She-Hulk : Avocate
4.3
She-Hulk : Avocate

Série Disney+ (2022)

Voir la série

Il serait trop facile de tomber dans un des deux choix que propose la série.

Celui de la soutenir pour sa nouveauté, ses choix formels alternatifs ou ses engagements en oppositions aux clichés du genre.

Celui de la rejeter sensiblement pour les mêmes raisons.

Il est fascinant de lire que ces éléments sont mis en avant et représentent les principaux « atouts » vendus par la plateforme qui la diffuse.

Une héroïne qui brise le quatrième mur, dans un mélange de série comédie, série « juridique » et super héroïque. Ma foi, rien de tout cela ne doit être sujet à passion, positive ou négative du reste.


Comme une bonne recette, nous avons les ingrédients principaux, goûtons le mélange.

Chaque élément en soi n’a pas de saveur particulièrement relevée, tout ayant étant déjà été vu. Pour autant, ce n’est pas parce que c’est déjà vu que c’est forcément mauvais. Avançons.


Là où pêche la série, c’est hélas dans l’émulsion de l’ensemble, car chaque élément est bien mis en avant mais rien ne semble prendre. L’un des principaux défauts de la série étant son personnage principal, dont on sent qu’il est un caractère secondaire dans l’univers présenté jusqu’à présent et qui se vit comme tel. Heureusement, le plus petit et le plus apparemment insignifiant des êtres peut se révéler exceptionnel quand il rencontre son destin.

Ce que Miss Hulk n’a pas. Jennifer Walters n’a pas de destin car sa vie n’a pas de direction, pas de sens. Pas d’amis sinon des complicités de bureau, pas de personnalité sauf celle d’être victime du monde qui l’entoure, pas d’identité autre que femme et cousine du géant vert. Tout autour d’elle lui est hostile et elle est hostile à ce qui l’entoure.

Heureusement, il y a le spectateur. Et le dialogue avec ce dernier va être un gimmick régulier et curieux.

Jamais totalement dans sa vie car consciente d’être un personnage de série, Jennifer Walters semble ne pas prendre les événements qui lui arrivent au sérieux, et réciproquement. Tout paraît forcé, tout paraît faux, tout paraît trop. Difficile de s’attacher à qui que ce soit dans ce contexte.


Sans réel enjeu, sans réelle histoire, on aura le droit à des caméos sortis du chapeau, à des personnages clichés au possible de couturier, milliardaire, rencard ou de femmes soit excessivement fortes soit excessivement exubérante, qui donne l’impression d’être en inadéquation avec la revendication d’engagement (notamment féministe) du programme. On a donc le droit à Miss Hulk contre la vendeuse de cosmétique, Miss Hulk contre le prof de yoga, Miss Hulk contre le couturier, Miss Hulk va à un mariage, Miss Hulk drague et est draguée, Miss Hulk couche avec qui elle veut, Miss Hulk se bat contre les trolls d’internet.


Pendant un moment, j’ai eu l’impression d’un grand vide, comme la sensation de regarder une partie du néant que l’on peut parfois observer, absorber et ressentir après avoir traîné plusieurs longues minutes sur le fil de déroulement de story sur TikTok, sans lien entre les contenus mais avec une touche de spectaculaire à chaque défilement de video. Une télé-réalité gênante. L’absence qui fait suite à ce moment est particulière et indicible. L’ennui trompé n’est pas particulièrement suivi d’un bien être ou d’un quelconque apport. On a juste passé le temps. Ou le temps a passé et on était là.


Cette sensation est confirmée par la série dans son dernier épisode. La suite contient donc du spoil.


En effet, alors que le récit devient visiblement et caricaturalement aberrant, le personnage principal s’insurge. Pourquoi ? Et comment est-ce possible que sa série se conclut ainsi ?

Elle va rencontrer les scénaristes, bande visiblement abrutie qui déblatère cliché sur cliché dans une réunion brainstorming qui rappelle celle de Matrix 4 (pas le meilleur moment du film). Et ceux ci la renvoie vers une intelligence artificielle, qui aurait formaté le contenu qu’elle vit (ainsi que le MCU). Et leur discussion est un aveu d’échec.

À y réfléchir… Curieux que Disney s’épanche ainsi dans la scène peut-être la plus dramatiquement sincère de l’ensemble :

Il n’y a rien à dire mais l’important, c’est de le dire quand même de manière divertissante.

(A ce moment là, l’héroïne est d’ailleurs invitée à reprendre forme humaine car « les effets spéciaux coûtent cher ». La série n’a rien a dire et si possible pour pas trop cher. Ça pourrait être drôle si ce n’était pas si vrai)

Jennifer Walters aura beau s'indigner en exprimant son mot d’ordre dans la série

(En substance « J’ai une vie à vivre et des choses à dire. »), on aurait aimé que ce bel état d’esprit soit suivi de fait.

