Birdman ou (l'envol d'une ancienne gloire).

Quatre ans. C'est le temps qu'il aura fallu patienter pour voir un nouveau projet sur grand écran d'Alejandro Gonzalez Inaritu (21 Grammes, Babel, Biutiful), un autre grand venant tout droit du Mexique. Décidément, ils ont la cote ces réalisateurs Mexicains. Birdman marque les retrouvailles entre Inaritu et Naomi Watts, après l'excellent "21 Grammes". Inaritu s'est également entouré une nouvelle fois de Nicolas Giacobone, scénariste de "Biutiful", son précédent film.

Il aura fallu 30 jours pour tourner "Birdman" en plein coeur de Time Square, plus précisément au St. James Théatre sur Broadway. En plus d'avoir été un véritable défi pour le réalisateur (a été le film le plus compliqué à donner vie pour Inaritu), "Birdman" marque aussi le retour d'une ancienne gloire, Michael Keaton. Le choix de cet acteur est loin d'être anodin. Les parcours de Riggan Thomson (Michael Keaton) et Michael Keaton lui-même, sont très similaires. L'acteur américain a connu la gloire au début des années 90 en jouant le rôle de Batman dans les films de Tim Burton, avant de connaître un "passage à vide". L'année 2014 aura marqué son grand retour au cinéma, en jouant notamment dans "Robocop", "Need For Speed" et maintenant "Birdman".

Le film est atypique, tant au niveau du fond que de la forme.
Inaritu s'intéresse au succès et à son éphémérité. Comme quoi il est très volatil et que du jour au lendemain, n'importe qui peut retomber dans "l'anonymat" le plus total, ou presque.
Il s'agit presque d'une oeuvre biographique de Michael Keaton, voire même introspective. Je trouverai ça beau qu'il obtienne la reconnaissance suprême en remportant l'Oscar du meilleur acteur grâce à ce rôle: Une belle image et une sorte d'accomplissement. Ou quand la fiction dépasse la réalité.
Alors le film soulève également la question de l'égo, cette fierté que tout humain possède à vouloir absolument laisser la moindre preuve de son passage sur terre (dans le cas de cette oeuvre); cette envie incessante d'être reconnu et admiré par autrui...C'est un peu le souhait principal du personnage de Keaton: Ancienne icône, il veut redorer le blason en montant une pièce de théatre sur Broadway afin de retourner sur le devant de la scène.
Un sujet parfaitement mis en image dans cette oeuvre avec une dimension surréaliste omniprésente. L'ego de Riggan est si torturé qu’il a parfois bien du mal à distinguer ce qui est réel et qui ne l'est pas. Birdman serait le surmoi de Riggan, son alter-ego. Le film met en scène des échanges tendus entre les deux "personnages" et montre à quel point, ce que l'homme est prêt à faire pour arriver à ses désirs les plus forts et renaître de ses cendres, tel un phœnix.

Birdman possède une forme visuelle très complexe. Le film est déguisé comme un seul et même plan-séquence qui n'est pas sans nous rappeler "La Corde" d'Alfred Hitchcock. Alors comme ce dernier, le film n'est pas un seul plan-séquence. On peut y déceler facilement les vraies "coupes", mais c'est fait de manière tellement intelligente, que ça passe comme une lettre à la poste. Une maîtrise ahurissante au niveau de la mise en scène.
Ce parti pris au niveau de la mise en scène est pour appuyer davantage la dimension théâtrale du film (le théatre, l'un des principaux sujet du long métrage). Il semble y avoir une certaine connexion entre la mise en scène d'Inaritu et le théatre. Le fait de monter le film comme un seul plan-séquence montre qu'il n'y a qu'un seul point de vue possible, comme un spectateur regardant une pièce de théatre, ou bien que l'erreur n'est pas permise, puisque tout est réalisé en une seule prise (pièce de théatre et plan-séquence).
Mais pour ce qui est de ce faux plan-séquence, il semble y avoir des limites. Notamment le moment où Michael Keaton se retrouve sur Time Square en sous-vêtements: Entre sa sortie du théatre dans la rue, son parcours sur Time Square et sa re-rentrée dans le théatre, cela semble normalement impossible compte tenu du chemin parcouru par le héros. A juger par vous-même. Oui je chipote un peu, mais c'est juste pour dire que le film possède un défaut...

L'ensemble est appuyé par une bande-sonore signée Antonio Sanchez, considéré comme l'un des meilleurs batteurs au monde. Du coup, ça donne une certaine cohésion à l'ensemble: les mouvements de caméra (un véritable ballet), les dialogues captivants, les relations entre personnages (une troupe d'acteurs formidables), et j'en passe...le tout est rythmé par cette bande-son enivrante.

Birdman est la renaissance d'une ancienne gloire, qu'elle soit fictive ou réelle.

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le 18 janv. 2015

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Sawyer17

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