Certain croyait enfin s’en être débarrassé, mais le Found Footage renaît tel le mauvais esprit de ces bois et de manière bien plus protéiforme qu’on ne le pensait à ses origines, parce qu’il a le mérite d’être peu onéreux à produire et qu’à l’heure des réseaux sociaux, il est plus que jamais de bon aloi avec tous ces smartphones bardé de caméras. Il est même devenu la nouvelle excroissance des plate-formes de SVOD comme Shudder, leur permettant de doper leur catalogue de diffusion. Le genre n’avait pourtant pas mis longtemps à péricliter comme le slasher en son temps, plus par manque de renouvellement que par réel perte d’intérêt, même si le tapage marketing parfois trop rentre dedans aura parfois eu le don d’agacer. D’un autre côté le succès exceptionnel du premier Conjuring aura permis de renouveler le cinéma d’épouvante horreur plus traditionnel à base d’exorcisme et de maison hanté. Face à ce rapide déclin, certains réalisateurs ont pris le temps de digérer cet épiphénomène pour tenter de nouvelles approches avec l’avènement des nouvelles technologies de diffusion, cela aura par exemple permis de donner naissance à des nouvelles catégories comme le "screen reality" (Unfriended) ou bien ce que j'appellerai le "Stream Recording" qui nous intéresse aujourd'hui. Faute de pouvoir véritablement révolutionner l’approche, il est temps de le tourner en dérision, en atteste d’ailleurs l’introduction de ce Deadstream qui s’amuse à parodier le carton d’ouverture du film Le Projet Blair Witch.


Qu’il est loin le temps du caméscope tremblotant dont on retrouvait la cassette après une heure et demi de terreur ascensionnel. Les streameurs sont désormais suréquipés et disposent de tout un large éventail de caméra inter-connectés qui leur permettent de diffuser leur contenu en direct, sans même avoir recourt aux effets de montage puisque ce sont les spectateurs qui peuvent passer d’un point de vue à un autre en inondant le fil de la conversation. Des évolutions technologiques au secours de la diégétique d’un film qui jouit d’une belle côte de popularité depuis son succès remarqué dans les festivals mais qui ne fait pourtant pas dans l’originalité. Mais ça Joseph et Vanessa Winter en ont parfaitement conscience, d’où le choix d’exploiter allègrement tous les codes et artifices inhérent au genre qui lui font justement défaut, une manière bien à eux de tout chambouler en les pervertissant plus que de raison. Au même titre que les followers, nous sommes donc là pour voir l’acteur souffrir et implorer la miséricorde des esprits frappeurs quitte à remettre en question la véracité de tout ce qui nous est proposé. Si le cheminement de la peur fonctionne au début lors de la découverte de la maison, le tout retombe très vite comme un soufflet, notamment à cause de la personnalité irritante du vidéaste qui tente de se racheter une réputation après avoir été démonétisé durant 6 mois suite à des pranks qui n’étaient pas au goût de tout le monde, du genre commettre des outrages à agents avant de s’enfuir en courant ou bien faire une descente en canoë pour imiter Moïse lorsqu’il était bébé.


Deadstream soulève néanmoins un point très intéressant, celui de la connerie généré par ses influenceurs prêt à se mettre en danger pour relever des défi idiots et déclencher un véritable buzz médiatique. Shawn passera ainsi son temps à aller au devant du danger et à extérioriser ses émotions ce qui pourra au choix vous faire marrer ou bien vous agacer. Difficile de ressentir une quelconque empathie à le voir gémir et souffrir autant puisqu’il s’est mis délibérément dans cette situation. En même temps, qu’elle personne saine d’esprit irait balancer ses bougies d’allumage dans un buisson pour rendre impossible toute évasion. Il ne fait aucun doute que ce youtubeur est un vrai con, et que chacun de ses choix ne fera que provoquer encore d’avantage la colère des esprits de la maison. Maintenant, il serait malhonnête de ne pas reconnaître la générosité dont sait faire preuve le réalisateur qui ne recule devant rien pour s’infliger une multitude d’humiliations à l’écran, ressuscitant au passage l’humour slapstick si cher à ce bon vieux Sam Raimi. Qu’on se le dise, la référence n’est pas longue à aller chercher, puisqu’il s’agit d’un hommage à peine déguisé. Le film a d’ailleurs le mérite de composer une belle galerie de démons et d’effets pratiques bien dégueulasse ce qui manquait aux arnaques du type Grave Encounters qui préféré miser sur le numérique. En sus de cela, la réalisation n’est pas bordélique malgré les nombreuses prises de vues employés pour ne rien rater des effets grotesque et paranormaux. Reste que cette volonté de vouloir toujours trop en montrer limite considérablement l’effet « réalité » que l’on cherche justement à ressentir devant ce type de divertissement. Il est vrai que la peur et l'effroi sont beaucoup plus difficile à susciter que le rire surtout dans un contexte aussi éculé que celui là. Même si en l’état, ça fait quand même mal de se dire que Deadstream est presque un meilleur Evil Dead que ne l’est Evil Dead Rise...

Le-Roy-du-Bis
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Vous reprendrez bien un peu de Found Footage ?

Créée

le 17 nov. 2023

Critique lue 16 fois

2 j'aime

1 commentaire

Le Roy du Bis

Écrit par

Critique lue 16 fois

2
1

D'autres avis sur Deadstream

Deadstream
RedArrow
6

Shawn of the Web

Même si ses années les plus glorieuses semblent aujourd'hui derrière lui, le found footage continue parfois de surgir ici et là, au détour de petits films d'épouvante toujours prompts à utiliser des...

le 1 nov. 2022

7 j'aime

4

Deadstream
freddyK
7

Fun Footage

Deadstream est un petit film qui fait vraiment plaisir à voir ne serait ce que pour la façon avec laquelle il s'approprie entre intelligence et malice tous les codes usés jusqu'à la corde du found...

le 1 nov. 2022

6 j'aime

5

Deadstream
Jb_tolsa
8

Quand on n'a pas d'argent, on a des idées et du talent

Deadstream est une pépite, comme il y en a tant eu en 2022 pour moi dans le cinéma d'horreur, le genre qui s'en sort le mieux en post-covid. Après de nouvelles idées de réalisation au service du...

le 11 janv. 2023

4 j'aime

5

Du même critique

Whiplash
Le-Roy-du-Bis
10

I’m Upset

On ne nait pas en étant le meilleur, on le devient au prix d’un travail acharné et d’une abnégation sans faille. Le talent n’est pas inné, il se développe et se cultive par un entraînement rigoureux...

le 17 juil. 2023

8 j'aime

21

La colline a des yeux
Le-Roy-du-Bis
8

Les Retombées

À Hollywood, on aime pas trop prendre des risques inutiles et les remake constitue des retombées financières garantie. Massacre à la tronçonneuse, Halloween, Vendredi 13... Evidemment, pour s’assurer...

le 19 oct. 2023

7 j'aime

3

Kickboxer
Le-Roy-du-Bis
7

Nok Su Kao

Beaucoup l’ont traîné dans la boue à cause de quelques langues de pute de journalistes qui ont voulu le tourner en ridicule, mais Jean Claude Van Damme n’en reste pas moins une bête d’athlète qui...

le 25 mars 2024

6 j'aime

7