A Perfect Day met en scène un groupe d'humanitaires durant la fin de la guerre de Bosnie en 1995. Dans le film, cinq protagonistes, aux caractères et origines variés, sont amenés à rechercher une corde pour déloger un cadavre tombé dans un puits d'eau douce, source d'alimentation des villageois locaux. Loin de jouer sur l'aspect mélo qu'on pourrait attendre d'un tel sujet, Fernando León de Aranoa nous montre le quotidien de ces personnes dans toute sa banalité.


Paradoxalement, l'héroïsme et l'humanisme ne semblent avoir aucune prise sur la situation, bien plus compliquée qu'elle pourrait en avoir l'air. Le personnage de Mélanie Thierry, idéaliste, volontariste, vit difficilement sa confrontation à la mort, à l'absurdité des situations et à sa propre impuissance. C'est elle qui semble la moins adaptée à cette mission, là où les aventuriers roublards Benicio Del Toro et Tim Robbins, plus détachés et pragmatiques, semblent nettement plus dans leur élément (toutes proportions gardées). Tous les acteurs étrangers au conflit, aides humanitaires et ONU, n'ont finalement que peu de prise sur la situation du pays et de ses populations, que leur volonté soit bonne ou qu'ils se contentent d'obéir aux ordre. Ce n'est pas grâce à eux que se règlera la situation.


Le film n'est pas cynique pour autant ; ce constat, il le dresse avec une certaine amertume, sans sombrer dans la noirceur. La tonalité est à l'avenant : si certaines scènes restent sombres, la plus grande partie du film adopte un ton neutre et s'autorise même une certaine légèreté, façon road movie, avec un humour qui fait souvent mouche. C'est peut être cette même légèreté qui, dans un même temps, empêche le film de se détacher particulièrement : certains aspects, comme la bande son pop-rock ou la romance qui lie deux des principaux personnages, sans être déplaisants ou agaçants, restent dans le registre du divertissement hollywoodien assez classique.


Cette atmosphère reflète malgré tout de façon honnête l'état d'esprit de ses protagonistes et du réalisateur lui-même, qui s'est basé sur son propre vécu pour réaliser le film. Lorsque les temps sont sombres, l'humour et l'optimisme sont une arme et une bouée de secours, ce qui est posé ici sans faire de chichis, sans nier les difficultés rencontrées ni adopter un ton moralisateur.

Moonrise
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le 1 mars 2016

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