On se souvient du quatrième opus de la saga Alien qui composait une Ripley hybride, en communication avec les créatures qu’elle combattait jadis. AVP : Alien vs. Predator prolonge ce croisement interdit entre humains et extraterrestres par le biais d’une alliance des plus surprenantes, pour ne pas dire grotesques, qui intervient à mi-parcours et fait basculer le film depuis un survival archéologique plutôt entraînant dans un n’importe quoi lui aussi récréatif, à condition de laisser de côté la rigueur chirurgicale qui définissait les œuvres originelles. Paul W.S. Anderson propose une forme hybride qui essaie de tenir en équilibre l’action ébouriffante et le nanar de série Z, livre ainsi une série de séquences fortes qui savent élaborer un suspense et immerger le spectateur dans le chaos de cette pyramide labyrinthique qui se désarticule comme un jeu de plateformes.


Dit autrement, le long métrage fascine par la frontalité avec laquelle il mêle les mythologies et leurs écritures, confond les civilisations et leurs symboles, confronte deux monstres sacrés du cinéma d’horreur, allant jusqu’à rallier le personnage interprété par Alexa Woods à la cause d’un Predator samouraï qui se blesse de l’acide de ses victimes comme autant de trophées de chasse. Anderson communie dans la bêtise et la loufoquerie, convie son spectateur à une lutte ancestrale, bestiale et primaire qu’il coupe de toute intelligence. Car ce qu’il fait n’est rien d’autre que réécrire l’Histoire de l’humanité non plus par le biais de la Tour de Babel mais, au contraire, par le prisme de tunnel creusé dans la glace qui descend à la pyramide qui elle-même descend le long d’un puits dans une pièce inférieure. Le mouvement du film est celui d’une dégradation, et son geste artistique n’est qu’action gonflée aux effets numériques très réussis, en témoigne la séquence magistrale de poursuite dans la carcasse d’une baleine.


Et si le résultat ne s’avère qu’à demi réussi – puisque nous ne pouvons nous empêcher de rire devant ces acteurs en costumes de Predator qui se déplacent avec disgrâce, et des situations incongrues dans lesquelles collaborent Alexa et le Predator samouraï –, saluons l’effort du réalisateur d’avoir cherché à s’écarter de l’esthétique des films originaux pour proposer autre chose, un divertissement dont la régression intellectuelle touche à ce fond de bestialité primitive enfoui non plus seulement en l’homme mais dans le vivant, terrestre et extraterrestre à la fois. La bastonnade comme acte de naissance de l’Histoire, des civilisations et des cultes.

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le 27 nov. 2020

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