Infinie tendresse

Critique à lire sur Les Joies de Julia : http://lesjoiesdejulia.tumblr.com

Il est impossible de ne pas sortir un peu changé après avoir vu « Ce sentiment de l'été » de Mikhaël Hers, drame lo-fi sur l'apprentissage du deuil, tout en nuances d'émotions et de saisons.
Par une journée ensoleillée et sans histoires, une jeune femme s'écroule dans un parc berlinois. Sur trois étés, nous allons suivre son fiancé et sa sœur, deux âmes abandonnées qui, sans révolte, vont tenter chacun à leur façon de s'habituer à la perte et de reprendre leur quotidien. Ou peut-être une nouvelle vie. Lui, c'est le Norvégien Anders Danielsen Lie, qui nous avait déjà bouleversés avec son regard perdu dans le sublime « Oslo, 31 août ». Elle, c'est Judith Chamla, merveilleuse de naturel et de douleur rentrée, impressionnante de force cachée.
Ça a l'air triste, ça l'est. Et pourtant, tout n'est qu'éclat et douceur dans ce film de reconstruction, où le voyage intérieur est aussi géographique, puisque chaque année, nous retrouvons Lawrence et Zoé dans une ville différente (Berlin – Paris – New-York, parenthèse pendant laquelle nous avons même droit à un caméo musical plus vrai que nature de Mac DeMarco). Ce sentiment de l'été, c'est cette nostalgie qui revient toujours, comme la marée, mais aussi cette sensation que tout est possible, que le renouveau est pour bientôt. Cet espoir fou qui nous pousse à continuer à vivre alors même que le temps semble s'être arrêté. Le deuil est aussi parfois une façon de se prendre en main, d'arrêter de se laisser porter pour se rendre compte de l'incroyable liberté qui s'offre à nous et de la responsabilité que nous avons de la saisir.
Par ce flottement entre les lieux de l'esprit et du corps, le film nous intime à une audace sereine, à un courage timide. Le saut dans l'inconnu peut n'être parfois qu'un simple pas. Et c'est ce que ce film réchauffe-cœur nous apprend avec la plus infinie tendresse.