Même si ses années les plus glorieuses semblent aujourd'hui derrière lui, le found footage continue parfois de surgir ici et là, au détour de petits films d'épouvante toujours prompts à utiliser des modes de communication en perpétuelle évolution pour espérer créer de nouvelles formes de frissons.

Après les screenlife movies (se déroulant entièrement sur un écran d'ordinateur) ou même des dérivés comme le Zoom movie "Host" surfant avec opportunisme sur le confinement et ses contraintes, "Deadstream" s'inscrit dans une veine plus classique du found footage, via un vidéaste se filmant avec un dispositif de caméras, mais avec les spécificités d'un live stream façon Twitch, une diffusion en direct (dans sa réalité du moins) accompagnée des commentaires des spectateurs. Certes, "Deadstream" n'est pas le premier long-métrage de ce type mais il va s'en révéler être un des plus amusants à tirer parti de ce procédé !


Mis au ban à cause de certaines outrances, Shawn est en pleine rédemption auprès de sa communauté d'internautes friande de le voir affronter à nouveau ses peurs en vidéo. Pour son grand retour, l'homme décide de frapper fort et propose d'aller passer une nuit dans la plus célèbre maison hantée des États-Unis (enfin, la plus célèbre qu'il puisse filmer sans autorisation)...


L'état d'inconscience dans lequel certains streamers peuvent se retrouver à cause du succès de leurs vidéos et des demandes de "toujours plus" de leurs fans fait évidemment ici tout le sel acerbe de ce "Deadstream". Notre introduction au personnage de Shawn et à ses bouffonneries, son obnubilation pour ses sponsors, sa peur d'un potentiel risque de démonétisation ou encore le besoin de satisfaire ses followers à tout prix offrent le spectacle d'un individu ayant perdu prise avec le sens des réalités, allant jusqu'à se fourrer de lui-même dans le pire des dangers (le spectateur, complice, le sait bien) simplement dans l'optique de se racheter auprès de sa base et maximiser son audience. Le film a beau aussi nous faire ressentir chez Shawn une vraie faculté d'entertainer par sa compréhension du contenu à produire vis-à-vis de son public et une pléiade de références citées à haute voix, son jusqu'au-boutisme en fait ici ressortir avant tout les travers les plus pathétiques d'un personnage ne réalisant sa propre bêtise que devant le fait accompli.


En parallèle des nombreux sourires que cela engendre, "Deadstream" se devait d'apporter de bons coups de flippe à cet huluberlu (et à nous) pour le punir de son aveuglement... Et il le fait plutôt bien ! D'abord au sein d'une mécanique classique d'apparitions et bruits t.très épars (comme dans tout found footage), notamment durant la visite de la maison servant à en installer le passif, avant de passer à la vitesse supérieure grâce à une excellente idée pour acter l'arrivée définitive du surnaturel et à des jumpscares qui ont le mérite de se montrer inventifs (ou, au moins, efficaces) lors des manifestations suivantes. Plus étonnant, et ce même si son balancement entre humour et effroi pouvait déjà le suggérer (ainsi que le cadre de petite maison isolée ou son art de la débrouille), "Deadstream" délaisse ensuite peu à peu les ficelles classiques et parfois trop timides de l'épouvante contemporaine pour se tourner vers celles plus palpables et frontales d'un modèle ancien qui nous saute désormais aux yeux... un certain film fondateur de l'oeuvre de Sam Raimi !

Aussi jubilatoire que va être de retrouver cette ambiance pendant un temps, le tout avec des réalisateurs-auteurs qui en ont manifestement très bien compris l'essence, l'influence va devenir hélas un brin trop évidente sur la durée, conduisant "Deadstream" à tirer sur la corde de certaines situations ou effets jusqu'à transformer ce à quoi il veut rendre hommage en excès pas forcément nécessaires à sa propre identité (voire même à ne le résumer qu'à cela in fine, en oubliant qu'il a construit sa propre route pour en arriver là). Heureusement, le film aura toujours de quoi rebondir grâce à quelques trouvailles savoureusement décalées dans le sillage de son héros désemparé ou du côté de la variété de ses apparitions créatrices de vrais sursauts .


Bien qu'il en fasse un peu trop dans sa seconde partie au risque de le singer, "Deadstream" est un sympathique rejeton moderne du style Raimi-esque d'antan (ce qui est déjà un très joli compliment en soi). Et un divertissement on ne peut plus recommandable pour passer une bonne soirée d'Halloween ! Ce qui fut notre cas hier soir en sa compagnie.

RedArrow
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le 1 nov. 2022

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