Orchestra of Wolves
7.4
Orchestra of Wolves

Album de Gallows (2007)

La belle époque. Putain. Cette haine, cette fougue, cette énergie rampante qui brisait les murs de n’importe quel édifice. Ça tape du pied à l’unisson, ça secoue la nuque au moindre riff fédérateur, ça suinte la bière anglaise. Gallows, à l’époque de Frank Carter, nous enivrait de son punk hardcore qui suintait la sueur et puait la pisse qui gondolait les ruelles de bars malfamés. Et v’là que je te jette ma pinte en pleine gueule et que je te finisse à coup de latte.


Il n’est pas un grand songwritten mais Frank Carter est l’un des frontmans les plus charismatiques de la scène punk actuelle. Ce petit rouquin, dont le corps est devenu une œuvre d’art en soi vu le nombre de tatouages que le britannique arbore, est un condensé de nerfs à vif. Dans ses yeux la folie s’émerge puis sa voix prend place. Des vociférations de terreur, abruptes, qui te crache dessus et restent en tête pendant de nombreuses minutes.


Malmené, mais tu en redemandes. Et même si le groupe n’est plus ce qu’il est puisque son line up a changé depuis quelques années, Orchestra of Wolves a marqué un grand coup à sa sortie. Gallows ne révolutionne pas la sphère hardcore mais son charisme et sa liberté de rythme faisait du groupe, une promesse incommensurable dans le milieu. Passant du punk, au rock, au stoner puis à l’hardcore dans le bruit le plus assourdissant, Gallows délivrait une galette sans concession qui t’arrachait les larmes comme elle t’explosait les tympans.


Le poing levé, tu cries à tue tète en suivant le rythme effréné et bringuebalant d’un album dévastateur aux racines rock 70’s (The Stooges ou Sex Pistols). Malgré ses cassures de tempo à gogo avec son style presque math rock, Orchestra of Wolves n’est pas un album en roue libre mais rappelle la puissance de feu antérieure et créatrice de Black Flag, d’At The Drive In ou Glassjaw (« Abandon Ship »).


Gallows dévoile une maitrise de l’énergie et de la mélodie à couper le souffle à l’image du pharaonique « In the Belly of a Shark » qui passe du gros riff rock à la texture hachée d’un punk dérangé pour au final nous balancer un bon gros solo de gratte qui brule les aisselles, sous couvert de la voix possédé de son chanteur. Ce que faisait Gallows à l’époque fait penser à ce que nous propose maintenant un groupe tel que Code Orange : un brulot incendiaire.


Mais alors que la scène hardcore chaotique actuelle voit beaucoup de groupe rejoindre le label Deathwish et la production léchée de Kurt Ballou, Orchestra of Wolves avait cette atmosphère britannique et différente, presque identitaire avec ses chœurs enragés, si particulière avec son phrasé clinquant et son accent sec comme un coup de trique : tout en représentant parfaitement les questionnements d’une jeunesse anglaise en sursis.


Les riffs fusaient dans tous les sens tantôt dans l’urgence « Come Friendly Bombs » ou dans l’émotion la plus viscérale « Orchestra of Wolves », sans parler de la batterie qui faisait résonner ses fûtes à grands coups de tabassage en règle (« Kill The Rythm » ou « Six years »).


Gallows sont de drôles d’animaux, surtout avec cet album qui ne laisse clairement aucun répit, aucune chance de sortir de ce guêpier à l’image de leur compère américain Converge. Ça crépite de partout, les styles se répercutent, les sonorités hétéroclites s’amusent dans le bon et mauvais gout le plus total grâce à une production efficace et cradingue, mais s’incorporent toujours dans cet accord de principe qu’est celui de tout bruler sur son passage à l’image du titre éponyme et son refrain fédérateur comme jamais.


Orchestra of Wolves envoie tout valser, est aussi dansant que régressif, aussi technique que méchamment libre, au texte aussi émouvant que purulent, intense et agressif et dont le groove rock’n’roll est sans égal (« Orchestra of Wolves » ou « Rolling With the Punches »).

Velvetman
9
Écrit par

Créée

le 21 mars 2017

Critique lue 159 fois

8 j'aime

Velvetman

Écrit par

Critique lue 159 fois

8

Du même critique

The Neon Demon
Velvetman
8

Cannibal beauty

Un film. Deux notions. La beauté et la mort. Avec Nicolas Winding Refn et The Neon Demon, la consonance cinématographique est révélatrice d’une emphase parfaite entre un auteur et son art. Qui de...

le 23 mai 2016

276 j'aime

13

Premier Contact
Velvetman
8

Le lexique du temps

Les nouveaux visages du cinéma Hollywoodien se mettent subitement à la science-fiction. Cela devient-il un passage obligé ou est-ce un environnement propice à la création, au développement des...

le 10 déc. 2016

260 j'aime

19

Star Wars - Le Réveil de la Force
Velvetman
5

La nostalgie des étoiles

Le marasme est là, le nouveau Star Wars vient de prendre place dans nos salles obscures, tel un Destroyer qui viendrait affaiblir l’éclat d’une planète. Les sabres, les X Wing, les pouvoirs, la...

le 20 déc. 2015

208 j'aime

21