Tous ceux qui me connaissent bien, savent que j’aime beaucoup le cinéma de Tim Burton, le seul, le vrai, l'unique ... celui des années 90, ou tout du moins jusqu'à Sleepy Hollow (la suite de sa carrière, c'est une autre histoire). Pour moi, le style de Tim Burton transcende largement les défauts du film, à commencer par un scénario rempli de facilités et d'incohérences. Mais peu importe, il se dégage une telle magie et une telle poésie de ce film. À bien des égards, Batman Lé Défi c'est comme un film d’épouvante qui donne les premiers rôles aux monstres, créatures et autres marginaux, le tout enrobé d'humour noir.

Comme pour le premier Batman, Tim Burton fait encore de nombreuses références à d’autres films, mais au lieu d'invoquer Vertigo (1958) et Star Wars (1977), il invoque ici des films comme Charlie et la chocolaterie (celui de 1971, avant qu'il ne réalise le remake), Eléphant Man et les films de zombies. On y décèle également dans son esthétique gothique, une grande influence du cinéma expressionniste allemand (Faust, Metropolis, Nosferatu ...), ainsi que des films de la Hammer (Frankeinstein, Dracula, Le Chien de Baskerville ...), à leur tour glorifié (l'ambiance macabre) et parodié (le ton ironique).

Batman Le défi est un film parfait à regarder pendant les fêtes de fin d'année, car l’atmosphère de Noël que Tim Burton imagine pour Gotham City, est merveilleuse. L'ambiance sombre, gothique et fantastique du film est géniale. De plus, il a eu la bonne idée de filmer Gotham enneigé, conférant une atmosphère étrange au film. L'ambiance sombre de la ville se marie étonnamment très bien avec la blancheur de la neige. C’est surprenant que la Warner ait décidé à l'époque de sortir ce film en été, labélisé comme un blockbuster estival ... ça sentait l'échec assuré au box-office et ça n'aura pas loupé, malheureusement !

Ce qui est encore plus étrange, quand on considère l'esthétique et l'ambiance "dark" du film, c’est qu’il était vendu comme un film familial. Un couple de la classe supérieure jette leur bébé monstre dans les égouts. Un milliardaire sociopathe s’habille en cuir noir comme un mammifère volant et nocturne (Michael Keaton aka Bruce Wayne/Batman). Une secrétaire solitaire a une dépression mentale et s’habille en cuir noir comme un félin (Michelle Pfeiffer aka Selina Kyle/Catwoman). Devenu adulte, le bébé monstre se présente en politique au poste du maire de Gotham (Danny DeVito aka Oswald Cobblepot/Le Pingouin), tout en étant soutenu par un magnat des affaires semblable à un Trump toujours plus avide de pouvoir (Christopher Walken aka Max Shreck). Sans parler du sous-texte SM que Tim Burton a réussi à insuffler au film. L'univers gothique de Tim Burton correspond parfaitement à Batman et c'est (selon moi) le sommet de sa carrière (avec Edward aux mains d'argent). Voici Tim Burton et son style "Burtoneste".

C’est une véritable incarnation en live-action du personnage de DC Comics et Tim Burton aurait vraiment dû être conservé sur la franchise, pour la garder sur la bonne trajectoire, au lieu qu’elle ne s’écrase sous la direction de Joel Schumacher. Christopher Nolan réussira l'exploit de ressusciter la franchise, mais je préfère la vision "film de monstres" et conte fantastique des Batman de Tim Burton. Le Dark Knight de Christopher Nolan est plus réaliste et adulte. Plus généralement, tous les films de Christopher Nolan se prennent très, très au sérieux ... trop au sérieux. Ils sont souvent déprimants, austères et dénués d'humour, alors que l’approche de Tim Burton et de la série animée qu’elle a inspirée (Batman animated de Paul Dini et Bruce Timm), est plus dans le style conte fantastique, ce qui correspond mieux à Batman. C'est pourquoi Batman Le Défi continue de résonner en moi et de conquérir de nouveaux fans, encore aujourd'hui.

Encore plus sombre et plus violent que le premier Batman, Batman Le Défi repousse les limites du pathos gothique. Il atteint même un nouveau sommet dans le genre. J’étais très enthousiaste à l’égard de Michael Keaton dans le rôle de Bruce Wayne, il affichait le bon équilibre entre l'homme d'affaire solitaire (et bizarre) et le chevalier noir très cool. Bruce Wayne/Batman, c'est un personnage très "en dedans", qui parle moins qu'il n'agit. Le génie de Tim Burton (et de Michael Keaton) réside dans le fait qu'il a su lui faire dire l'essentiel pour nous faire comprendre sa souffrance intérieure. J'ai toujours trouvé que la force de l'univers des Batman, c'est qu'on en vient limite à plus s'attacher aux méchants qu'au héros et ça, Tim Burton l'a bien compris. L'attirance sexuelle entre Bruce Wayne/Batman et Selina Kyle/Catwoman, fait très clairement allusion au sadomasochisme, ce qui renforce le coté ambiguë et torturé de personnage, qui doit aimer les femmes complètement barges et psychotiques.

