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Ce que j’adore avec Montre ça à personne, c’est qu’on reprend un concept classique de série : un projet fou d’une bande d’amis soudée sur laquelle personne ne mise. Sauf qu’ici tout est vrai et que Caen remplace la big apple new yorkaise. Le tout repose sur un protagoniste hors norme, entouré de potes tout aussi singuliers, formant un groupe de provinciaux paumés qu’on donnerait perdant face à tout obstacle. Et pourtant Clément, le frère d’Orelsan, y croit dur comme fer et dégaine son caméscope à la moindre occasion, quand il se passe quelque chose mais surtout quand il ne se passe rien. Et c’est de là que le docu tire sa puissance, en prenant le temps de montrer ce train de vie étudiant, celui qu’Orelsan décrira dans son premier album avec ses mots à lui. Le docu s’appuie sur des heures et des heures de vidéos de l’époque, avant même qu’Orelsan ne sorte le moindre single, avant même qu’il ne commence à croire en lui, en son talent, avant qu’il ne se mette au travail. Des séquences rares qu’on ne retrouve dans aucun autre docu du genre, ou jamais en quantité suffisante pour en faire une vraie série.


Bien qu’on connaisse le succès actuel d’Orelsan, son ascension reste pleine de suspense dans ce documentaire, savamment découpé en six épisodes qui représentent chacun un milestone de plus en plus grand dans la carrière naissante du rappeur. Se présenter à un battle de rap, tourner un clip, le voir diffusé sur MTV, enregistrer un album, faire un concert à Paris, partir en tournée, faire un film… Chaque étape en amène une plus grande encore, s’avérant parfois être douce amère. C’est sans compter sur les retours de flammes des débuts provocateurs du rappeur, autrefois instrumentalisés et dont il cherche ici à reprendre le contrôle narratif. C’est une autre force du documentaire, parler de l’intégrité artistique, de la place du rap dans la culture populaire, de la rançon du succès pour un artiste incompris aux multiples facettes, tributaire du soutien de certains artistes, tourneurs et patrons de radio. On s’intéresse à quelqu’un qui a fait des vagues, a bousculé les codes avec son franc parler faussement désinvolte, a écrit sur sa famille, ses amis, sa ville, ses amours, tout ce qui l’entoure et autant de regards qu’il doit affronter. Le porte parole d’une génération qui n’a jamais demandé à devenir son modèle. Enfin quelqu’un qui a fait avancer la représentation du rap, le genre roi du streaming aujourd’hui, de plus en plus reconnu par les critiques, mais longtemps considéré comme une musique de parias. Une ribambelles de rebondissements sur les quinze dernières années, bien plus divertissants que le scénario ridicule de la série Canal Validé…


Enfin la série vient nous cueillir là où on s’y attend le moins, au fil des épisodes quand l’attachement aux “personnages secondaires” s’intensifie, quand l’émotion d’une étreinte entre Orel et Gringe se fraie un chemin. On voit beaucoup de générosité en six épisodes, un peu d’errance et une folle envie de réussir. C’est beau de voir une bande traverser les décennies comme ça, partager son triomphe. Pour autant le documentaire ne tombe jamais dans le scoop ou l’intime -on n’aperçoit qu’une seule seconde sa femme. Montre jamais ça à personne reste ultra professionnel, on parle de trouver sa voix artistique, rester fidèle à soi-même, réussir à se faire comprendre du public, de tous. Le docu évite donc l’écueil d’être mégalo-centré, en mettant en lumière le crew et les proches du rappeur. On voit tout ce qu’ils lui ont apporté, l’ambition et le professionnalisme de son producteur Skread, le charisme naturel et l’humour de sa moitié rappeur Gringe, bon si quelqu’un a compris ce que fout Ablaye merci de m’expliquer mais on apprécie quoiqu’il arrive sa bonne humeur contagieuse, et on n’oublie pas la passion et le soutien de sa grand-mère. Et on voit tout ce qu’il leur a rendu, comment ils ont grandi, ensemble. Et on est très content que Clément nous montre ça aujourd’hui !

Amaury_BoatVacher
9

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Créée

le 16 mars 2022

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Amaury Boat

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