La chercheuse Ellie Arroway (Jodie Foster) n'en démord pas : les extraterrestres existent, et il est possible de communiquer avec eux ! Malheureusement pour elle, le docteur David Drumlin (Tom Skerritt) n'est pas de cet avis, et il lui coupe l'accès aux recherches spatiales, considérant qu'il s'agit d'un vaste gaspillage d'argent. Jusqu'au jour où Ellie découvre un signal en provenance de l'espace dont tout laisse à penser qu'il provient bel et bien d'extraterrestres. Commence alors une vaste course scientifique qui va bousculer bien des convictions. Car Arroway a en effet un débat majeur avec son ami et amant Joss Palmer (Matthew McConaughey) : dans un monde que la science explique mieux de jour en jour, Dieu a-t-il sa place ? Et la découverte de l'existence d'extraterrestres ne serait-elle pas la preuve ultime de l'inexistence de Dieu ?


Avertissement : mieux vaut avoir vu le film pour lire la critique ci-dessous, sous risque de s'exposer à des révélations sur l'intrigue.

Je cherchais un bon film culte pour bien commencer mon année cinéma, et je ne suis pas déçu !

Même si Zemeckis n'égale pas Rencontres du troisième type ou 2001, l'odyssée de l'espace, il emprunte judicieusement à ces deux chefs-d'œuvre pour nous offrir un film qui prend logiquement sa place dans leur sillage, et se montre leur digne héritier.

De Kubrick, il a gardé toute la partie métaphysique, plus maladroite ici, car davantage explicitée par des dialogues parfois trop évidents. Il n'empêche, c'est gentil de la part de Zemeckis de nous avoir donné le mode d'emploi, cette fois, ça nous évite de décrocher.

De Spielberg, il a repris tout le côté terrestre, ce grand travail d'équipe pour réussir à comprendre ce que veulent les extraterrestres et comment entrer en contact avec eux. C'est tout aussi captivant que chez Spielberg, et c'est ce qui donne tout son sel au film. D'ailleurs, peut-être Zemeckis lui a-t-il repris autre chose également, mais j'y reviendrai plus tard.


Heureusement, le réalisateur n'est prisonnier d'aucune de ses influences, et il donne au film sa propre personnalité, ne se contentant pas d'être une pâle copie. Son originalité propre, il la met dans sa réflexion sur l'opposition entre science et foi, une opposition traditionnelle qui a rarement été aussi bien mise en images qu'ici.

Pourtant, je dois dire que je suis un peu partagé sur ce sujet, car c'est aussi là que le film souffre de ses plus gros manques de subtilité. En effet, Contact souffre de dialogues inégaux, parfois très fins, et parfois trop boursouflés pour être réellement efficace. Mettre en scène de manière subtile l'opposition science/foi est une chose ardue, et Zemeckis a au moins le mérite d'y avoir réussi partiellement. Si certaines répliques accentuent trop le trait de personnages légèrement caricaturaux (mais il est vrai que lorsqu'on aborde ce sujet dans la vie réelle, les avis sont toujours très tranchés), il faut reconnaître aux scénaristes d'avoir su ne pas prendre parti pour un personnage plus qu'un autre et nous donner une vision assez juste et objective du débat tel qu'il existe en lui-même.

On pourra également regretter quelque peu que le film ne donne une vision que parcellaire de la foi, vue presque uniquement comme un sentiment intérieur, une expérience qui ne s'appuie sur rien de vraiment concret. Mais il est intéressant de voir que le film ne situe pas automatiquement la raison du côté de la science, et c'est toute la réussite de Zemeckis de savoir se positionner et nous positionner dans l'esprit de chacun de ses personnages, sans le juger de prime abord.

A ce titre, on ne peut que goûter l'intelligence de la séquence finale, qui place le docteur Arroway dans la position qu'elle a toujours combattue jusque-là. Considérant depuis fort longtemps que l'absence de preuves signifiait la preuve d'absence, elle réalise qu'il n'en est rien, et que, quand il n'y a pas de preuves, il ne reste plus que la possibilité de croire. Et si le film semble en conclure un peu rapidement que la foi implique nécessairement l'absence de preuves, l'humilité de la conclusion et du propos général du film rendent ce dernier instantanément sympathique.


Si Contact séduit autant, c'est aussi (et surtout ?) grâce à l'art narratif de Robert Zemeckis, qui égale sans aucun doute ses plus grandes réussites. La photographie de Don Burgess touche des sommets (dont ce fameux plan du miroir, dont j'ignorais l'existence jusqu'à hier, et qui est un chef-d'œuvre à lui tout seul), et renforce la fascination suscitée par le scénario. Ce dernier est d'ailleurs particulièrement bien écrit, tant il réussit à nous captiver pour tout ce qui entoure cette prise de contact interstellaire.

