As I Was Moving Ahead, Occasionally I Saw Brief Glimpses of Beauty par FrankyFockers

L'oeuvre entière de Jonas Mekas est un long journal intime filmé au fil des ans. A son chef, un long - mais court - film de 5 heures, au titre aussi poétique qu'énigmatique : "as i was moving ahead occasionally i saw brief glimpses of beauty".
Qu'est-ce que ça raconte ? Pas grand chose et toute une vie en même temps. Sans lien apparent, sans aucun souci chronologique, Mekas a pioché dans ces centaines et centaines d'heures de bandes les plus beaux moments de bonheur et de joie de sa vie. Et les as montés ensemble, patiemment, avec sa technique incessante du cut-up burroughien où chaque plan saute, est amputé, comme s'il avait découpé chaque centimètre de pellicule aux ciseaux. Il filme sa femme, il filme ses enfants, leur naissance, leurs premiers pas, leurs jeux. il filme sa famille, ses amis, les repas, les rues de new-york sous la neige, les picnics à central park au printemps, les vacances en provence. La plupart des images du film proviennent des années 70. Mekas les monte en 2000, il a alors 70 balais, et il se souvient de sa vie, sans nostalgie mais avec énormément de tendresse et d'amour. Il écrit à un moment sur l'un des nombreux panneaux du film qu'il s'agit d'un film où les gens ne se battent pas, ne se disputent pas, mais s'aiment. Il dit aussi que c'est un film politique. où encore que ce film ne raconte rien. ça dure 5 heures, un claquement de doigts en somme, un bref instant dans une vie d'homme. Mais en ce bref instant, tout le bonheur, toute la beauté de la vie de Mekas nous sont racontés, montrés, littéralement donnés à voir. ça dure 5 heures, mais ça pourrait durer 7, ça pourrait durer 10 heures. ça pourrait durer toute une vie en somme, parce que Mekas parvient à faire péter la frontière entre sa vie et la nôtre, et on l'accompagnerait bien encore, aussi longtemps que sa vie, la nôtre, nous le permettrait.