Les histoires d'amour finissent mal

Une série-documentaire consacrée au club de football de Sunderland dans le nord de l’Angleterre, longtemps cantonné au ventre mou de la Premier League mais très populaire, avec un socle de supporters solide issu d’une zone particulièrement touchée par la précarité, qu’on pourrait comparer dans notre hexagone au RC Lens ou à l’AS Saint Etienne.

La saison 1 débute au moment où le club descend en second division, avec comme particularité de nous immerger au plus près des enjeux sportifs, économiques et humains relatifs au sport professionnel, de la déliquescence d’une institution vieille de presque 150 ans, la saison va se révéler être un véritable chemin de croix, avec des entraineurs qui se succèdent, des joueurs démotivés, un actionnaire absent et des dirigeants devant composer avec des coupes budgétaires. Le plus émouvant reste les supporters dévoués corps et âme, pouvant toucher les étoiles pour deux petites victoires d’affilée et sombrer dans la plus totale déprime pour deux défaites, et l’on se prend de passion, comme eux, pour Sunderland au fil des épisodes, bien que l’issue soit assez terrible puisqu’ils redescendent directement en troisième division, l’amour reste intact passé la colère.

La saison 2 repart avec des objectifs ambitieux pour la remontée du club et un nouvel investisseur, plus proche de la ville et ses supporters, où les dirigeants vont se retrouver dans la situation intenable de réparer les dégâts de leurs prédécesseurs, notamment au sujet des contrats de jeunes, de dépenses inutiles ou de salaires inadaptés à la League One. S’en suivront des épisodes ultra captivants, comme ceux de la période de transferts, avec le départ de leur pépite Josh Maja manipulé par son agent, et les dernières heures du mercato hivernal et le "panic buy" sur Will Grigg, s’en est presque étouffant. La dernière partie de la série s’apparente à une tragédie en plusieurs actes, avec des rebondissements en pagaille, des égalisations de dernière minute, et deux finales à Wembley qui vont faire couler à flots les larmes des supporters, à dire vrai ça m’a également brisé le cœur.

La série fonctionne dans sa dramaturgie à la limite de la fiction tant elle parait irréelle à bien des égards, autant dans les réactions des dirigeants du club s’affairant à garantir sa pérennité économique, des supporters démesurément passionnés ou le scénario fou de certains matchs, même si l’on n’aime pas le football il est fort probable de se laisser emporter.
L’un des seuls hics, de taille, reste des discours bien souvent horriblement creux, comme «il faut absolument marquer pour gagner», «Sunderland doit égaliser pour rester dans le match», «si on vend ce joueur ça nous fera de l’argent», etc, et ce de par la voix de protagonistes de la série, et non d’une voix off infantilisante, ce qui rend assez absurde des moments qui n’en avaient clairement pas besoin.
En tout cas ce genre de format série, à suivre les coulisses d’un club pro, demeure extrêmement satisfaisant, et qui a déjà des dérivés avec le Tottenham de Mourinho ou le Leeds de Bielsa, m’étonnerait pas que j’y jette un œil très prochainement.