Mais à force d’analyser l’envie et le besoin d’exprimer les choses au lieu de les exprimer, on a finalement droit à la seule superficialité de la coquille vide raisonnant d’un bruit sourd dont le but est de faire croire qu’elle pourrait ne pas être vide (alors qu’elle assume l’être par ailleurs) mais voilà, une saison 2 promettrait de remettre les choses à plat.


(Aka :

« J’ai quelque chose à dire !

- Oui ? Quoi ?

- Je tiens à dire que j’ai quelque chose à dire !

- D’accord, on t’écoute.

- Écoutez moi dire ce que j’ai a dire »

Etc…)


Quand bien même, un personnage sans aspérité pourrait avoir la force de permettre à chacun de s’y identifier, l’héroïne est hélas trop creuse et la vie quotidienne dans laquelle elle n’a jamais aucune évolution de personnage ne fait qu’embourber encore le peu d’intérêt que pouvait présenter la série, décidément inconséquente.

Par nature, le néant a ceci de traître qu’on ne sent pas sa présence, et qu’on s’y noie rapidement. Le miroir qu’aurait dû être Jennifer ne réfléchit rien.

(Au moins donne-t-elle quelques regards au spectateur, c’est lui qui finance après tout, ça brise le rythme inexistant et la cohérence déjà absente, mais ça permet de lui rappeler qu’on attend de lui qu’il se sente concerné)


Enfin, ça ne peut pas être mauvais si c’est insipide. Laissons les spectateurs en débattre sur internet, il en restera toujours quelque chose.


La série s’achève donc sur une démonstration :

l’absence d’âme du programme est assumé, son côté cheap aussi, il ne sert qu’à combler le vide entre deux films.


Mais à quel prix ?


Celui de l’insignifiance (si possible en 4K)

Mais rassurons nous, Disney en est conscient, ce qui rend la démarche beaucoup plus divertissante. N’est-ce pas ?

N’est-ce pas ?

N’est-ce pas ?

Dans ce vide, l’écho ne trouvera de fin que dans la désertion du public.

N’est-ce pas ?

N’est-ce pas ?


PS : la frustration qu’a été la rencontre avec cette série m’a poussé à essayer d’en extraire quelque chose de consistant.

Mais même ma critique me semble décevante et conserve un goût d’inachevé.

Comme une conscience d’être englué dans ce piège de la réaction à rien, la participation à la caisse de raisonnance qui fait malgré tout vivre ce morceau de « contenu », comme l’insoutenable écho de ce vide cyniquement exploité qui vertigineusement persévère sans l’horizon rassurante d’une limite…

Zedbahr
2
Écrit par

Créée

le 14 oct. 2022

Critique lue 19 fois

Zedbahr

Écrit par

Critique lue 19 fois

D'autres avis sur She-Hulk : Avocate

She-Hulk : Avocate
bulchick
1

Inégalité salariale, LOL

Trois épisodes auront suffi pour dresser le diagnostic: le MCU est mort et il ne tient plus qu’à vous d’en pleurer ou de vous moquer de sa tombe. J’ai personnellement été prise d’un long fou rire...

le 29 sept. 2022

24 j'aime

12

She-Hulk : Avocate
Faribole-qui-bug
2

Ce qui est sûr, c'est que cette série ne mérite certainement pas 10/10

J'ai été agréablement surpris par la médiocrité de la mise en scène, par l'infantilisation de certains dialogues et de certaines scènes. J'ai également apprécié le fait que la cgi me donnait...

le 6 sept. 2022

19 j'aime

She-Hulk : Avocate
Guillaume9999
10

Ulk se conjugue aussi au féminin

She Ulk ce n'est pas seulement conjuguer Ulk au féminin. Shulk c'est avant tout une décharge de sérotonine dans la tronche-right into my veins Goda - des vacances paridisiaques à Copa cabana ;...

le 24 août 2022

15 j'aime

6

Du même critique

Insaisissables
Zedbahr
6

Ceci n'est pas Le Prestige

Commençons par éclaircir les choses. INSAISSABLES N'EST PAS UN REMAKE DU PRESTIGE !!!!! Le film pose des enjeux et un traitement de la magie totalement différent. Et les deux films n'ont rien de...

le 29 juil. 2013

43 j'aime

9

American Nightmare
Zedbahr
3

Un titre qui sent l'auto-critique...

Dans un futur perdu, les pérégrinations perverses et perfides sont permises l'espace d'un temps où tarés et dinguo, meurtriers et tordus peuvent l'espace d'une nuit assouvir leur passion...

le 25 juil. 2013

26 j'aime

1