Nov 2009:

Je ne connais pas bien Joseph Losey. J'ai lu l'estime unanime de ses confrères (je pense d'abord à Powell). Je n'ai qu'un lointain mais très admiratif souvenir de son "Monsieur Klein" et du "Messager". Faudrait que je revois ce Monsieur Klein bien plus brumeux dans ma mémoire. Je ne connaissais pas du tout cette "Cérémonie secrète" malgré sa prestigieuse distribution.

Le film garde longtemps son secret, reste délicieusement mystérieux. J'ai longtemps cru que ce que je supposais -et qui était réellement le canevas, à savoir cette histoire d'interdépendances entre Elizabeth Taylor et Mia Farrow- n'était pas possible. Je me suis essayé à imaginer une hypothétique histoire de manipulation mentale destinée à tromper Taylor. Finalement il s'agit bien d'une histoire très glauque sur les deuils ratés, sur la rencontre de deux êtres amputés qui s'inventent une parenté pour survivre. La mère (Taylor) qui ne se remet pas de la mort de sa petite fille et la jeune fille (Farrow) qui n'accepte pas de grandir sans une mère à cause d'un beau-père incestueux (Mitchum). Au-delà de l'histoire glauque, le film l'est tout autant. Je ne porte pas un jugement moral réprobateur. Je crois même que c'est très courageux de mettre les points sur les i et d'oser, de permettre au père incestueux d'exprimer ses opinions, sa légitimation de son inceste de manière aussi froide et cynique, ainsi on entre de plein-pied dans la folie du personnage. N'empêche, c'est pénible à entendre, Mitchum est efficacement dégoulinant d'une dégueulasserie peu commune. En passant, quel choix judicieux de prendre Mitchum! Marqué à jamais par son rôle dans "La nuit du chasseur" de Laughton, il apparait plus effrayant que n'importe qui. Sa face abimée, la dureté de son regard et le vide qu'il traduit pendant quelques fractions de seconde sont autant d'éléments qui laissent pantois d'admiration en même temps que de frayeur.

Après, cette histoire vous touche ou non. Et en ce qui me concerne, je ne fus pas bouleversé outre mesure. Les prestations de Taylor et de Farrow n'ont pas déclenché le même enthousiasme que pour Mitchum.

La réalisation, solide, est peut-être plombée par des décors très laids. Bien entendu que c'est subjectif mais Dieu que cette demeure est immonde! Quel goût de chiottes ont certains anglais parfois : architecture et décorations sont d'un kitsch merdeux! Le film demeure humide, froid, glacial. Sans doute que les relations malades que les protagonistes nouent restent froides et désincarnées justement parce qu'elle sont malsaines, fantôches. Difficile pour moi de rentrer en empathie, de me sentir investi par l'histoire.

Film très bizarre qui ne m'a pas laissé une grande empreinte. Je le déplore.
Alligator
5
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le 30 mars 2013

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Alligator

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