C'est l'histoire d'un jeune de mon âge qui mène une vie vraiment difficile : habiter un T3 dans un quartier sympa de Paris (parce que les rails de la Gare du Nord c'est trop bohème pour faire des images de générique), être beau gosse avec un regard langoureux (ça évite souvent d'être bon comédien), revendre du shit à des gosses de riches avec une simplicité déconcertante (pourquoi j'y ai pas pensé avant? ça a l'air facile, dealer dans le 18e, zéro embrouille), avoir un cousin qui a prévu de monter un resto à Tel-Aviv, tomber amoureux d'une fille sympa, être juif sans trop en avoir grand chose à faire, et décider d'un coup sans prévenir de vouloir partir avec son cousin à Tel-Aviv parce que la vie de dealer parisien dans un T3, c'est vraiment trop insupportable.

Du coup, il doit apprendre l'hébreu, faire son Alyah (ça veut dire être aidé par Israel en tant que juif pour aller vivre en Israel), récolter 15000 euros pour participer au projet de Tel-Aviv et donc se mettre à vendre de la coke, plus rentable. Aussi, il est obligé de quitter son amoureuse puisqu'elle a décidé, elle, de rester à Paris (mais comme elle l'aime, elle souffre).

Ca a l'air intéressant, vu comme ça. Du moins, ça a l'air original. On se dit : c'est un sujet fort, faire son Alyah, il y a des modalités administratives un peu absurdes, une réflexion possible sur la religion, les raisons de ce départ, il y a de la matière (et ça, pour un film, c'est important).

Première image, on se dit : Ah, ça va bientôt commencer, chouette. J'aime bien la musique déjà, et puis c'est des images de mon quartier sur l'écran, je reconnais la terrasse où je vais tout le temps. C'est cool.
Une minute après : C'est pas mal cette lumière blanche, laiteuse, et l'extérieur bleuté, un peu comme le drapeau d'Israël. Pourvu que ce soit justifié.
Une minute plus tard : Mais pourquoi ils jouent si mal, les gens? (patience, c'est peut-être un style, il cherche un ton, ça va se fluidifier, c'est dur d'être comédien en même temps, ou alors c'est les dialogues, mais quand même, ils jouent vraiment mal).
Une demi-heure plus tard : C'est quoi qui le pousse à vouloir partir en Israël en fait ? (Patience, il y a peut-être une raison cachée qui va éclater comme une révélation à un moment donné, ça fait souvent ça dans les films).
Une heure plus tard : C'est qui le barbu déjà ? Oh, il saigne. Il va se passer un truc de ouf, un règlement de comptes, en fait il va mourir et personne pourra partir en Israël. C'est bon, j'ai deviné.
Cinq minutes plus tard : Ah, ben non. En fait c'est juste un prétexte pour trouver encore plus d'argent, pour sauver son cousin, ou son pote, enfin le barbu quoi.
Avant la fin : Adèle Haenel, heureusement qu'elle joue bien. Pourquoi il reste pas avec elle à Paris ? En plus il arrive toujours pas à apprendre l'hébreu. Elle aurait tous les arguments pour le retenir, mais elle a pas l'air de les connaître. C'est bizarre.

Générique : Je doit être insensible à l'art, j'ai pas compris pourquoi il voulait partir en Israel, ni même à quoi ça servait dans l'histoire qu'il soit juif. Ah, c'est peut-être parce que le réalisateur avait un budget pour aller tourner deux séquences en Israel? Ouais, ça doit être ça. Et puis, il a dû être sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs parce qu'on voit des soldats israéliens pendant une minute, ça évoque la guerre, la noirceur du monde et la capacité du cinéma à réconcilier les peuples, tout ça.

Attention, j'ai quand même mis 3/10 parce que le film est en harmonie avec la nouvelle nouvelle vague française : le cinéma à l'eau de javel. Et ça, c'est une marque forte de personnalité. Les gens sont beaux, bien habillés, ils ne se rongent pas les ongles et ne crachent pas par terre, les murs sont propres et personne ne va jamais aux toilettes. D'ailleurs, ils sont obligés de s'inventer des problèmes pour se remplir l'existence et se sentir proches des gens qui ont des problèmes. Sauf qu'on y croit pas une seconde.
Sfistole
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le 10 juin 2012

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