Bonheur, Evan est désormais un jeune papa ! Cet assistant social/psychologue d'un important établissement scolaire doit désormais jongler entre l'arrivée forcément un peu chaotique d'un petit être au sein de son couple, les différents dossiers de ses élèves violentés par un parent dans lesquels il s'investit personnellement et... sa vie nocturne de tueur en série où ils assassinent les parents en question.
Confronté à la peur de ne pas être à la hauteur de son nouveau rôle de père et à un élément de son passé lui rappelant ses failles d'enfance, Evan va s'adonner joyeusement à son activité de tueur jusqu'à se mettre lui-même en danger...


Sur le fond, cette nouvelle production Blumhouse ne raconte ni plus ni moins qu'une variante de "Dexter" (les bouquins de Jeff Lindsay et la série TV que l'on ne présente plus). L'ambivalence entre les apparences maintenues et la nature profonde du personnage, la méticulosité de son mode opératoire, son côté justicier/serial killer, ... Tout ce qui constitue de près ou de loin la personnalité d'Evan semble être une émanation des caractéristiques du plus célèbre expert en tâches de sang de Miami ! Même lorsque la situation va être amenée à mal tourner pour lui, cela nous ramènera invariablement à certains moments où Dexter Morgan jouait lui-même avec le feu.
Mais, visuellement, la comparaison s'arrête là car, en plus d'une tonalité bien plus noire qui ne laisse aucune place à la légèreté, le nouveau venu Henry Jacobson va plutôt aller chercher son inspiration du côté du cinéma américain 70's-80's mettant en scène des êtres pris au piège de leurs propres pulsions.


Alors, avec autant de références si explicites sur la forme et le fond, "Bloodline" réussit-il pour autant à faire entendre sa propre voix ?
Eh bien oui, durant sa première moitié, le film réussit vraiment à nous passionner quant à la découverte du quotidien de son tueur chamboulé par la présence de son enfant. Bien aidée par un formidable Sean William Scott (il est décidément très loin le temps des "American Pie") et une réalisation plutôt léchée, notre virée aux côtés d'Evan réussit à ne pas singer les modèles auxquels elle fait appel ! Mieux, elle construit avec efficacité le portrait de ce sombre personnage dont on devine la chute inéluctable tant sa fuite en avant dans ses activités sanguinaires pour échapper à sa vie de famille et à d'anciennes plaies non cicatrisées fait figure de bombe à retardement.


Mais, alors que l'on est plutôt confiant en "Bloodline", la deuxième partie va hélas briser notre optimisme en ne sachant plus vraiment quoi faire de son tueur pourtant très prometteur. Du moins, le film va se focaliser sur deux points importants, l'un en amont et l'autre en aval de l'existence d'Evan, sans réellement convaincre.
Le premier va être la construction de tout un mystère sur les origines du tueur qui habite le personnage, celui-ci va déboucher sur une révélation qui, par sa teneur un peu trop énorme à avaler, va venir briser la réalité dans laquelle le film voulait se maintenir et, peut-être pire, son impact ne sera pas aussi fondamental que voulu sur l'ensemble du film. Cela aura tout juste la fonction d'un levier, d'un simple instrument accentuant l'idée générale de "Bloodline" autour de l'instinct de conservation sans pour autant y être indispensable.
Cette thématique va bien entendu être au cœur du deuxième point et concerner la spirale autodestructrice dans laquelle Evan entraîne inconsciemment ses proches. Bizarrement, le film va se montrer extrêmement sage sur cet aspect, comme incapable d'aller au-delà de ressorts très attendus (et très "Dexteriens" en ce sens) avec l'anonymat de son meurtrier de plus en plus menacé. La conclusion aura beau nous sortir un rebondissement en adéquation avec tout ce qui a été développé auparavant, la volte-face qu'elle impliquera pour l'un des personnages sonnera aussi fausse que facile, comme si "Bloodline" avait oublié de construire quelque chose de décisif le concernant et, ainsi, nous permettre d'y croire vraiment.


En s'éparpillant entre passé et présent pour construire ces "liens du sang" qui lui tiennent tant à cœur, "Bloodline" n'aura finalement jamais su trouver un équilibre lui permettant d'exploiter pleinement la dynamique de son tueur en série pourtant si captivant à voir évoluer. Ce premier film d'Henry Jacobson reste très plaisant à suivre mais certaines de ses qualités laissaient clairement entrevoir quelque chose de bien plus grand...

RedArrow
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le 26 mars 2020

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