Il faut dire que du côté des acteurs, c'est un sans-fautes ! Matthew McConaughey a ce mélange de charme d'insipidité propre aux jeunes premiers de comédies romantiques, mais cela fonctionne parfaitement avec son personnage d'une "lisseté" toute américaine. Jodie Foster, elle, a du caractère pour deux, ce qui permet d'équilibrer le couple, et elle excelle comme à son habitude dans ce rôle de femme forte qui a du mal à distinguer la vérité de l'erreur. Enfin, Tom Skerritt joue un rôle tout en nuances, là où le film aurait pu camper un méchant unilatéral, tandis qu'Angela Bassett et William Fichtner apportent au récit des personnages secondaires très humains. Seul James Woods paraît un peu monolithique, dans ce rôle d'agent gouvernemental trop buté pour être honnête.

Le récit est vraiment progressif, et parvient à nous immiscer peu à peu dans la logique des scientifiques qui se livrent à un jeu de pistes susceptible de bouleverser toute l'histoire de l'humanité. Plus on avance, plus la narration nous plonge dans l'âme des personnages, et nous fait découvrir les différentes facettes de son sujet passionnant.

Ainsi, Contact n'a aucun mal à susciter l'intérêt, tant la délicatesse de son écriture, alliée à une certaine sobriété, empêche le récit de partir dans tous les sens.


Seul bémol sur la scène-clé du film : la rencontre (au moins supposée) avec les extraterrestres. Fallait-il la montrer ? Je suis partagé à ce sujet : évidemment, le spectateur attend pendant 2 heures cette rencontre, il est donc absolument obligatoire de la lui offrir sous peine d'ensevelir le film sous une trop grande frustration. Mais cela ne serait-il pas allé davantage dans le sens du film de ne pas l'illustrer ? L'ambiguïté de l'acte final en aurait été renforcée, et le spectateur n'aurait pas plus su que les observateurs extérieurs si le docteur Arroway aurait réellement fait une rencontre intergalactique. Il me semble que Zemeckis se retrouve un peu le cul entre deux chaises, puisqu'il prend le parti de nous montrer le voyage, assorti de quelques plans spatiaux, tout en essayant de se retenir de tout nous montrer (très belle idée que ce plan fixe sur le visage d'Arroway en train de parler d'un phénomène stellaire qu'on ne voit pas). Le réalisateur a un peu du mal à trancher entre les deux démarches, ce qui se comprend, mais nuit peut-être un peu à la cohérence d'ensemble du récit.


Enfin, puisque Contact ne peut pas ne pas évoquer l'immense Rencontres du troisième type de Spielberg, le lien étant évident à faire, je me suis demandé si on ne pouvait pas y voir un autre lien, plus discret, mais très intéressant, encore que je ne suis pas sûr de ne pas un peu trop extrapoler la métaphore.

Car, en effet, ce qui rendait Rencontres du troisième type si fascinant, c'est que Spielberg y développait une métaphore du cinéma d'une puissance absolument incroyable. Si la puissance dont il faisait preuve ne se retrouve jamais ici, le symbolisme ne peut-il se prêter à l'exercice de la métaphore ?

Car, en effet, qu'il s'agisse d'une réelle manifestation d'extraterrestres ou d'une vaste supercherie de S. R. Hadden (sublime John Hurt), ne peut-on voir dans cette figure tutélaire celle d'un réalisateur ? En manipulant l'image et le son, l'extraterrestre (ou Hadden) crée une histoire, nous lance dans un immense jeu de pistes dont on veut avoir le fin mot. Et tout comme Roy Neary, Ellie Arroway est prête à tout pour arriver à la fin de l'histoire, choisissant d'y croire. Car le débat "foi contre science" peut aussi s'envisager ainsi, comme le débat entre deux spectateurs, celui qui est prêt à s'en remettre complètement au réalisateur et à se laisser guider par lui, et celui qui refuse de croire à l'histoire qu'on lui présente.

Envisagé ainsi, Contact acquierrait ainsi une dimension supplémentaire qui ne l'en rendrait que plus envoûtant. Si, contrairement à Spielberg, il est difficile de dire si Zemeckis a vraiment cherché à introduire cette réflexion dans son film, on peut en tous cas facilement s'en servir comme support pour filer une belle métaphore sur la puissance de l'art, son impact sur l'imaginaire et sa force unificatrice.


Et finalement, c'est bien ce que nous dit le film : les intentions des uns et des autres n'ont que peu d'importance face à la force avec laquelle on veut croire. Et si sur le plan religieux, ce message pourrait paraître assez convenu, il ne peut que nous mettre d'accord sur le plan cinématographique.

Tonto
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le 2 janv. 2024

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