Ce « Davy Crockett, roi des trappeurs », produit par les studios Disney et sortie en 1955, souffre de nombreux défaut, des défauts que l’on ne doit pas toujours à son époque, il est important de le préciser. Bien sûr quand on le regarde depuis 2020, tout, et absolument tout, nous sembleras affreusement primaire et grotesque, du jeu d’acteur aux cascades, mais en replaçant l’œuvre dans son contexte, comme il convient de le faire, certaines lacunes pourront être pardonnés, et d’autres non. Par exemple, je ne reprocherais pas au film le jeu de ses acteurs trop exagérés, puisqu’en réalité, il s’agissait de la norme du cinéma de l’époque. Quant aux cascades, on peut tomber d’accord: il était grandement possible de faire mieux, même en 1955.


Idem pour le scénario, qui semble d’une certaine manière rafistolé. Davy Crockett vit une série d’aventures que le spectateur et le monteur (apparemment) peinent à relier les unes avec les autres tant elles manquent d’homogénéité les unes avec les autres, et surtout à cause de l’absence d’un fil conducteur présent du début à la fin. Quand on s’y intéresse de plus près on découvre que le film est en réalité une compilation d’extraits des premiers épisodes d’une série télé, et là tout s’éclaircit. En effet, le film a l’air de manquer de moyen.


Cela amène un autre problème: le rythme. Le suspens, tout comme l’ambiance et l’énergie globale de l’œuvre, sont en dents de scie. J’ai décroché vers la fin du film en me rendant compte que je ne pouvais pas dire quelle était cette armée contre qui Davy Crockett se défendait. Il ne s’agit pas d’un problème de compréhension de l’œuvre, car je suis certain que si j'avais visionné en plusieurs fois le film ce détail ne m’aurait pas échappé. Il s'agit bien sûr d’un défaut indéniable de suspens, le film n’est pas assez captivant.


Je relève des maladresses qu'on ne pardonnerait plus aujourd'hui. À l'époque, semble-t-il, on se souciait moins des polémiques que l’on pouvait engendrer. Les allusions et la complaisance insupportable de certains personnages face à l’esclavage m’ont horrifié, ainsi que les crimes commis en toutes impunités contre les peaux rouges. Des coups de fusil dans le dos qui semblent tout à fait être légitimés par le scénario. Par ailleurs, Davy Crockett, après avoir tué un certain nombre de ces individus, se décide à défendre leur cause, et cela suppose qu'il est pardonné de ses crimes. Si c'était vraiment comme ça au temps des colons, alors je ne vois que des fous et des criminelles chez les pionniers américains (d'ailleurs, il doit certainement s'agir d'un récit des événements très nuancé, la réalité est sans doute inavouable). Bon…on va mettre les pieds dans le plat, aujourd'hui le schéma de l’œuvre est discutable, et cela aurait dû être le cas à l’époque déjà. Peut on dire que le réalisateur et le studio de production on manquait de bon sens. Il faut croire que les moeurs étaient malheureusement différentes. Mais ne serait-ce qu’au nom des valeurs de droits que proclame l’œuvre à un certain moment, l'histoire n'aurait pas du mettre en scène un Davy Crockett qui massacre le peuple indien. Autant dire que tout cela est très paradoxal, et qu’en ce qui me concerne, cette hypocrisie ne passe pas du tout, malgré mon grand amour pour Disney.


Fess Parker (Davy Crockett) répond à l’archétype du héros américain du cinéma des années 50, un gendre idéal aux bonnes manières, légèrement séducteur et qui se prend un peu trop au sérieux (et il n’y a plus qu’a espéré que cela colle a la personnalité du personnage). Sa performance est modeste, mais on a connus pire. Buddy Ebsen (Russel) est le personnage le plus convaincant du duo, même s’il n’a de nécessité que de donner la réplique au héros.


La musique est barbante, les chansons encore plus. Que dire de cet air chanté, entêtant, qui revient sans cesse : « Davy, Davy Crockett… héros des frontières, héros de ceci, machin de cela...». Le même air, et les paroles qui changent, à quatre, cinq, six reprises, bref, on se souvient qu’il s’agissait au préalable d’épisodes de série, et la chansonnette a sans doute était pensé comme un leitmotiv. Soit, mais cela ne se prête plus du tout à un long métrage. Imaginez la Reine des Neiges avec « Libéré, délivré » chantez six fois... Il y a de quoi arrêter le film avant la fin, je suis sûr.


J'ai été aussi étonné par les moeurs légères de la femme de Davy Crockett, qui offre un baiser au compagnon de son mari, puis à son mari, pour les récompenser tous les deux d'être en vie. Polygamie ou échangisme, à vous de choisir. D'ailleurs cet intransigent Davy Crockett a même promis un baiser de la part de sa femme à son ami, sans même s'assurrer qu'elle en serait consentente, un léger détail superflu pour l'époque, sans aucun doute... Que dire de ça? J'ai pas les mots...


Un dernier défaut pour la route, de taille cette fois-ci. Les cascades, les scènes de lutte, de combat et de guerre, sont toutes laborieuses. Il nous faudra beaucoup d’imagination pour passer outre cette faiblesse. Un homme se prend une flèche et tombe deux secondes plus tard, des combattants s’échangent des coups dans le vent, et ça pique les yeux, les scènes de guerres ne semblent même pas avoir été répété tellement les figurants font n’importe quoi. Non, franchement, c’est risible, et là, à ce niveau, on ne peut pas dire qu’on le doit à l’époque. Non, il s’agit d’un manque flagrant de moyen, ou sinon de volonté.


Les décors et l’ambiance du film sont quant à eux plutôt réussis. Par là j’entends qu’ils contribuent au spectacle sans le gâcher.


Malheureusement, même avec beaucoup d’indulgence, je ne peux pas juger ce film de satisfaisant, ni même lui attribuer la moyenne. À vrai dire, c’est ce que je comptais faire, mais en soulevant tous les points de ma critique j’admets que j’aurais été dans une sorte de complaisance en le surévaluant. Quatre étoiles feront une note crédible.

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le 8 avr. 2020

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Casse-Bonbon

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