Après des centaines de pages d’intrigue et huit ans de publication, le dernier tome de « L’arabe du futur » est finalement sorti. Véritable best-seller, bien au-delà de la sphère de la bande-dessinée, cette autobiographie nous aura tenus en haleine en présentant la déchirure familiale qu’a vécu Riad Sattouf, entre sa mère bretonne et son père syrien. Le tout paraît toujours chez Allary Éditions pour près de 150 pages de lecture.


La force de « L’Arabe du futur » est de terminer ses tomes sur de gros cliffhangers qui donnaient furieusement envie de lire la suite. Comment gérer cela pour un tome final ? Quelle révélation nous attendait ? Rien de tout cela, ce tome étant fondamentalement différent des autres.


La série avait construit son succès sur la présentation du Moyen-Orient. D’ailleurs, c’est le sous-titre des ouvrages. On s’était déjà éloigné de cela après le retour en France. Pour ce sixième tome, cela est encore plus vrai. Le livre se concentre sur le personnage de Riad qui tente de se construire en tant qu’adolescent, puis adulte, dans une famille explosée. Il essaie de mettre à distance son père en Syrie, son petit frère enlevé, sa mère dépressive qui tente tout pour retrouver son fils… Riad se fraye un chemin, non sans en ressentir de la culpabilité.


Plus introspectif, cet opus nous montre le parcours de dessinateur de Riad Sattouf, de ses études jusqu’à ses débuts dans le cinéma. Sa notoriété grandit. Pour l’amateur de cet auteur, ou de bande-dessinée, c’est fascinant. On voit comment sa carrière se fait : les rencontres, les échecs, les difficultés, les réussites… Évidemment, plus on connaît les œuvres de Sattouf, plus cela a d’intérêt.


Au-delà du côté « BD », Riad Sattouf raconte sa psychanalyse et ses rêves. On voit tout le cheminement qu’il a dû faire pour encaisser sa jeunesse chaotique. Ces moments sont plutôt réussis et plein d’espoirs. Et si le père est absent physiquement de l’ouvrage, il a élu domicile dans le crâne du jeune Riad. La psychanalyse permet de le mettre à distance. Une nouvelle fois, Riad Sattouf trouve de bons moyens de narration pour exprimer certains aspects abstraits.

Au niveau du dessin, il n’y a pas de surprise. Le trait de Riad Sattouf est simple, expressif et efficace. Ses choix restreints de couleur fonctionnent et permettent de renforcer certaines scènes et de caractériser les lieux. La lecture est d’une grande limpidité et est sans doute pour beaucoup au succès de cet ouvrage au-delà de la sphère BD.


« L’arabe du futur » se termine en 2011, année du printemps arabe en Syrie. Un peu après, Riad Sattouf se lancera finalement pleinement dans ce projet autobiographique maintes fois repoussé. Grande série autobiographique, certainement parmi les plus importantes de la bande-dessinée, elle a pleinement mérité son succès.

belzaran
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le 11 déc. 2022

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D'autres avis sur Une jeunesse au Moyen-Orient (1994-2011) - L’Arabe du futur, tome 6

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