Il n'est pas surprenant que José Giovanni ait toujours dit que ce film dont il est le scénariste et le metteur en scène ait sa préférence.

José Giovanni fut condamné à mort en 1948 pour divers délits puis gracié. Libéré en 1956 avant d'entamer une carrière dans le roman puis au cinéma. Bon nombre des thèmes de ses livres et films tournent autour de l'univers pénitentiaire ou judiciaire. Contrairement au héros du film qui est poursuivi par la malchance, lui a connu un destin plus favorable dont il ne peut que se souvenir.

Deux grands sujets dans ce film : les difficultés de la réinsertion dans la société à la sortie de la prison et, bien entendu, la peine de mort. En 1972 ou 73, je me souviens très bien que le débat était très vif en France après l'exécution de Bontemps et Buffet. Ainsi que du refus de la grâce par Pompidou dont il s'était, d'ailleurs, expliqué à la télé. Il me semble d'ailleurs me rappeler qu'il avait, alors, cité un extrait de poème que je ne suis pas parvenu à retrouver. En France, il faudra attendre quelques années encore pour que la peine de mort soit abolie.

Il y a une chose qui m'a toujours frappé dans ce film que j'ai moult fois vu à la télé et, bien sûr maintenant, grâce à la magie de la technologie, en DVD. C'est le parallèle entre les personnages joués par Delon, Gabin et Bouquet dans "Deux hommes dans la ville" et "les misérables" de Hugo. Delon/Gabin, c'est évidemment Jean Valjean. Bouquet, c'est bien sûr Javert.

La volonté de la réinsertion d'un côté, l'acharnement ou l'absence de confiance de la société (pour parler en général) de l'autre.

Il y a une autre chose qui, cette fois, m'amuse plutôt dans ce film. C'est la trajectoire du couple Gabin/Delon à travers trois films : "Mélodie en sous-sol" (1963), "le clan des siciliens" (1967) et "Deux hommes dans la ville" (1973). À première vue, ils ont l'air très différent. À la réflexion, ce sont les mêmes personnages. Gabin joue dans une tonalité analogue même si dans les deux premiers, il est un truand et dans le troisième un ancien flic reconverti en éducateur spécialisé. Quant à Delon, c'est son caractère impulsif qui le mène toujours. Ses pulsions, je dirais, plutôt …

Au-delà des sujets qui restent toujours d'actualité, surtout la problématique de la réinsertion, le point fort du film c'est bien entendu le casting et les seconds rôles toujours intéressants.

Je ne reviens pas sur Gabin, dans une de ses dernières prestations et Delon (dont on ne sent pas trop qu'il est producteur du film), mais Michel Bouquet est sensationnel en ordure parfaite, en flic modeste, tenace et rancunier. "

"Je fais mon métier sans haine ni passion"

On voit le taux d'adrénaline monter dans le sang de ses interlocuteurs (et même chez le spectateur). Acteur et personnage sont crédibles.

Et puis Jacques Monod en proc, Maurice Barrier en juge d'instruction, Bernard Musson en maton, Dominique Zardi en détenu sont dans des rôles plus vrais que nature.

Petite mention pour Giraudeau dont c'est le premier rôle tout feu tout flamme, Depardieu dans un personnage qui annonce étrangement "les valseuses"

Et puis Mimsy Farmer, Victor Lanoux.

En guise de conclusion, c'est un film que je trouve toujours très fort sur des sujets difficiles qui sont traités avec une relative sobriété et beaucoup d'humanisme.

JeanG55
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le 19 nov. 2023

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