Ça aurait pu être un documentaire de la part de Herzog, lui qui passe de la fiction au docu sans problème, mais traiter ce sujet sous forme de fiction, c'est finalement renforcer le sujet : on parle donc d'acteurs engagés pour jouer un rôle dans une famille, pour aborder le sujet, Herzog engage des acteurs pour jouer ces rôles.


L'intrigue se suit assez bien. L'auteur passe beaucoup de temps à nous montrer le genre de contrats que signent ces acteurs et petit à petit fait émerger la nature humaine, ce besoin de contacts réels, le malaise créé lorsque l'on simule trop longtemps un rôle de manière aussi hypocrite. Les conflits sont rares, ce n'est donc pas un film très remuant, mais comme c'est filmé un peu comme un documentaire (on nous explique le fonctionnement et on suit les rôles), ça passe. Juste que ça aurait pu être plus remuant. En même temps je suis soulagé que l'auteur reste sobre, surtout par rapport au malaise final qui pousse le héros à retrouver sa famille, ça aurait pu être bien plus porté sur le drama : en restant sobre, on évite la larme factice et on revient ainsi aux vrais sentiments que l'on ellipsera par pudeur.


La mise en scène est plaisante et maladroite. Equipe réduite, on se croirait dans un vieux Herzog de ses débuts, avec une photographie pas toujours bien équilibrée en terme de composition d'image, avec même parfois un montage un peu amateur (heureusement un bon mixage son aide à mieux faire passer tout ça). Je suis surpris que le bougre n'ait pas utilisé son habituelle courte focale, en même temps ça aurait été du plus mauvais effet au moment de filmer ces gens. Les quelques plans aériens (un drone?) sont plutôt jolis mais un peu hors ton avec le reste du film, et globalement, c'est plaisant à suivre, Herzog choisit des lieux sympathiques pas forcément filmés dans les productions américaines. Peut-être que les maladresses de Herzog sont à prendre comme une démarche, volontairement créer des images foireuses qui rappellent que nous sommes au cinéma et ainsi être moins dans l'esprit de duper le spectateur ? Ou peut-être pas, après tout, Herzog est habitué à n'en avoir rien à branler des bons raccords, en témoignent les plans tournés par lui-même dans son Bad Lieutenant.


L'on constatera aussi à quel point Herzog nous montre cette société du faux, pas seulement au travers de ce concept de famille à louer, mais aussi notamment lorsqu'on se retrouve dans cette boîte avec un robot pour accueillir les visiteurs mais aussi un poisson robot dans l'aquarium.


Bref, un film intéressant.


PS : j'apprécie que ce réalisateur pourtant très connu continue de faire des films discrètement, avec des budgets minces, parce que bon les productions Scorsese qui font le buzz pendant des mois, avec un budget gargantuesque, c'est un peu fatigant.

Fatpooper
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le 24 nov. 2021

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Fatpooper

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