Jarmusch est un artiste aux qualifications variés, qu'il soit musicien ou cinéaste. Mais c'est bel et bien en tant que cinéaste qu'il parvient depuis tant d'années à nous emporter dans un océan d'images, accompagnés souvent de sons variés et de maniérisme de grande qualités.


Le film commence. Une musique démarre par plusieurs travelling de droite à gauche, sous une musique de Tom Waits. Une scène, le personnage du maquereau est introduit par une scène dont nous ne parvenons pas à cerner le sens propre. Le procédé se répète avec l'introduction du personnage de l'animateur radio, à l'exception du fait que les travellings s'effectuent ici de gauche à droite, même musique, même incompréhension. Travelling de droite à gauche, puis générique de début. Quel est le sens de cette scène? Où a voulu en venir Jarmusch? Peu importe premièrement, puisque le côté abstrait et sensoriel du temps qui nous est proposé lors du découpage. Mais nous pouvons aussi constater que le cinéaste nous ouvre ici les seuls portes de mouvements de caméras durant cette courte séquence. Alors que le reste du film ne sera uniquement filmé qu'en plans fixes, tout en étant en opposition du style d'Ozu. J'aimerai déceler chaque facette de cette introduction, le cadre que Jarmusch veut poser ici, mais il me faudrait probablement bien plus que d'une simple critique pour tenter de les comprendre. Mais la musicalité de cette dernière suffit.


Jim Jarmusch, tout comme Brian De Palma, est un adepte de la reprise de thématiques de films "anciens". Il est ici question des films d'évasions. Dont la popularité eut lieu principalement lors des années 60-70. Mais qui est, bien entendu, traité de manière personnelle, baroque et esthétisé comme sait si bien faire l'auteur. Mais j'ai pourtant l'impression qu'il atteint ici la quintessence de son art. Son oeuvre la plus puissante, peut-être, la plus efficace!


Les trois personnages principaux s'éloignent des archétypes habituels. Tous les trois ont en commun le fait d'avoir été arrêté par erreur. Le personnage de l'exhibitionniste, incarcéré par un coup monté d'un crime relevant d'une aggravation de ses crimes déjà commis. Le personnage de l'animateur radio, ivrogne enfermé, lui, pour la simple volonté d'un criminel de faire porter le chapeau d'un meurtre à quelqu'un, profitant alors de sa naïveté résultant d'un état d'ébriété. Ces deux personnages s'avèrent être très proche au niveau de leur comportement, mais la seule et unique notion les séparant serait l'argent, notion invérifiable en prison. Celui de l'Italien, interprété par Roberto Benigni dans l'un de ses plus grands rôles comiques (avec night on earth), est ici pour apporter un comique de personnage, de l'humour, une poésie et une absurdité. Nous croirions entendre un enfant, en témoigne sa volonté de toujours rester avec ses amis, la raison pour laquelle il a été incarcéré, ainsi que son extrême naïveté.


L'humour est en effet omniprésente, et la poésie du cadrage, des personnages et de la musique employée nous envole vers ce magnifique univers créé par Jim Jarmusch. Il adopte ici, à l'exception de la première séquence, le genre du jazz, composé par Tom Waits. L'adoption d'un genre musical particulier est typique de chacun de ses films. Du hip-hop dans Ghost dog, une guitare électrique solitaire dans dead man, du rock industriel puissant dans only lovers left alive etc... Et cette dimension correspond parfaitement à la poésie du film, se mariant parfaitement à cette magnifique photographie.


Les plans longs fixes s'adaptent parfaitement à la musique personnelle de Jim Jarmusch, à la puissance de ses dialogues. Le cloisonnement est omniprésent, ressenti mais également oublié par ces quelques moments d'évasions et de fraîcheur que ce down by law nous propose. Et ce plan final est d'une toute beauté, nous sortons donc de ce voyage le sourire au lèvre, pas près d'oublier ce qui vient de nous être proposé, comme étant probablement le meilleur film de Jim Jarmusch, voir, peut-être, le meilleur film du cinéma indépendant Américain des années 80.

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le 31 mars 2015

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Caïn_Hamilton

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