Ce gamin, là
6.8
Ce gamin, là

Documentaire de Renaud Victor et Fernand Deligny (1976)

Je n’ai cessé, durant l’intégralité du film, de m’interroger sur le pourquoi de la présence d’une narration, beaucoup trop conséquente il faut le reconnaître. Comment un type comme Deligny, que la parole n’avait guère intéressé (parce qu’elle est selon lui une grille avec l’autiste mutique) dans Le moindre geste, pouvait accepter de telles directives allant à l’encontre de sa façon de faire ? Comment Renaud Victor, qui chérissait Le moindre geste, avait eu l’idée saugrenue d’enrober le geste par la pédagogie ? La réponse est simple, évidente, mais je l’ai su après : François Truffaut produisait le film et imposa une voix off (Celle de Deligny, qui reprenait certains de ses commentaires de rushs voire de ses discours pédagogues) contre l’avis de Victor et Deligny. Ces derniers voulaient que le film dure cinq heures ; Truffaut refusa, évidemment, préférant le glisser dans un circuit commercial, d’autant que le film arrivait quasi dans la foulée de L’enfant sauvage. Bref, c’est dire combien les regards sont différents ; Combien être cinéaste c’est aussi faire marcher une industrie, ce que Deligny et Victor étaient loin d’être, dans leur chair. Il en résulte un film raté qui aurait pu être cinglant. Un film pour les circuits scolaires (j’exagère à peine) alors qu’il pouvait devancer les merveilles de Depardon et Wang Bing que sont San Clemente et A la folie. L’idée était géniale : Filmer les autistes dans un lieu loin des ambiances closes des hôpitaux auxquels ils ont l’habitude d’être cantonner ; Mais à l’inverse du Moindre geste, ne plus les filmer dans la solitude et la fuite, mais dans leurs interactions avec des accompagnants qui ne s’occupent pas d’eux mais sont à leurs côtés, effectuant des tâches quotidiennes. S’intéresser au chemin qu’ils parcourent durant leur journée et constater que petit à petit ce chemin se cale de plus en plus sur celui des accompagnants allant même jusqu’à reprendre et répéter certaines de leurs manies, comme des fous imitant des fous. Des gestes décisifs et coordonnées, sans aucune forme de langage verbal.

JanosValuska
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le 28 mai 2016

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