Michelle Pfeiffer est incroyable dans le rôle de Selina Kyle/Catwoman. Elle évolue dans une société où la femme n'est pas respectée, où la femme est tout simplement prise pour une conne, puisqu'on ne lui attribue que des rôles de subalternes (encore plus vrai pour cette pauvre Selina Kyle). Sous les "traits" de Tim Burton, dans sa tenue en Latex moulante laissant voir toute ses formes, Catwoman est une icône sexuelle ultra-sexy. Elle nourrissait mon fantasme d'adolescent de quatorze ans (à l'époque). C'est une vision d'homme de la femme et pas sûr que ça participe à leur libération. Son jeu, son air, ses mimiques, sa folie et en même temps sa fragilité, nous captive. Une prestation qui n'est pas évidente à jouer, passant constamment du rire hystérique aux larmes. Elle bouffe littéralement l'écran, surtout lorsqu'elle est filmée en gros plan avec ses yeux qui vous hypnotisent. C'est dingue tout ce que l'on peut voir à travers son jeu ! Aucun doute possible, Michelle Pfeiffer c'est la Catwoman la plus marquante et de loin la mieux interprétée (Anne Hathaway peut aller se rhabiller).

Danny DeVito est tellement convaincant dans le rôle du Pingouin, que ses scènes deviennent quelque peu dérangeantes à regarder. Et puis, le personnage me touche beaucoup. Je verse toujours une petite larme, lorsque ses congénères le transporte dans son ultime scène finale (en mode cortège funèbre). Quand on pense à tout ce qu'a subi ce personnage depuis sa naissance, on ne peut qu'être ému. Tim Burton ne fait pas des méchants qui sont juste méchants, il nous les fait aimer, voire même il nous les fait préférer à Batman lui-même ! Mention spéciale à Christopher Walken, qui est brillant dans le rôle de l’effrayant Max Shreck, un personnage détestable qui mérite d'être détesté.

Les compositions de Danny Elfman sont encore meilleures que dans le premier Batman et ici, pour le coup, on nous épargne les thèmes/chansons horripilantes de Prince. La BO de Danny Elfman est plus puissante et correspond mieux à l'univers de Batman que tout autres compositeurs, n’en déplaise à Hans Zimmer, qui remplit parfaitement le cahier des charges pour les films de Christopher Nolan, mais sans aller au delà. Danny Elfman a donné à Batman une aura sonore qui est devenue mondialement connue et ce sera pour toujours le seul, le vrai, l'unique thème de Batman.

Batman Le Défi est un incontournable pour tout fan de Tim Burton. C'est mon aventure préférée du chevalier noir, voire même mon film de super-héros préféré. Tenez-vous-en à la série animée et oubliez les suites. Après le passage catastrophique de Joel Schumacher, Christopher Nolan a redonné de la respectabilité à la franchise, mais c'est Tim Burton a donné le ton à la série originale. Cette incarnation tordue du personnage me manque. En termes de visuels et d’atmosphère générale, c'est un gros 10/10.

lessthantod
10

Créée

le 12 juin 2023

Critique lue 97 fois

16 j'aime

28 commentaires

lessthantod

Écrit par

Critique lue 97 fois

16
28

D'autres avis sur Batman - Le Défi

Batman - Le Défi
DjeeVanCleef
10

La féline.

Après son Edward et ses mains d'argent, Tim Burton revient faire un tour dans l'univers qu'il avait mis en images avec le premier Batman, et le truc sympa, c'est que le Timothy enlève, cette fois,...

le 20 mai 2013

105 j'aime

21

Batman - Le Défi
Docteur_Jivago
9

Miaou

Trois ans après la réussite Batman, Warner Bros confie à nouveau le super-héros à Tim Burton, d'abord réticent (surtout que les producteurs voulait ajouter le personnage de Robin) mais qui accepta...

le 10 nov. 2014

66 j'aime

7

Batman - Le Défi
Gand-Alf
10

Masks.

La première aventure cinématographique mise en scène par Tim Burton ayant engrangé un sacré paquet de pognon à travers le monde, la Warner décida de laisser les pleins pouvoirs au cinéaste, à la base...

le 30 déc. 2015

56 j'aime

1

Du même critique

Kaamelott - Premier Volet
lessthantod
7

À un moment, il monte à une tour ...

Tout d'abord, je précise que j'aime Kaamelott dans son intégralité et que par conséquent, j'adhère totalement à l'évolution de la série et à son changement de ton entre les quatre premiers livres,...

le 22 juil. 2021

38 j'aime

28

Le Cercle rouge
lessthantod
8

Et n'oubliez jamais ... tous coupables !

Le cercle rouge est le douzième et avant dernier film de JP Melville et c'est un film que beaucoup considèrent encore aujourd'hui comme son chef d'œuvre absolu. C'est aussi un film qui a marqué les...

le 15 août 2021

37 j'aime

19

Les Bonnes Étoiles
lessthantod
6

Les inadaptés

Les Bonnes étoiles est le dernier film de Hirokazu Koreeda, un drame social touchant qui repose beaucoup sur son ambiance très soignée et sur un casting vraiment très bon, en premier lieu Song...

le 12 déc. 2022

35 j'aime

2