Diamond Life
7.6
Diamond Life

Album de Sade (1984)

En 1984, débarque presque de nulle part le groupe Sade (car c’en est bien un) œuvrant dans un style que l’on qualifiera de Soul / Jazz / Rock / Pop : un mélange plutôt inédit et inattendu destiné au grand public. Attention nous n’avons pas à faire ici à un produit commercial monté de toutes pièces par Epic Records mais bien au fruit d’un travail commun de plusieurs musiciens.

Au début des années 80, la jeune anglo-nigériane Helen Folasade Adu évolue tout d’abord comme choriste au sein de divers combos. Dans le groupe de Funk Pride reprenant quelques standards du Jazz, son talent vocal l’impose rapidement comme chanteuse principale et elle commence à s’investir dans l’écriture de morceaux (dont le futur hit Smooth Operator). Lorsqu’elle quitte Pride en 1983, Stuart Matthewman (guitare / Saxophone) et Paul Spencer Denman (Bass) l’accompagnent. Avec le renfort du claviériste Andrew Hale et du batteur Paul Cooke ils décident ensemble de composer de façon à mettre en avant la chanteuse et sa superbe voix, nommant le groupe avec son diminutif « Sade ».

Le producteur Robin Millar s’occupe de la production de ce premier album Diamond Life (1984) qui va cartonner au delà de toute espérance, on y trouve sur la pochette la belle Helen (je sais, elle était facile mais je n’ai pas pu m’en empêcher) sa beauté métissée focalisant les regards et l’attention.

Le disque débute sur ce qui deviendra l’un des plus grands succès de Sade : Smooth Operator contant l’histoire d’un businessman sans foi ni loi séduisant les femmes de villes en villes au gré de ses déplacements professionnels (Qui sait ? Il aurait peut-être voulu être un artiste…).

Trêve de plaisanterie, dès les premières secondes nous sommes envoûtés par la voix suave et douce de Sade Adu, alliant la chaleur africaine et la classe britannique. Mais réduire l’entité Sade à sa seule chanteuse serait quelque peu injuste, chaque musicien apporte sa propre contribution : Denman montre son groove à la basse et se permet même un solo central, Hale distille de judicieuses touches de clavier et Matthewman (surtout sur ce titre) nous gratifie de ses envolées au saxo, apportant une touche mélancolique à cette chanson, également bien rythmée par les percussions.

Ce ne sont pas les hits qui manquent ici, et Your Love Is King autre single de l’album offre lui aussi une place importante au saxophone qui donne le ton dès le début et délivre aussi un solo très juste au deux tiers du titre, une langoureuse balade qui squattera le haut des hit-parades, toutefois l’alternance avec des titres plus enlevés est de mise ici, ainsi après un Hang on to Your Love à l’ambiance plus Pop que Jazz (tant pour la voix que la musique) et dominé par la basse lancinante de Denman, Frankie’s First Affair distille des notes jazzy et tristes. Cette histoire évoque un Don Juan multipliant les conquêtes et tombant à son tour amoureux (un morceau Destiné à la BO de Nestor Burma, certainement), souffrant ainsi du même mal qu’il a semé auparavant. Sade Adu y fait étalage de son talent et de sa polyvalence vocale, étant aussi à l’aise sur les parties murmurées que dans les chants plus enlevés et Stuart Matthewman y a une fois de plus la part belle avec son saxo.

Ce disque a connu un grand succès, squattant les charts anglais pendant 48 semaines, mais en analysant froidement les chansons une à une, certaines sont un peu faibles et légères, comme When Am I Going to Make A Living peut-être un peu trop axé Pop conventionnelle. En revanche Cherry Pie développe d’intéressants rythmes Pop / Rock combinés à un feeling jazzy.

Le côté émotionnel est là encore présent sur Sally où elle chante presque a cappella (non, ce n’est pas une ville italienne…) et envoûte son auditoire avec sa voix aux accents Ella Fitzgerald légèrement éraillée dans les graves.

L’album contient également une reprise de Tinny Thomas : Why Can’t We Live Together, hymne à la fraternité et au mélange des cultures (I said no matter what color, you are still my brother), collant parfaitement au groupe Sade, composé d’une chanteuse métisse entourée de musiciens « So British » (peut-être pas si british que ça finalement, ils ont l’air vachement moins arrogant qu’Owen Farrell).

En toute honnêteté les premiers albums des groupes ont souvent une valeur sentimentale et émotionnelle qui peuvent parfois fausser la donne, mais objectivement et bien que Diamond Life ait propulsé magistralement les anglais sur le devant de la scène dès le premier disque, ce n’est probablement pas leur meilleur album : quoi qu’en disent les puristes ayant découvert l’opus à sa sortie (ce qui en vérité est mon cas, mais à huit ans je n’avais pas le bagage pour jauger des disques) Sade a fait mieux par la suite. Ne soyons cependant pas trop sévère car la démarche musicale est originale et le rendu est à la hauteur malgré un ou deux petits accrocs et tâtonnements souvent inhérents aux premiers albums en général. Le groupe recevra d’ailleurs le Grammy Award de la révélation de l’année en 1984.

Quoi qu’il en soit ce disque aura propulsé Sade Adu au rang d’icône mondiale de la chanson et la route du succès étant désormais tracée, le deuxième album Promise qui sortira un an plus tard poursuivra la même voie, la maturité en plus.

Laurent-MuadDib
8
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le 26 janv. 2023

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