True Blood
6.2
True Blood

Série HBO (2008)

Voir la série

Quand j'ai repris récemment cette série à partir de la saison 3, j'ai décidé de replonger dans le dernier épisode de la précédente saison afin de me rafraîchir la mémoire. Et tout de suite, mon impression a été : comment est-ce que j'ai pu regarder cette merde?

Rejet de greffe. Tout est improbable dans cette série, les personnages sont caricaturés au possible, et le bestiaire est tellement hétérogène qu'il en devient écoeurant : on pourrait presque résumer l'univers de True Blood à un sac de problèmes rempli de monstres kitschs. J'ai eu envie de me barrer et d'oublier ces tronches d'hystériques constamment en période de crise, mais je me suis dit : "pas possible, si j'ai accroché avant, y'a forcément une raison".

Et la raison est plutôt belle et terriblement éprouvante à admettre après un tel constat : True Blood est une putain de série qui prend aux tripes. On y parle d'émotion, d'humanité, mais à mille lieues des mélanges fadasses que toute l'industrie de fast-food cinématographique a pu produire.

Certes, Anna Paquin joue [parfois] mal. On a envie de la baffer, d'aller lui faire prendre des cours de théâtre et de lui montrer qu'un fusil à pompe se tient pas comme une binette [je modère en précisant qu'elle fait sûrement de son mieux... ...et merde je m'enfonce]. Certes les incohérences concernant les supposés pouvoirs et la façon stupide qu'on parfois les vampires de crever font vaciller la crédibilité déjà entamée par des rôles surjoués. Mais qui sommes-nous pour exiger des fictions une totale adéquation à la réalité? Qui peut prétendre avoir vu une série sans incohérence? Depuis que les fictions existent, les faits y sont déformés afin de servir la narration, qui n'a aucune vocation à décrire nos vies mais à les transformer pour nous les faire revivre d'une manière fantastique. Et qu'est-ce qu'on se ferait chier si tout était plausible : l'aventure s'enliserait dans la banalité.

C'est ma première critique sur ce site, alors je vais vous faire une confidence : je n'ai, à de rares exceptions près, jamais vraiment ressenti les émotions des personnages dans tout ce que j'ai pu voir jusqu'ici. Tout me paraît toujours lointain, vague, et purement rationalisable ; ou au mieux moyennement intense. Dans True Blood, pour la première fois, et à mon plus grand étonnement, j'ai réussi à éprouver, oui à éprouver, à ressentir pleinement des sensations profondes, de gentillesse, de colère, de haine, de délire. J'arrive à "tilter" ce que pigent les personnages en même temps qu'eux, mais pas intellectuellement. C'est con à dire, c'est gras, c'est honteux. Mais merde, c'est mon expérience. Et non, je ne suis pas en train de changer de sexe ni de dire que cette série est si basique qu'elle ne tournerait qu'autours des émotions les plus primaires. Loin de là.

Loin de là parce que le scénarion de True-Blood, au contraire de ce que disent certain, n'est pas qu'un ramassi de merde propre à coller 3 pages de non-sens : c'est un enchevêtrement de situations extraordinaire qui font monter en neige des réflexions vraiment raffinée à propos des relations, de la manière de se parler, de baiser, de faire l'amour, de se réconcilier face à un danger plus grand ou face au vide intersidéral, de gérer sa famille de tarés, son taf de cinglé, et une ville de merde d'où rien ne ressort sauf des emmerdes. Alors oui, on en chie avec Sookie et les clichés, mais en retour on se tape des récompenses ultimes, car True Blood est aussi un monstre d'humour et d'auto-dérision.

Mention spéciale à Jason Stackhouse, simplement le meilleur personnage de la série. D'abord gros stéréotype sur les bords propres à gâcher l'immersion dans l'histoire, puis trouble-fête halluciné (accro au V) propices aux délires les plus bouleversants, toujours barré dans des histoires invraissemblables et en marge du fil principal, quel plaisir IMMENSE de le voir ensuite évoluer petit à petit pour devenir cette personne à la bêtise si innocente et utile, qui finalement trône comme étant la plus stable et emplie de bonté de toute cette série. On en chialerai tellement c'est improbable et magnifique.

Mais bien d'autres personnages méritent d'être cités, comme la folle hystérique qui bosse au Fangtasia et qui arrête pas de hurler (gag à effet garanti), Pam et ses réflexions froides à la Daria, les dialogues crus entre Lafayette et sa cousine Tara.

