Nul doute que les nombreux aficionados de Gunnm ont dû craindre le pire avec Alita: Battle Angel, projet d’adaptation de longue date longtemps resté entre les mains rassurantes (pensons-nous) de James Cameron. Mais accaparé qu’il était par la mise en œuvre des films Avatar, sa réalisation revint finalement à Robert Rodriguez, faiseur notoire ayant à son actif une ribambelle de navets et ne devant son salut qu’à des fulgurances associées (de près ou de loin) à Quentin Tarantino.
Nous concernant, le fait de ne pas avoir lu le manga culte de Yukito Kishiro nous assurait une absence de biais préjudiciables, tout en gardant à l’esprit les ambitions notoires de celui-ci. Ce contexte de visionnage explique donc pourquoi Alita: Battle Angel paraît si bien s’en sortir, au point de nous intimer l’envie et curiosité de découvrir sa suite qui, espérons-le, verra le jour ; gardons toutefois à l’esprit que sa réussite est relative, le long-métrage ayant surtout le mérite de s’accommoder au mieux de grosses ficelles, tout en proposant un décorum de science-fiction dystopique plaisant.
Ce malgré une thématique somme tout banal, le concept de « ville du haut » et « ville du bas » ayant fait ses armes dans pléiade d’œuvres telle l’influente Metropolis : dans le cadre plus moderne d’Alita, son décorum postapocalyptique rime avec biomécanisme, conquête spatiale et loi du plus fort, pareil à une jungle futuriste diluant éthique et morale dans une effervescente démonstration technique. De fait, le film brille surtout sur le plan graphique, d’abord parce qu’il est plutôt inspiré (pour un rejeton de l’industrie hollywoodienne), ensuite par son sens de l’action, savamment mise en scène et fluide à souhait.
Une manière rêvée de coller à l’imagerie créative et musclée véhiculée par le manga, et ainsi d’employer avec un tant soit peu d’intelligence un budget plutôt pharaonique. Certes, tout n’est pas parfait à commencer par le manque d’envergure criant des lieux, chose allant de pair avec le déroulé accéléré du récit (deux petites heures paraissent bien peu pour couvrir autant d’événements), mais l’inventivité de ses chara-designs et sa violence (même atténuée) abonde un écrin se tenant.
Sans surprise, c’est du côté de l’intrigue pure qu’Alita: Battle Angel bat surtout de l’aile, outre sa propension à courir après le temps : ses ébauches de mystères ne tiennent pas debout, de l’ambivalence superficielle du brave Dr Ido à la volte-face (dérisoire) de Chiren, en passant par les remords accommodants et prévisibles de Hugo, tout concourt à alimenter un récit globalement prévisible et ainsi à diminuer la portée de ses enjeux. Manichéen comme pas deux en finalité, à moins que sa suite hypothétique ne redresse la barre.
Cependant, gardons à l’esprit qu’Alita: Battle Angel s’en sort déjà dignement, de sorte à composer un divertissement engageant et ludique : au regard de la palanquée d'étrons que nous pond Hollywood, c'est heureux.