"Black moon" succède à "Lacombe Lucien" dans la filmographie de Louis Malle et c'est peu dire que ces adieux à sa première période française, déjà tournés en langue anglaise et avec un casting international dynamitent tout ce que l'auteur a pu faire précédemment. Tant d'audaces filmiques, de parti-pris étonnants emmènent le personnage principal, venant de nulle part, Lilly, dans un univers onirique, sauvage et raffiné, où la guerre des hommes contre les femmes fait rage. Le film date de 1975, année de la légalisation de l'I.V.G. Je trouve qu'il faut une vraie audace pour représenter ainsi le féminisme et ses détracteurs. La guerre demeure une toile de fond, un miroir que devra traverser Lilly pour être propulsée dans un monde sans logique, où les animaux et les végétaux parlent, (le must de tout ce monde sensible étant les fleurs qui gémissent quand elles sont écrasées) et où les êtres humains baignent constamment dans une atmosphère étrange. Leurs actes sont également toujours surprenants, Dans une gamme chromatique vert/marron/chair, la nature, peut-être le personnage principal, entre par les fenêtres d'une grande demeure, microcosme farfelu de la représentation du monde.
L'abolition de l'espace-temps confère à "Black moon" de magnifiques plans, comme tous ces moments de grâce dus à l'utilisation de la musique, jouée au piano ou chantée. "L'aura sonore" qui enveloppe chaque personnage contribue à faire du film un grand frère du cinéma de Mandico. Pour peu qu'on soit sensible à une certaine forme du cinéma du bizarre, à découvrir absolument.