Assaut
7.5
Assaut

Film de John Carpenter (1976)

Pire que les zombies : les bandes de jeunes dans les 70's.

Scénario
Vous connaissez le cliché du "plus qu'un jour avant la retraite" ? Celui où lorsqu'un flic dit cette phrase, on est sûr qu'il va passer la pire journée de travail de sa vie. Et bien, ce film, c'est le "plus qu'une nuit avant la retraite" mais avec un commissariat.


Où comment une poignée de personnes : un flic, deux standardistes et deux prisonniers tentent de faire face à une horde de zomb.... de predat.... de jeunes. Des jeunes ultra-vénère qui tentent d'assaillir un pauvre vieux commissariat (et d'un type ayant tué l'un des leur) durant quelques heures.
En même temps, quand on porte le numéro 13 faut pas s'étonner de ne pas porter chance.


Ce film fait partie de mon "rattrapage culturel" version "un réalisateur = un film"



En tant que sujet d'étude :



Assaut (ou "Assault on the precinct 13") est le film j'ai pris afin d'étudier le cinéma de John Carpenter un réalisateur dont j'avais juste vu deux ou trois films (Christine, Le villages des damnés , L'homme invisible , Los Angeles 2013 ... ce qui fait au final un petit paquet) et encore, en faisant autre chose. (Lorsque j'étais ado ça m'arrivait souvent de bosser avec la télé en fond, ce qui fait que j'ai pas des souvenirs très vagues de certains des films que j'ai vu.)


Le fait est qu'il s'agit non seulement d'un de ses premiers film mais aussi du film qui l'a fait connaître. Il faut dire qu'on est sur une production réalisée en 25 jours avec un budget limité sur lequel Carpenter était à la fois scénariste, producteur, réalisateur, monteur et compositeur de la B.O. Bref : du travail perso, qui fit une sacré carte de visite. (Ceci dit le monsieur est un touche à tout qui a l'habitude des tournages rapides.)


Qui dit budget limité dit nombre d'acteur limité et décors limité, et si Carpenter dira s'être inspiré du film Rio Bravo (merci du spoil John, ce film était dans ma liste de films à voir) le scénario est un base under attack : des personnages enfermés dans un lieux donnés vont devoir collaborer ensemble afin d'affronter des forces à l'extérieur qui tentent de les attaquer. Ce procédé était notamment beaucoup utilisé dans les épisodes de Doctor Who de la fin des années 60, mettant en scène le deuxième Docteur, et permettait de mettre en scène des personnages dans une base spatiale attaqués de l'extérieur par des Cybermen. Comme c'est un dérivé du huis-clos, l'utilisation de l'unité de lieu et du peu de personnage est parfaitement justifiée.


Pour faire un bon "base under attack" il faut que le point de vue se focalise quasi exclusivement sur les personnages à l'intérieur : qu'il fasse preuve d'héroïsme, qu'ils aient un passé, des conflits entre eux. Ce à quoi sert la première demi-heure du film, qui prend vraiment le temps d'expliquer qui sont les personnages et se focalise sur trois groupes : le policier dont le premier jour de travail va consister à surveiller le commissariat, les condamnés à mort qui vont se retrouver par inadvertance dans les geoles, et le "monsieur-tout-le-monde" qui va se retrouver à tuer le membre d'un gang de dangereux voyous. Celui-ci ne devient, une fois qu'il a franchi les portes du commissariat qu'un Macguffin. C'est un objet à protéger pour les personnages à l'intérieur, à détruire pour ceux de l'extérieur.


Pour faire un bon "base under attack" il faut aussi une force assaillante qui soit mystérieuse : il faut qu'elle puisse arriver de nulle part, qu'on ne sache jamais ce qu'elle prévoit de faire et qu'on ai aucun remord contre elle quand elle se fait attaquer. Il faut qu'à l'image d'un essaim, cette force ne soit qu'une partie d'un tout. Le cinéma moderne a trouvé une image parfaite dans les personnages de zombies : des monstres sans cervelles dont le seul but est juste de tuer ce qui n'est pas comme elle. Mais on peut trouver d'autres substitut : des indiens de western, des bandits, des zergs, des Cybermen, des Yetis télécommandés (merci le Doctor Who des années 60 pour cet exemple absurde.)


