Chino
5.5
Chino

Film de John Sturges (1973)

http://www.avoir-alire.com/chino-la-critique-le-test-dvd


Dans les bonus, Patrick Brion dit son peu de goût pour le film, le justifiant en partie par les faiblesses du scénario et le désintérêt de John Sturges, son principal réalisateur. Sans doute juge-t-il avec son savoir encyclopédique et sa prédilection pour le cinéma classique. Il est permis d’être moins sévère avec ce western curieux, certes inégal, maladroit, mais attachant.
Chino court plusieurs lièvres à la fois, et c’est son défaut majeur ; car tout n’est pas traité, et certaines pistes, à peine esquissées, sont des traces non développées du roman d’origine. La romance de Chino et Catherine, soit Bronson et Ireland, époux à la ville, est banale et sans consistance ; malgré l’étonnante séquence dans laquelle ils voient des chevaux copuler, les minauderies de la dame et leurs jeux amoureux voisinent le second degré.
Autre piste qui reste à l’état d’ébauche, le récit initiatique : le jeune Jamie, qui rencontre Chino au début du film, le quitte à la fin, après avoir découvert la violence, l’injustice et l’amour. De lui on ne sait rien, il est le témoin qui nous permet d’entrer dans ce monde singulier, il n’a pas de vie avant, pas de vie après. Là encore ce sujet aurait pu devenir un vrai thème, au moins un point de vue.
Reste que Chino n’est pas sans intérêt ; d’abord par son côté hybride même : venant après le western spaghetti, il en conserve des traits (violence sèche, traces de complaisance, refus du propre et de l’aseptisé), mais conserve des aspects classiques, et notamment la mise en scène exempte d’afféteries. C’est aussi un western d’après, c’est à dire qu’il a perdu son innocence et son manichéisme ; les Indiens sont pacifiques et en voie d’extinction, le racisme touche les métis, et les bons ne gagnent pas à la fin. D’ailleurs la prédominance des ciels sombres, de la terre noire, sont des indices de cette métamorphose du genre, qui devient sale et en quelque sorte « adulte ».
Mais ce qui frappe surtout à la vision de Chino, surtout si l’on a vu la bande-annonce et lu la jaquette du DVD, c’est à quel point l’enjeu narratif est faible et tardif. La vengeance présentée comme le thème du film est abordée après une heure, et somme toute expédiée. Et c’est là que le film nous intéresse, dans ces flottements scénaristiques : on sent le plaisir de Sturges, qui ne savait sans doute pas quoi faire de cette histoire, à suivre des chevaux ou le quotidien d’un éleveur. Nombre de séquences sont inutiles d’un point de vue narratif, et l’on perçoit l’écho du cinéma moderne dans ces scènes contemplatives, qui peuvent être vues comme un regard nostalgique sur le western devenu impossible. C’est aussi l’adieu d’un cinéaste en fin de carrière à un cinéma finissant, qui ne croit plus au système comme Chino ne croit pas en la justice. En ce sens, le départ amer du personnage à la fin sonne le glas d’un genre et d’une époque.
Le texte ci-dessus est repris du site "avoir-alire.com".
(Le rôle du jeune Jamie est tenu par Vincent Van Patten qui parallèlement à sa carrière de comédien a été un joueur de tennis professionnel. Le point culminant de sa carrière est venu en 1981 quand il a vaincu John McEnroe et deux autres joueurs du top dix mondial pour gagner le tournoi Seiko Super World Tennis à Tokyo. Ses meilleurs classements à l’ATP furent, en simple, la 26ème, atteinte le 11 Février 1982 et, en double, la 24ème place en 1986.
Il a atteint le troisième tour de l'US Open en 1982 et 1983 et de Wimbledon en 1985. En double son meilleur résultat dans un tournoi du Grand Chelem est d’avoir atteint les quarts de finale de « Roland Garros » en 1981, en partenariat avec Mel Purcell.)

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le 29 mai 2016

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