Auréolé de la mention du meilleur film d'horreur étasunien des deux dernières décennies (détrônant ainsi The Witch, ce dernier ayant destitué l'année précédente It Follows, et en attendant donc l'apparition d'un prochain film régicide en 2017 - vous suivez ?), Don't Breathe du réalisateur Fede Alvarez aura créé la sensation au cours de cet été outre-Atlantique, cette production indépendante se payant même le luxe de faire jeu égal en terme de fréquentation avec les blockbusters estivaux lors de sa sortie fin août. Or, en dépit de plusieurs réserves, qui cette fois-ci n'ont rien de rédhibitoires (suivez le regard du préposé vers les deux films précités), avouons dès à présent que cette apparentée relecture inversée du classique Seule dans la nuit de Terence Young n'en demeure pas moins une bonne surprise. Mais n'allons pas trop vite comme le veut l'adage.


Banlieue de Detroit, Rocky (Jane Levy) rêve de rejoindre la Californie avec sa jeune sœur Diddy. Son quotidien se borne à commettre avec son petit-ami Money (Daniel Zovatto) et Alex (Dylan Minnette) divers cambriolages dans les maisons que gèrent la société de gardiennage du père d'Alex, ce dernier subtilisant le double des clefs détenues par son paternel. Un jour, Money apprends de la part de son receleur qu'un vétéran de l'armée vit seul dans un quartier abandonné avec la coquette somme de 300 000 dollars en liquide. Après un premier repérage et la découverte que l'homme est en fait aveugle, les trois délinquants décident de passer à l'acte le soir même...


Premier point, Don't Breathe n'est pas le film d'horreur annoncé. Le second long métrage de Fede Alvarez quitte l'horreur graphique du remake ultra sanglant d'Evil Dead, première réalisation de l'uruguayen adoubée par la paire Sam Raimi et Rob Tapert via leur société de production Ghost House Pictures, pour prendre la forme d'un thriller efficace, claustrophobique à souhait. Second point, du scénario coécrit par le metteur en scène et Rodo Sayagues, compagnon de route d'Alvarez depuis ses premiers courts métrages, le film renverse les codes du sous-genre Home Invasion avec une inversion des rôles sinon jubilatoire, du moins originale. Dommage que le suspense anxiogène du titre se dilue dans sa second partie (trop de rebondissements tuent le rebondissement). Qu'importe, Don't Breathe remplit haut la main le cahier des charges, tandis que l'aiguille du trouillomètre s'éloigne rarement de la zone rouge. Dont acte.


Alors d'où proviennent lesdites réserves mentionnées en préambule ? Nullement de la forme, on l'aura compris, plutôt de la nature même de Don't Breathe, qui conforte l'impression donnée par une partie du cinéma d'horreur (au sens large) actuel et son cruel manque de subversion alors que celui-ci se nourrit directement du cinéma d'exploitation d'antan et autres grindhouse. Une copie tiède qui prouve qu'une interdiction aux moins de seize ans peut tout à fait se satisfaire d'une absence de transgression. Étonnant, non ? Ajoutons la pirouette morale qui permet de justifier le forfait de nos trois délinquants (contre toute attente, l'aveugle vétéran de l'armée ayant perdu sa fille n'est pas un saint...) et une fin décevante, et on comprendra aisément que Don't Breathe vaut davantage pour sa mise en scène que pour son scénario.


Porté par les convaincants Stephen Lang (le colonel Miles Quaritch d'Avatar) et par Jane Levy (Mia dans le remake d'Evil Dead), Don't Breathe confirme le potentiel de Fede Alvarez. A suivre.


http://www.therockyhorrorcriticshow.com/2016/10/dont-breathe-fede-alvarez-2016.html

Claire-Magenta
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le 28 janv. 2017

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Claire Magenta

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