Ici, la force extérieure est celle d'une bande de jeunes voyous. Il y a dans le cinéma des années 70 un sorte de moment où la racaille de la rue était une sorte de menace toute puissante : ils tuaient les amis de Charle Bronson, ils avaient tous les pouvoirs face à Harry Callahan, ils se nichaient près du Taxi de De Niro. C'était une sorte de "cible acceptable" pour l'Amérique de Nixon. Ici, Carpenter tape fort, car non content d'attaquer le conducteur d'un camion de glace pour une raison inconnue, ils abattent froidement une petite fille qui demandait une glace. Niveau acte gratuit, ça se pose là, mais c'est diablement efficace. (La scène a valu le film d'être censuré ou d'avoir un PG 17.)


Et pour le coup, la menace est aussi intéressante que ses motivations sont floues : veulent-ils venger les 6 jeunes abattus plus tôt ? Sont-ils là pour retrouver l'homme qui a abattu l'un des leurs ? Pourquoi tuent-ils de sang froid n'importe qui ? On ne le saura vraiment jamais. Les attaques sont brèves, venant de coin noirs, de lieux qu'on pensait vide et font des bruits de silencieux. C'est une constante dans le cinéma de Carpenter : Le mal inexplicable, qui semble impossible à vaincre (comme ces voyous qui réapparaissent d'on ne sait où.)



Mon avis personnel :



J'aime bien quand les films sont de la bonne durée et qu'en une heure et demi, les mecs ont posés tout ce qu'ils avaient à faire. J'ai parfois pesté contre des films qui manquaient d'originalité et on m'avait répondu "moi je trouve que c'est plus un film efficace."


Non, Assaut, ça c'est un film efficace. Même si le fameux "assaut" ne met qu'une demi-heure à arriver, une fois qu'on est dedans, tout fonctione. Le film est presque même en temps réel, puisque l'attaque commence sur les coups de 20h et la situation est déjoué vers les 21h.


Et le film ne lanterne pas inutilement : les personnages ne parlent souvent que pour commenter la situation, émettre des plans ou des hypothèses. Pas de blabla pour savoir s'il faut ou non sortir les deux condamnés à mort de cellule, pas d'engueulades inutiles, pas d'états d'âmes longuet . Certains trucs passent même par le regard, comme lorsque le personnage d'Ethan Bishop file un fusil chargé à Napoleon et s'aperçoit juste après qu'il vient de donner une arme à un type qui était détenu il y a même pas deux minutes dans sa prison.


Ce qui est dingue lorsqu'on sait que Carpenter dit lui même qu'il n'aime pas écrire des scénarios. (Et qu'il fait rarement des stoyboards.) Toutefois, cette façon d'aller directement au point, de ne garder que l'essentiel et de faire jouer les acteurs à l'instinct est tout à fait ma came.


Idem, sur les 4 personnages principaux, deux d'entre eux sont des noirs et l'une d'entre elle est une femme et le film semble dire "bah quoi ?" Là encore, l'utilisation d'acteur totalement inconnus m'a empêché de faire des prédictions du style "lui il va survivre et pas lui." Là encore, Carpenter montre sa passion pour les personnages d'anti-héros un peu cliché.


Personnellement je m'attendais (vu le nom de Carpenter) à ce que le film soit plus horrifique que ça, mais en réalité, il n'est pas très gore (on a juste quelques giclés de sang) et n'utilise jamais le jump-scare (alors que ça en est un des inventeurs.) De plus, l'utilisation de tirs de silencieux rend le tout presque doux. Voire même, hélas, un peu ridicule, quand on sait le vrai bruit que fait un silencieux.


Bref, je comprend vraiment pourquoi il a non seulement gagné un statut de film culte, mais aussi deux remake (que je ne vais pas regarder.) Par contre, je crois que je vais regarder d'autres films de ce réalisateur culte.

le-mad-dog
7
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le 18 août 2018

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Mad Dog

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