin voir un film d'horreur à petit budget qui se démarque du lot sans tomber dans le mauvais, et s'offre le luxe de marquer son spectateur, en plus d'apporter des délires visuels et des inventions scénaristiques à son sous-genre récent, se révélant aussi généreux en n'importe quoi qu'un Machete.


C'est à voir au moins une fois, et s'il est certain que le trip ne plaira pas à tout le monde, je pense qu'il est évident de se dire, objectivement, qu'il ne peut être mauvais du fait qu'il est visuellement très laid, puisque c'est son propos fondateur. Il suffira de voir ce plan final pour résumer l'âme du film et finalement se dire que Father's Day cherche, tout du long, l'équilibre parfait entre le moralement laid et le visuellement fascinant, donnant vie à une oeuvre travaillée, de mauvais goût et comique, originale et marquante. N'est-ce pas finalement ce qu'on demande au cinéma Grindouse?

FloBerne
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le 25 févr. 2019

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