Pour finir True-Blood est antidémago, je pense aux relations qui se barrent littéralement dans tous les sens et renvoient Twilight dans le rayon "Contes pour enfants", ou par exemple au dialogue entre la sorcière Marnie et son hôte Antonia, qui laisse place à une vengeance sociale et infantile franchement assumée pour à la fin retomber dans la bien-séance, mais non sans un cri de rage qui donne à ce coup de gueule une allure de leçon pour tout le monde. Une parenthèse délicieuse qu'il faut saluer pour son audacité, merveilleusement bien exprimée par l'incroyable actrice Fiona Shaw, irlandaise, irréductible et pleine de charisme.
Et question vengeance, la saison 3 est une lente montée de violence (Russel Edington notamment) que la saison 4 achève avec une rare maturité. La folie des évènements n'a plus de limite et on s'en prend plein la gueule : l'amour, la manipulation, la maltraitance, la colère contre tous, le paraître, la "classe", tout est déchiré, cassé, c'est la crise de nerf et le moment d'en finir.

Parce que True Blood c'est ça au fond : nous faire avaler la pilule qu'on essai de nous faire avaler depuis toujours, mais cette fois-ci avec la manière et l'enrobage qui manquait. Tout est question de style au fond.

----------------------------------
Ce que j'ai vraiment aimé :
----------------------------------

Casting:
----------
* Jason Stackhouse (acteur taillé pour le rôle magnifique du beau-gosse plein de bonté et de témérité se trouvant toujours à la fois là où il faut et là où il faut pas. Un paumé de l'univers infini, véritable catalyseur de l'existence humaine.)
* Eric Northman (vampire viking au physique hallucinant. Respect. Choix judicieux qui se bonifie avec le temps.)
* Russel Edington (on pouvait pas trouver mieux dans le genre "j'ai pas l'air comme ça mais j'ai 3000 ans". Quelle putain de gueule, au sourire plein de sadisme et de puissance, à l'allure pleine de noblesse mêlée de folie cynique. Cet abominable enfoiré enterre vivant Dracula, fingers in the noze.)

Aussi, toutes les minettes super jolies comme la Reine de Louisianne, Lorena, et Jessica. Des beautées de premier choix qui apportent leur aura de fantasme à cet univers poussiéreux. Le mélange sexy et gore a rarement été aussi crédible.

Coeur de la meule :
----------
* Les émotions sont plutôt bien retranscrites : naïveté, bonté, mansuétude, ras le bol, etc, les instants émotifs et les idées sont clairement perçus. L'enchaînement des ressentis est cohérent et consistant.
* La psychologie des personnages (Jason, Sam Merlotte, Tara)
* Les situations délirantes, l'évolution complètement tarée, les flashback tripants.
* Jason (oui désolé)...

En plus le générique est à la hauteur du show. Tout y est : appartheid, Ku-klux-klan, religion, mort, métamorphose....

Pfff, j'arrête là. Je regrette qu'une chose : n'avoir pas pris assez le temps de déguster cette série. Je ne met pas 10 étoiles simplement pour le côté "difficile à gober au début".

Sur ce, je révoque moi-même mon invitation sur cette page. Amen.





Héraès
9
Écrit par

Créée

le 1 oct. 2011

Critique lue 1.9K fois

17 j'aime

3 commentaires

Héraès

Écrit par

Critique lue 1.9K fois

17
3

D'autres avis sur True Blood

True Blood
Karrie
7

Cry, bitch!

Parmi la diarrhée médiatique réservée aux fascinantes créatures de la nuit que sont les vampires, on trouve beaucoup, beaucoup de merde (normal pour une diarrhée. *rires enregistrés*), dont la pierre...

le 25 sept. 2011

44 j'aime

6

True Blood
Godspeed_Ya_SoB
8

Popcorn 1er choix.

Alan Ball, c'est avant tout Six Feet Under, une série qui approche la perfection sous tous les angles. Et si t'es pas d'accord, c'est que t'as pas compris et c'est comme ça. Alors avec True Blood, on...

le 15 oct. 2010

40 j'aime

6

True Blood
real_folk_blues
2

True Daube

Résumons: 1- Une blondasse ingénue qui veut pas coucher qui finit quand même par coucher avec un mec qui pourrait être son arrière grand père. 2- Un vampire super ténébreux qui souffre d'être une...

le 11 avr. 2011

35 j'aime

11

Du même critique

Abstract : L'art du design
Héraès
2

Le fascisme de la vanité

Après 28mn de souffrance, j'arrête. Dès les premiers instants, la masturbation intellectuelle qui se dégage du docu est dérangeante, mais après une combinaison de propos vides et prétentieux, je n'en...

le 9 avr. 2017

7 j'aime

11

OtherLife
Héraès
9

Matrix, Inception, et Black Mirror sous DMT

C'est une claque quasi Kubrickienne que je viens de me prendre. Tout dans ce film relève du génie, à commencer par la qualité filmique irréprochable, digne d'un Matrix pour son esthétique, et à la...

le 19 oct. 2017

6 j'aime

3

Mes chers voisins
Héraès
9

Attention : oeuvre d'art qui ne se prend pas au sérieux !

Dès le générique, le style "made in hollywood" se fait sentir, ainsi qu'une touche déjantée propre aux cinéastes amoureux des genres (comédie, drame, gore, nanar) . Vraiment déjantée, on sent tout de...

le 26 juin 2012

6 j'aime