Errance
7.5
Errance

Manga de Inio Asano (2017)

Vous êtes sûrs que c'est génial ?

C'est des tissus de banalités dépressives m ises b out à bout, on s'enfile des raisonnements complaisamment autodestructeurs et des pages de pratique sexuelle de gens désoeuvrés.

Le dessin est soigné, mais son réalisme de pseudo regard photographique autour de soi le rend franchement dérisoire. Il n'inspire rien. Je croyais être bien parti avec la première page et ce magnifique dessin colorisé, un ton rouge violacé et des éclats lumineux dedans avec un magnifique effet de trouble sur le grillage qu'on croitait déformé alors qu'il est bien droit, mais c'est fait de telle façon qu'il danse. Malheureusement, la suite m'a fait déchanter.Je tourne les pages et les techniques même bien visibles ne sont pour moi que des recettes sans saveur. Il y a bien une certaine esthétique des planches que j'identifie. Par exemple, on a sur un ensemble de deux pages une case qui représente l'intérieur et une autre l'extérieur, genre on a un grand dessin de la ville au loin avec une part belle donnée au ciel couvert par la verticalité, et en bas le visage abattu du personnage comme un peu écrasé et sur l'autre page des cases d'intérieur d'un magasin avec des tas de mangas exposés à la vente, puis la maison du chez soi en contre-plongée. C'est évident qu'il y a un travail de composition, mais même si je l'identifie je ne le ressens pas. Il ne me parle pas vraiment. La page dessinée précédente encore en couleur, on avait un gros plan d'une main sur une poignée de porte et en-dessous un gros plan sur deux pieds statiques et la porte entrouverte. Cela mime un ralenti, une lourdeur du mouvement, mais ça n'en jette pas plus que ça. J'identifie plus le sens à partir des mots des dialogues. Les dessins ne me paraissent pas franchement porteurs, et le problème c'est que l'histoire est très connu, c'est du dérisoire qui aurait besoin d'un bon approfondissement par du plus subtil, par du dessin saisissant, et c'est pas ce que je trouve ici.

On a des cases qui font champ et contre-champ de personnages dont les regards sont fuyants, c'est mille fois vu et revu.Vers la fin du manga, on retrouve des compositions intérieur bordélique du gars qui se laisse aller et monde extérieur. Il y a aussi une évolution avec des cassures de rythme, genre une double page sur un couple heureux en contrepoint du couple principal qui va vers son distance et est en pleine rencontre désagréable, ou une double page de vie quand l'auteur fait une échappée. Mais je ne ressens pas la maestria, le génie expressif. On a des cases qui ne sont plus des dessins mais des cartons à fond noir avec le discours dépressif du mangaka qui n'arrive plus à dessiner, mais comme c'est à côté de toute façon de cases dessinées soignées, je ressens pas la pertinence du truc, et je trouve qu'on est dans le mauvais mélange BD et début de formulation d'un mauvais roman de gare.

Je ne ressens pas l'invasion des cases noires, je ressens leur présence sur les pages où il y a des alternances évidentes, mais c'est juste que ça saute aux yeux. Il manque l'effet génial de ce recours rhétorique.

On voit bien sur certains dessins où on a plusieurs personnages que la déprime est là, on a plusieurs têtes inclinées le regard las qui part sur le côté vers le bas, tandis que d'autres personnages regardent passivement vers le lecteur et un autre regarde absent sur sa chaise dans la direction opposée. OK, On comprend le caractère minable et chiant du discours, de la cérémonie, mais cet unisson il ne souligne pas une société, c'est de l'intime personnel mis sur toutes les têtes autour. Et le manga ne joue pas dans la suite des cases à montrer que c'est le personnage principal qui voit les choses ainsi.

Le héros est à deux doigts de violer sa femme avec laquelle il va divorcer, sauf qu'il n'arrive pas à bander, mais ça repart sur du dialogue compréhensif entre mari et femme qui vont divorcer dans le respect et avec une femme qui estime son mari mangaka. Le gars se complaît à se décrire en monstre, il trompe sa femme dans des relations sordides et surtout à la fin on a la tentative de viol et surtout plus encore la dispute avec l'assistante qui lui renvoie à raison qu'il dénonce les prétentieux, alors qu'il est le pire, et effectivement il sort ses arguments de minable : tu pourras me donner une leçon de vie quand tu vendras plus de mangas que moi. Mais, ce n'est pas en transportant dans un manga des scènes de la vie réelle du mangaka qui ne sont pas à son avantage qu'on fait un travail de génie et d'introspection psychologique.

On a du symbolique qui est tenté avec le motif des yeux de chat de la petite amie qui a quitté le mangaka au départ et ça nous fait un lien avec la chute des deux dernières pages que je ne vais pas livrer ici, mais bon les deux dernières pages j'ai vu une chute ça ne m'a pas fait d'effet.

Tout ça est assez vain.

Le mangaka a des qualités de dessinateur et il y a un travail de mise en page, mais ce qu'il raconte est à la fois sans intérêt et très à côté de la plaque, et puis il n'y a pas le génie qui anime les techniques qu'il élabore : ça ne va pas jusqu'au bout. Le soufflé retombe, je suis désolé, ce mangaka est selon moi surestimé.

davidson
2
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le 16 nov. 2023

Critique lue 9 fois

davidson

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