Rares sont les films basés sur des faits historiques qui insufflent une dose de fantastique dans leur récit. Mais là, l’idée de base est tellement moisie qu’elle vient annihiler toute tension dramatique que le film tente péniblement de développer sur sa durée. Du surnaturel dans un film qui s’ancre dans le réel, ok pourquoi pas. Mais autant que ce soit bien fait car dans Imagining Argentina, c’est plus risible qu’autre chose. Le film raconte l’histoire d’un type dont la femme a mystérieusement disparu pendant la junte militaire argentine des années 70. Mais dès cette disparition, il va subitement développer un don de voyance qui lui permettra d’avoir des flashs sur ce qu’endure sa femme et sur les lieux où elle a bien pu échouer. Voilà l’une des idées de scénario les plus débiles qu’il me fut donné de voir. En plus d’être hautement perché, ça tue simplement tout le malaise qu’on devrait ressentir dans ces cas-là.


Je vais reprendre un peu ce que j’ai tendance à dire sur les films d’horreur : moins on en voit, plus on a peur. C’est pareil ici, la disparition d’un être cher doit être une épreuve terrible car on ne sait pas ce qui s’est passé, si la personne est toujours en vie ou non, etc… Et c’est justement cette absence d’informations qui crée la tension, qui accentue le drame, qui peut mener quelqu’un à perdre les pédales. Et le film aurait été 10 fois plus intéressant si il se centrait sur la quête de vérité du personnage principal, si il se cantonnait à étudier l’évolution de son caractère, ce qui aurait soulevé des questions (un peu à la manière d’un Mad Max par exemple). Mais non, ici c’est beaucoup trop simple ce qui fait qu’on ne ressent absolument rien de tout ça. Sans compter qu’Antonio Banderas est tellement amorphe et peu convaincu de son rôle qu’il n’y a même pas matière à éprouver une quelconque empathie pour son personnage.


Il y a une scène d’ailleurs qui est tellement énorme et risible vers la fin du film. Banderas a une vision sur sa fille qui est exécutée et comprend alors qu’elle vient de mourir (mais quelle idée de scénario débile mon dieu). Il tombe à genoux en gueulant « Noooooooooo » et 2 secondes après son visage n’exprime absolument plus rien. Un drame expédié en 2 secondes, c’est du délire. Du pur délire.


Puis c’est plat quoi, t’as même pas une mise en scène qui vient relever le niveau. Pire que ça, tu as des séquences et des plans totalement ridicules. Notamment lorsque le grand méchant est révélé au grand jour, il y a un plan où il sort de l’ombre et qui est juste d’une laideur affolante. Et les effets lors des chutes de corps bwah… Les seules scènes qui auraient pu être réellement éprouvantes étaient les scènes de torture et de viol. Le problème c’est que Hampton colle une musique bien lourde qui vient appuyer le truc en surlignant tout. De ce fait les scènes en hors-champ manquent singulièrement d'impact. Et puis le méchant est tellement méchant qu’on en rajoute des tonnes sur son sadisme et ses actes de violence. Sans compter que le casting est vraiment pourri. Il n’y a qu’Emma Thompson qui décide de faire l’actrice de temps en temps mais le reste quelle misère… Quand tu vois Banderas dans La Piel que Habito, c’est quand même autre chose que dans ce gloubiboulga historico-surnaturel de mes deux pois chiches. Mais foutez-nous de l’ambigüité que diable, soulevez des questions, créez un vrai climat de malaise et d’angoisse ! Sans compter que tout est tellement prévisible… Banderas a été menacé plusieurs fois, il vient de faire une grosse provoc’ envers le ministère de l’Intérieur et sa fille décide de quitter sa planque pour retourner dormir chez lui à ce moment-là. Devinez ce qui se passe pendant la séquence suivante en pleine nuit…


Bref c’est nul, nul, nul. Sans compter que le film est victime du syndrome « Tiré de faits réels » avec les traditionnelles phrases explicatives à la fin. Et ici on te balance des statistiques en toute sorte sur tous les enlèvements qu’il y a eu dans différents pays. Et on te cite même la source ! Non franchement je ne regrette même pas d’avoir vu ce bidule car finalement je le trouve plus drôle que tous ces biopics sans saveur. Même si cet Imagining Argentina n’est pas forcément ce qu’il y a de plus bidonnant, il demeure instructif. Il m'a appris quand même quelques trucs sur le contexte historique de l'époque. Mais il faut surtout le considérer comme une parfaite leçon de ce qu’il ne faut pas faire en matière de cinéma. Bref un film à oublier (même si il est passé tellement inaperçu qu’il est de toute façon déjà oublié)… Imagining Caca ouais.

Moorhuhn
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le 30 mars 2015

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