La nuit, moment des désirs charnels illicites : Enter the Void et son libre-pass

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Enter the Void narre les errances spirituelles d’Oscar, petit trafiquant de drogue, à travers Tokyo, à partir de l’instant il est abattu par les forces de l’ordre après avoir été dénoncé par un de ses clients. La construction scénaristique se base sur les mésaventures d’une âme de la mort jusqu'à la renaissance, sous forme de « parcours inversé de l'existence ». Elle prendrait alors place sous forme de voyage mystique narré d’un point de vue spectral, en alternant flashbacks, mises en abîme et prises de vue astrales confondant délires psychédéliques et désordres, et récit réel ordonné. Le postulat est déjà propre aux nocturnes : un esprit erre dans la ville de Tokyo, et une suite de sous-récits défile en s’appropriant de près ou de loin à un cadre nocturne. Lorsqu’Oscar est brutalement tué par la police alors qu’il se trouve dans un cabinet, un plan en contre-plongée nous montre le corps du défunt dans une position qui ne semble pas vouloir refléter l’ampleur de la société, mais plutôt, l’espace si restreint occupée par l’individu dans celle-ci. C’est un exemple parmi tant d’autres de l’exploitation de ce procédé très présent dans le film – jusqu’à l’affiche officielle – déconstruisant la cristallisation totale du corps du personnage d’un point de vue seigneurial. La nuit serait un moment d’observation et de jeu pour Dieu, duquel les sujets humains suivis sont à la merci.


Purement sensoriel, Enter the Void se présente comme une succession de séquences illustrant souvent les effets hallucinogènes, au carrefour d’un récit décousu prenant racine autour de la relation frère et sœur entre Oscar et Linda (interprétée par Paz de la Huerta). Les couleurs, omniprésentes – bien plus que dans Irréversible par exemple –, semblent comme masquer les ténèbres existentielles où nous nous débattons4, tels les sujets du métrage, pour accéder aux plaisirs sensoriels les plus illicites à un moment de la journée sans limites aucune. La scène la plus éloquente à ce sujet demeure celle de la consommation de DMT. Effectivement, dans cette scène, l’osmose de la diméthyltryptamine semble être à son apogée, explorant les divers degrés de cette dépendance. Elle s’ouvre sur un plan en panoramique, doublé d’un travelling arrière, sur Oscar, pompant la matière euphorique en pleine soirée. Si haut que se place la caméra, des éclairs se propagent sur l’écran, plongeant autant le personnage que le spectateur dans une atmosphère purement nocturne, ornée par une bande-son stressante mâtinée de sonorités accompagnant les effets visuels les plus éphémères.


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