Dans le cochon, tout est bon.
Et dans "Beaucoup de bruit pour rien" (much ado about nothing)...aussi.

En fait, tout ce qui est important dans ce film est en état de grâce.

1) Le réalisateur: On ne la savait pas encore, mais Kenneth Branagh touchait là (déjà) le firmament d'une carrière alors encore fort prometteuse et qui se révèlera être fort décevante. Remarqué par un "Henri V" (1989) assez extraordinaire au moins pour son traitement inédit et pour la formidable pléiade d'acteur Shakespearien qu'il révèlera et porté par un Gérard Depardieu sous le charme qui produira la carrière française du film, Kenneth s'éloigne très vite de ses fondamentaux (les pièces du maître anglais) pour s'aventurer dans le polar ésotérique mouais-pas-mal-mais-peux-faire ("Dead again" 1991) et dans la buddy-comédie quelques-écueils-mais-quelques-moments-réussis ("Peter's friends", 1992).
En 1993 "Beaucoup de bruit pour rien" sera SON chef-ouvre, adaptation de William Shakespeare qu'il tentera d'ailleurs de reproduire au moins à deux reprises "Peines d'amour perdues" en 2000 et "as you like it" en 2006, mais sans le même succès, et de loin.
Il alternera le bon ("Hamlet", encore et toujours de Shakespeare, mais cette fois sans l'aspect musical, propre aux films cité précédemment, sur près de quatre heures) et le franchement moins bon "Frankenstein" qui sera aussi pour la carrière de Bobby De Niro le début d'une longue et presque infinie descente aux enfers.

2) les acteurs: Keanu Reeves dans une pièce anglaise de 1600 ? Yes Sir !
Denzel Washington en prince maure ? Why not ? Michael Keaton en garde fou à l'élocution improbable ? Oh, my godness ! Si le reste de la distribution est plus Shakespearement correct (Kenneth en tête, en face de madame Branagh de l'époque, Emma Thompson), l'ensemble fonctionne à merveille et concourt à la réussite de l'ensemble. La troupe s'amuse et c'est communicatif.

3) le "scenario original": Ben, c'est à dire, c'est William, donc, et le texte, léger et drôle, se savoure de la première à la dernière réplique.

4) la musique: Patrick Doyle nous offre un BO parfaite qui (em)porte l'ensemble vers des sommets de plaisir et de délicatesse, du "Sigh no more ladies" inaugural jusqu'aux thèmes principaux qui nous donne l'irrésistible envie de chevaucher aux côtés des héros, aimer avec eux, pleurer avec eux, hurler sa joie d'être heureux de vivre avec eux.

Le résultat est un plaisir immense, une jubilation infinie, fruit naturel de l'alchimie miraculeuse de tous ces éléments, dont Kenneth Brannagh fut, le temps d'un film en apesanteur, le sorcier génial.
guyness

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