The Beatles ont bercé mon enfance. Yellow Submarine et Help! étaient diffusés dans nos écrans cathodiques, alors que leurs morceaux étaient étudiés lors des cours de musique où nos flûtes ne rendaient pas honneur à leurs talents. Pour autant, cela ne fait pas de ma personne un fin connaisseur de leur discographie.
Get Back
The Beatles : Get Back est un documentaire fleuve de 7h32 sous la supervision de Peter Jackson.
Nous sommes en 1969. Après deux ans sans donner de concert, le groupe se décide à en faire un dans un lieu encore non défini. Ils en débattent, écoutant les suggestions de chacun des membres du groupe, ainsi que celle de leur manager, des techniciens, de Yoko Ono, du livreur de pizzas, bref de tout le microcosme qui s’agite autour d’eux.
Tripoli, la capitale de la Libye, est régulièrement évoquée, en raison de son cadre dans d’anciens vestiges romains avec une acoustique digne des arènes de Nîmes. The Beatles ne se montrent pas emballés à l’idée de s’éloigner de Londres. Les incidents lors de leur venue à Manille, capitale des Philippines, restent un traumatisme. Surtout, le groupe doit préparer ce concert dans un temps imparti, en raison de l’engagement de Ringo Starr pour jouer dans The Magic Christian avec Peter Sellers, Raquel Welch et John Cleese.
En 22 jours, ils doivent créer de nouvelles compositions, effectuer les répétitions puis définir le lieu où doit se dérouler le concert. Dans ce contexte particulier, on leur propose de filmer l’intégralité de cette période sous la direction de Michael Lindsay-Hogg, voire d’en tirer un film. Un réalisateur qu'ils connaissent bien, puisqu’il a déjà mis en scène certains de leurs vidéos clips dont Hey Jude, avant de faire de même avec leurs rivaux The Rolling Stones.
Au bord de la rupture
The Beatles sont au bord de la rupture. Les membres du groupe ne se remettent pas du décès de leur manager Brian Epstein en 1967. L’homme savait gérer les egos de chacun pour maintenir une certaine entente au sein du groupe. Chacun vit ce deuil à sa manière. Un fossé se creuse, qui ne sera jamais comblé, entre les différents membres du groupe.
Paul McCartney prend le rôle de leader avec sa magnifique barbe. Un rôle qu’il partageait avec John Lennon, mais celui-ci est obnubilé par sa muse Yoko Ono. Le couple est fusionnel. Ils ne se quittent plus. Elle est omniprésente, ce qui accentue les tensions entre eux. George Harrison tente de trouver une certaine paix dans la spiritualité, tout en essayant de faire entendre sa voix, alors que Ringo Starr se montre bienveillant, en tentant de maintenir une certaine cohésion au sein d'un groupe.
L’histoire est connue, du moins si on apprécie un des plus grands groupes de l'histoire de la musique. Pourtant, on se surprend à espérer qu’ils se réconcilient pour avoir une carrière aussi longue que celle des Rolling Stones. On sent une certaine complicité entre Paul et John, sous le regard de Ringo, alors que George ne semble déjà plus être là.
Durant cette période, il les quitte durant quelques jours. Un départ qui exacerbe les tensions au sein d’un groupe à bout de nerfs. Un trouble accentué par une Yoko Ono voulant constamment donner son opinion, alors que John Lennon se montre mutique face à la situation. Dans ce contexte, ils se posent la question de le remplacer par Eric Clapton. Une réunion est organisée entre les membres du groupe, auquel les caméras ne sont pas conviées. L’important est ailleurs, George Harrison fait son retour et les répétitions peuvent reprendre dans une ambiance plus détendue, surtout grâce à la présence d'un de leurs amis, le claviste Billy Preston.
Les affres de la création
Le documentaire nous permet d’assister aux interactions entre les différents membres du groupe, ainsi que de découvrir la place de chacun. Surtout, on découvre le processus créatif, qui est des plus passionnant.
Get Back, la chanson écrite par Paul McCartney, est le fil rouge du documentaire. Elle est inspirée par le contexte social qui secoue le Commonwealth. On en découvre les différentes versions, ainsi que les doutes et discussions autour du thème et de ses paroles, avant qu’une étincelle ne jaillit au sein de ses esprits créatifs pour en faire un des classiques de la discographie déjà conséquente du groupe.
Le perfectionnisme de Paul, ainsi que ses directives sont aussi un sujet de tension au sein du groupe. Il en ressort aussi une certaine émulation qui les pousse à donner le meilleur d’eux-mêmes.
Paul fait preuve de clairvoyance sur la situation. Il est conscient de son exigence et ne cesse de s’en excuser, tout en continuant de les repousser dans leurs derniers retranchements. Il en va de même sur la relation entre John Lennon et Yoko Ono, dont il relève l’absurdité du fait qu’elle soit désignée comme responsable des tensions au sein du groupe et d’en faire un bouc émissaire. On sent que Paul veut que le groupe surmonte cette phase critique. On le perçoit dans la tristesse qui émane de son regard lorsqu’il évoque l’évolution de sa relation avec John.
Plus c’est long, plus c’est un peu trop long
Une certaine redondance et lassitude se font ressentir, à force de les voir répéter, encore et encore, le même morceau, en l'occurrence Get Back. On a l’impression de tourner en rond, d'être face à un concert interminable. Les jours se suivent et se ressemblent. Ils sont aussi épuisés que nous. On a le sentiment d'être dans Un Jour sans Fin, mais sans son aspect romantique et humoristique.
Puis, la lumière au bout de la salle de répétition fait son apparition pour nous emmener sur le toit du studio d’enregistrement. Après moult tractations, le groupe décide de se produire en ce lieu. Un concert live qui va mener à l'enregistrement de l'album Let it Be, qui signe aussi la dernière prestation du groupe en public.
L’écran est divisé en plusieurs parties, afin de nous permettre d’assister au concert, aux diverses réactions des gens dans la rue et sur les toits, ainsi que la venue de la police, suite à des plaintes pour troubles à l’ordre public. Un procédé qui rend ce moment magique immersif.
Enfin bref…
The Beatles : Get Back est un documentaire exceptionnel. Le travail d'archivage et de montage est titanesque. Il nous permet d’assister à cette période de la vie du groupe, de ressentir les diverses émotions qui animent chacun de ses membres, aux affres de la créativité jusqu’à ce concert mythique sur le toit du monde de Londres.