Chaw
4.9
Chaw

Film de Shin Jung-Won (2009)

차우 / Chaw (Jeong-won Shin, Corée du Sud, 2009, 2h01)

Direction l’outback sud-coréen, qui en fait ressemble plus au bocage normand, avec des montagnes, qu’au désert australien… Pour une œuvre comme savent si bien le faire les metteurs en scènes du Pays du Matin Frais. C’est à dire un savant mélange à la croisée des genres. Même si ‘’Chaw’’ est avant tout un film de sanglier géant sanguinaire tueur d’êtres humains complètement cons, ayant oubliés leur nature de proies, pensant crânement dominer la chaîne alimentaire. Par une arrogance qui les empêches de remettre en question leur place aux cœur de la faune et la flore environnante.


Par l’horreur, la comédie, la chronique douce-amère, le polar ou bien encore le drame social, au travers de son histoire de gibier devenu prédateur l’œuvre de Shin Jeong-Won dresse un petit portrait d’une Corée du Sud rurale. Refermée un peu sur elle-même. À travers la présentation de nombreux personnages aux conventions bien distincts, il installe une vitrine diverse et variées de personnages lambda, renfermant tous quelques secrets nauséabonds dès qu’il est question de leur intimité.


Ainsi, du fils prodigue policier à la ville de retour au patelin pour s’occuper de sa mère qui perd la tête, et pour y mettre au monde son enfant porté par sa femme enceinte jusqu’au yeux, en passant par le vieux chasseur chelou, et sa relation intime avec la bête. Et du retour de son élève devenu un chasseur star, faisant la Une des magazines de chasses, à l’illuminée du village, que tout le monde ignore poliment, car elle sort de la normalité. C’est tout un ‘’bestiaire’’ humain qui est présenté.


Dans un premier acte, le village est secoué par plusieurs morts mystérieuses, persuadés qu’ils ont affaire à un serial killer (un tueur en série), les autorités mènent une enquête policière qui n’a aucun sens. Jusqu’à ce qu’il réalise ce qui cause ces décès. Puis comme c’est du cinéma coréen, tout s’emballe et ça part en cacahuète totale dans un joli bordel sans nom. Plutôt mal maîtrise d’ailleurs.


‘’Chaw’’ c’est ‘’Jaws’’ qui rencontre ‘’Memories of Murder’’, mais sans originalité, et montrant une fois de plus à quel point le film de Steven Spielberg a une influence sur les films de monstres. Shin Jeong-Won en repris tout l’arc narratif à la lettre : la mort suspect la nuit, la découverte du corps, les questionnements, le vieux chasseur que personne n’écoute, la battue sauvage, le mauvais animal montré en trophée, les dirigeants de la ville fermant les yeux pour des raisons économiques, qui peuvent peser sur le tourisme, et le massacre qui met tout le monde d’accord (lors d’une fête de village dans la salle communale…).


Puis un troisième acte en forme de longue expédition pour retrouver la bête, afin de la faire exploser… Toute la structure de ‘’Jaws’’ dans le texte. Ainsi, ‘’Chaw’’ apparaît comme une œuvre un peu fainéante, qui a trop se reposer sur le modèle de son aîné américain, laisse peu de place à la surprise. S’il vaut pour son portrait de la campagne coréenne, bien que des œuvres bien plus affûtées comme ‘’Memories of Murder’’ de Bong Joon-Ho l’ont fait en mieux ainsi qu’une certaine générosité, l’intérêt qu’il dégage est tout même très limité.


Le point vraiment positif est que le sanglier géant est souvent présent à l’écran, majoritairement en CGI, plutôt pas si mal faits, ses apparitions sont la promesse de quelques moments de bravoures plutôt cool, et assure un final réussis, qui sauve l’ensemble.
Petit film de monstre fun, mais pas top top, ‘’Chaw’’ passe un petit message écologique, plutôt discret, mais néanmoins présent. Qui sert surtout de prétexte pour placer un petit taquet cocasse fait au Japon, et aux dérives de son occupation lors de la Seconde Guerre mondiale. Puisque visiblement en 2009 c’est un problème toujours d’actualité.


Au final, il est toujours bien de regarder des films coréens, du fait de l’utilisation particulière qu’ils font des codes hollywoodiens, en se réappropriant tout l’esthétisme, mais avec des thématiques propres. Et surtout une capacité extraordinaire à ne jamais s’enfermer dans un genre. Sur 2h de temps, le spectateur se retrouve ainsi devant un film d’horreur, une comédie, un drame, un polar, etc etc etc…


Même si l’intrigue principale piétine un peu, et ne sait pas trop vers où aller, il y a toujours quelques choses dont on peut profiter, et l’ennuie ne s’installe jamais vraiment. Non, le défaut principal du métrage n’est pas là. Il se situe plutôt dans le manque de maîtrise et d’audace dans la restitution de son arc principal. La chasse au sanglier étant des plus convenue, facile, et fainéante. Livrant au final une œuvre globalement moyenne, pas inintéressante pour autant, car c’est toujours un pas de plus à faire dans la découverte du cinéma coréen.


-Stork._

Peeping_Stork
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le 26 mai 2020

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